La Quadrature du Net réclame l’annulation du décret sur le blocage sans juge

Zapper un CC, collecter X QPC
Droit 3 min
La Quadrature du Net réclame l’annulation du décret sur le blocage sans juge
Crédits : Rogdham, d’après des œuvres originales de Geoffrey Dorne et Jérémie Zimmermann (Licence Art Libre)

La publication du décret permettant de bloquer administrativement des sites, et donc sans intervention préalable d’un juge, va ouvrir les vannes de plusieurs actions devant le Conseil constitutionnel. C’est en tout cas l’un des vœux esquissés par la Quadrature du net.

Vendredi, le gouvernement a publié le décret instaurant le blocage administratif des sites Internet soit pédopornographiques, soit faisant l’apologie ou provocant au terrorisme (notre analyse). Ce texte, qui a déjà subi un avis plutôt critique de l’ARCEP, a été plus vertement condamné par la Quadrature du Net .

L’association dénonce en effet cette France qui persiste « dans le contournement du pouvoir judiciaire, trahissant la séparation des pouvoirs pour attenter à la première des libertés en démocratie qu'est la liberté d'expression ». Historiquement opposée à ces mesures de blocage administratif, elle rappelle aujourd’hui, comme le faisait d’ailleurs hier le PS, que « le blocage est inefficace, car facilement contournable. Il est aussi disproportionné, du fait du risque du surblocage de contenus parfaitement licites, d'ailleurs accru par la technique de blocage retenue par le gouvernement » (blocage par DNS). Par la voie de  Félix Tréguer, membre fondateur, La Quadrature du Net assure qu’« il faut désormais porter ce décret devant le Conseil d'État pour en obtenir l'annulation. »

Vers une pluie de recours

Cette petite phrase laisse entendre qu’une pluie de recours devrait s’abattre sur le décret en question. Contacté, Felix Tréguer nous rappelle que la Quadrature s’est engagée de longue date dans ce type d’actions, que ce soit pour épauler FDN dans son action contre l’un des décrets Hadopi ou via des amicus curiaes devant le Conseil constitutionnel, voire même la Cour européenne des droits de l’homme (contre le programme de surveillance Tempora du GCHQ anglais).

Ces « amicus curiaes » sont des tierces interventions à un litige en cours afin d’apporter un train d’arguments juridiques. Seulement, la Quadrature pourrait désormais changer de fusil d’épaule et opter pour un assaut direct, plutôt qu’en biais. Pour l’heure, si rien n’est formellement arrêté, ce porte-parole nous prévient par téléphone que LQDN « a justement fait attention à ses statuts afin de se doter de la capacité d’ester en justice ». L’initiative, qui s’appuie sur une équipe de juristes bénévoles, fait un autre constat qui ne peut que la satisfaire : il y a désormais « une structuration de la société civile pour être désormais davantage capable de développer des stratégies contentieuses. »

La mise à disposition par Reporters sans Frontières d’un argumentaire rédigé avec le cabinet d’avocats Vigo en est le témoignage récent. Ce document a été justement diffusé en vue d’une question prioritaire de constitutionnalité. Il vise une autre disposition de la loi de novembre 2014, spécialement l’article 5 qui a fait basculer dans le Code pénal l’apologie du terrorisme. Autrefois niché dans la loi sur la presse et la liberté d’expression de 1881, c’est ce changement d’univers qui a permis depuis les attentats sanglants contre Charlie Hebdo, de sanctionner bon nombre de propos fleuris sur Internet, avec parfois des mois de prison ferme contre leurs auteurs.

Quand le politique zappe le Conseil constitutionnel

Rappelons enfin que la loi contre le terrorisme pourrait subir aussi l’attaque des intermédiaires techniques du web. L’Association des sites Internet Communautaires (ASIC) qui réunit en son sein Google, Microsoft, et autre Dailymotion a déjà clairement fait savoir qu’une autre QPC viserait les décrets sur blocage des sites et leur déréférencement dans les moteurs. La cible du blocage est désormais en place depuis vendredi. Le projet de décret sur le déréférencement administratif vient lui, d’être notifié à Bruxelles. Sa publication au Journal officiel est attendue dans les semaines à venir.

Bref, 2015 devrait être une année contentieuse chargée pour le gouvernement. Et pour cause : celui-ci n’a pas jugé utile, pas plus que la majorité ou l’opposition parlementaire, de faire examiner par le Conseil constitutionnel des lois extrêmement sensibles pour les libertés. Il n’est donc guère étonnant de s’attendre à de telles réactions épidermiques contre leurs décrets d’application.

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