BitTorrent : témoignage de Boris P., condamné pour son site GKS

Hongrois rêver
Droit 5 min
BitTorrent : témoignage de Boris P., condamné pour son site GKS
Crédits : serggn/iStock/Thinkstock

« Je ne suis pas au courant de grand-chose de plus que vous ! ». Voilà ce que nous confie Boris P., assez interloqué que Next Inpact soit le seul site à avoir pris la peine de le contacter. Ce jeune homme de 28 ans, condamné hier à 2 millions de dommages et intérêt et 6 mois de prison avec sursis pour son site de liens Torrent GKS, témoigne dans nos colonnes.

Hier, le tribunal de grande instance de La Rochelle a examiné l’affaire soulevée par la Sacem, la SCPP et des producteurs de films notamment. En cause, GKS, son tracker privé, où on pouvait trouver quantité de liens Torrent. Seul souci, son responsable ne s’est pas présenté à l’audience. Selon plusieurs médias, Boris P., installé désormais en Hongrie, aurait refusé de rentrer en France. Alors que le parquet avait requis un an ferme et 100 000 euros d’amende, les juges l’ont finalement condamné à 6 mois avec sursis outre 2 millions d’euros de dommages et intérêts, essentiellement au profit des professionnels du cinéma. Contacté, Boris P. (Meska) tombe de sa chaise :  « j'ai été jugé sans le savoir, alors que mon entreprise est localisée chez ma mère ! »

Je n'ai pas fui en Hongrie

GKS était à l’origine « un petit tracker ouvert avec une centaine de potes en décembre 2010. Le but était de pouvoir s’échanger des fichiers, essentiellement légaux. Au fil du temps, beaucoup de personnes m’ont cependant incité à ouvrir plus largement les inscriptions ». Avec des portes plus largement ouvertes, alimentées par le bouche à oreille, le site a au fur et à mesure pris de l’ampleur.

Voilà cependant trois ans que Boris P. assure être installé désormais en Hongrie. «C’était le 1er février 2012 » nous indique-t-il, doigt sur l'agenda. Il y a fait sa vie et gère depuis Budapest son entreprise encore installée en France. « C’est une entreprise d’infogérance, d’administration de serveurs dédiés, c’est pour cela je peux travailler depuis la Hongrie. Mon entreprise est toujours en activité ». Celui-ci nous le dit et le répète cependant : il affirme n'avoir pas voulu fuir la France suite à cette affaire. « Il est dit "partout" que j'ai fui en Hongrie, ça me fait bien rigoler, j'ai simplement suivi une petite Hongroise, et le pays et la ville de Budapest sont tellement bien, que j'ai fini par y rester. Aussi avec mes revenus, je vis bien mieux ici où la pinte est généralement à 1 ou 2 euros... »

J'espérais avoir le statut d'hébergeur

GKS a été fermé en 2014. « Je me doutais qu’il y avait un problème, car mon compte PayPal passait son temps à se faire bloquer. Je me suis dit qu’à 27 ans, et alors que je recommençais ma vie en Hongrie, je devais arrêter les conneries ». Le site lui coutait alors 2 500 euros par mois, entièrement financé par les dons des internautes qui tombaient sur ce compte, au milieu des commandes commerciales de son entreprise. « De l’enrichissement personnel, il y a dû en avoir ». Combien ? « Peut-être 100 à 200 euros par mois, parfois j’ai aussi déboursé de ma poche » calcule-t-il, assurant avoir fermé le robinet de ces dons chaque fois que le plafond était atteint.

Avait-il cependant conscience de l’illégalité de son activité, en tout cas avant la fermeture de son compte PayPal ? « J’espérais avoir le statut d’hébergeur, c’est pour cela que je n’ai jamais caché mon identité. »

Le 9 juillet, malgré tout, sa mère est convoquée par la gendarmerie au Château-d’Oléron, vers La Rochelle. « Ils voulaient qu’elle me force à rentrer en France pour que je fasse une garde à vue ». Invitation à laquelle il n’assure ne pouvoir répondre : « Je n’ai pas spécialement les moyens de rentrer pour voir ma famille, je n’en ai pas davantage pour la gendarmerie ! »

Ensuite ? « Je leur ai bien proposé un Skype, mais les gendarmes m’ont un peu ri au nez. Ensuite, je n’ai plus eu de nouvelles ». Pas une seule convocation, rien ? « Ma mère s’occupe de la comptabilité de mon entreprise, elle n’a rien vu passer, elle est pourtant très assidue. Voilà pourquoi aussi je n’ai pas pris d’avocat pour ce jugement. Pourtant, l’ambassade de France disposait de mon adresse et de mon numéro de téléphone, même la police savait où j’habite. »

Une fois l’audience bien avancée, et alors que l’affaire remontait dans les médias, les choses se sont accélérées. « J’ai trouvé un avocat en urgence sur La Rochelle, qui a pris le dossier en main. Mais alors que la décision était en délibéré, il ne pouvait pas bosser sur mon cas. Je suis un peu ‘sur le cul’, je ne pensais pas qu’en France, on puisse être jugé ainsi ! ». Pour son site litigieux, celui qui se présente comme un geek, l’assure : « Je n'ai jamais été contacté par les SACEM & Co pour une demande de suppression d'un torrent. Une seule fois un cabinet d'avocat m'a contacté, me demandant la suppression d'un torrent, cela a été fait aussitôt. »

227 années pour rembourser

Après cette condamnation, envisage-t-il de faire appel ? « Je n’ai vraiment pas envie que cela dure des années. Cela fait un mois que je ne dors plus, j’ai perdu 10 kg. Je dois vivre avec 300 euros par mois, ce qui en Hongrie est très bien. De fait, je ne sais absolument pas quoi faire maintenant et pour la suite ». Concernant le montant de l’amende, « c'est tellement énorme, que 1 ou 2 millions ne font aucune différence pour moi... Mes revenus bruts en 2014 étaient de 8 800 euros et en 2013, 11 546 euros, sans compter le RSI, l’URSAFF et tout le reste. J’ai fait un petit calcul : en leur donnant tout le revenu brut de mon entreprise, il me faudrait 227 ans pour rembourser. »

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