Lors d’une conférence organisée à la Grande Halle de la Villette et intitulée « La musique rend-elle plus intelligente que les maths ? », la Sacem a poussé une nouvelle fois l’idée d’une réforme de la redevance pour copie privée. Son attention s’est spécialement portée sur l’affectation des sommes prélevées.
Hier, Laurent Petitgirard, président du Conseil d’administration de la Sacem, a proposé de dépoussiérer les règles d’affectation de la redevance pour copie privée. Pour mémoire, lorsque les sociétés de gestion collective prélèvent, comme en 2013, 240 millions d’euros au titre de cette ponction, elles ont la douce obligation de conserver 25 % des sommes.
Des affectations libres mais encadrées par la loi
Ces dizaines de millions d’euros ne doivent pas être stockées au chaud dans leur estomac, non, mais réinjectées dans plusieurs programmes d’actions culturelles. Les sociétés de perception et de répartition des droits sont alors « libres d’affecter le budget (…) selon les critères de leurs choix, à condition de respecter les finalités prévues par la loi » rappelait, à ce titre, le rapport Lescure.
Quelles sont ces finalités ? Cela vise en premier lieu la création, la diffusion du spectacle vivant ou des actions de formation des artistes (L321-9 du CPI). Le Code de la propriété intellectuelle prévient aussi que l’aide à la création s’entend également comme « des actions de défense, de promotion et d'information engagées dans l'intérêt des créateurs et de leurs œuvres », et donc notamment des actions anti-contrefaçon (R321-9 CPI).
Ces programmes de soutien sont alors décrits dans des rapports d’affectation annuels, remis chaque année au ministère de la Culture et à aux Commissions des affaires culturelles du Sénat et de l'Assemblée nationale. Ces mêmes documents sont parfois diffusés en ligne de manière éparse (voir notre dossier visant à éprouver la transparence de ce dispositif).
La proposition de la Sacem et celle du rapport Lescure
Cependant, Laurent Petitgirard aimerait ouvrir une nouvelle voie dans cette liberté d'affectation : celle du financement de l’éducation artistique, afin de soutenir ce secteur crucial pour la musique. Cette proposition n’est en réalité pas neuve puisqu’elle avait déjà été portée en des termes équivalents devant la mission Lescure en 2012. Là, la Sacem proposait « de compléter l’article L321-9 du Code de la propriété intellectuelle, issu de la loi de 1985 sur la copie privée, par un quatrième critère qui permette de mobiliser des ressources financées par le 25 % de la copie privée pour des actions d’intérêt général dans le domaine de l’éducation artistique à l'école et vers les jeunes publics ».
Pas récente, l’idée n’est peut-être pas pour autant mauvaise, mais elle n’avait pas été retenue par le rapport Lescure. Celui-ci estimait davantage nécessaire d’étendre l’action artistique et culturelle à la diffusion numérique des œuvres. Pourquoi ? « Cela permettrait par exemple aux SPRD (ou aux organismes d’intérêt général qu’elles financent) de soutenir le développement de plateformes innovantes ou la promotion en ligne d’une oeuvre, d’un artiste ou d’un catalogue, y compris à l’international ». Et pour cause, « cet élargissement serait cohérent avec la provenance des sommes en question, puisque la quasi-totalité des copies s’effectue aujourd’hui à partir de fichiers numériques ». Finalement, ni l'une ni l'autre de ces propositions n'ont prospéré au ministère de la Culture, qui a préféré le statu quo intégral.