Entre les murs du CSPLA, les ayants droit, majoritaires, ont fait état de leurs commentaires relatifs au rapport Sirinelli sur l’opportunité de la révision de la directive sur le droit d’auteur. Au fil des échanges a été abordé le sujet de la copie privée.
La Sacem s’oppose à toute tentative d’harmonisation
Lors de cette séance plénière de novembre dernier, dont le compte rendu sera rendu public dans quelques jours, on voit une nouvelle fois combien les ayants droit sont opposés à toute idée d’harmoniser la copie privée. « La SACEM est préoccupée au sujet de l’avenir de la copie privée et est opposée à toute tentative d’harmonisation » indique sans nuance le représentant de la société collective. Elle refuse donc de tenir compte du critère européen dans la détermination de l’assiette, mais aussi et surtout des taux. Une analyse qui rejoint celle de Fleur Pellerin, moins celle de certains magistrats.
Avec quels arguments ? « La situation n’est pas homogène dans les différents États membres : certains d’entre eux décident de protéger la création en élaborant un système « robuste » en matière de copie privée tandis que d’autres ne respectent pas le droit européen » soutient encore la société de collecte et de répartition. Elle dénonce là en creux la situation au Royaume Uni, qui a décidé de se passer de cette redevance tout en reconnaissant l’exception de copie privée, ou celle de l’Espagne qui a décidé de fiscaliser le mécanisme, raboté en une subvention de 5 millions d’euros par an.
« Force est de constater, par ailleurs, que la jurisprudence laisse une marge de manœuvre aux États membres en vertu des principes de subsidiarité et de proportionnalité » ajoute encore la SACEM. C’est justement cette marge de liberté qui est mise en œuvre au Royaume-Uni, celui-ci considérant qu’à l’époque du streaming, la copie n’est plus que résiduelle. La société de gestion collective voit en tout cas dans l’harmonisation une épée de Damoclès tranchante : « sur cette question, une harmonisation serait très dommageable au système français, comme l’ont montré les préconisations dangereuses du rapport Vitorino, qui avaient trait à la suppression de la copie privée pour les services en ligne, le nivellement par le bas de la rémunération ou encore le paiement de la rémunération par les détaillants et non plus par les importateurs. »
Il est vrai que cette proposition du commissaire Vitorino, visant à déporter le paiement de la RCP au niveau des détaillants, aurait permis de discriminer entre ceux qui doivent supporter cette redevance (les personnes physiques pour leurs besoins privés) et les autres (les acheteurs pros). Le mécanisme aurait donc entrainé une baisse conséquente des rendements, en plus des frais de gestion très lourds pour les ayants droit. Le choix français, qui consiste à prélever la RCP au plus haut de la chaîne commerciale, chez l’importateur ou le distributeur, permet heureusement de faire payer tout le monde, en faisant peser la charge du remboursement ou de l’exemption sur les épaules des personnes qui n’avaient pas à payer. Une situation plus généreuse, puisque les bénéficiaires ont pu aspirer en 2013, 240 millions d’euros.
L’extension de la redevance au « cloud »
Du côté de la SACD, les appétits rémunératoires se sont davantage portés sur la question du cloud. « Aujourd’hui, des opérateurs importants, qui sont en passe de faire migrer la copie privée de leurs box vers le nuage, sont demandeurs de l’application de la copie privée à ce type d’activité » assure la société chère à Pascal Rogard.
« Le CSPLA a tranché dans ce sens, et il est temps de prendre acte, par la loi si c’est nécessaire, que les copies faites dans le « cloud » ressortissent au régime de la copie privée » s’impatiente-t-elle. (Sur ce sujet, voir notre actualité)
Des fuites sous la table
Lors des échanges, nourris, des participants se sont un peu agacés de voir que des documents du CSPLA puissent sortir avant l’heure dans la presse. Pascal Rogard a très justement dressé un parallèle avec la commission sur la copie privée où « certains sites malveillants à l’encontre du droit d’auteur instrumentalisent systématiquement les documents de travail des instances du secteur pour diaboliser le droit d’auteur. »
En cliquant sur ce lien on pourra télécharger en avant-première le projet de compte-rendu de cette séance, prochainement avalisé au CSPLA.