Les ébats de Hotline Miami 2 font débat en Australie

Cachez ce pixel que je ne saurais voir
Les ébats de Hotline Miami 2 font débat en Australie

Hotline Miami 2 n'est pas encore sorti qu'il se trouve déjà au cœur d'une polémique bien malgré lui, en raison du jugement rendu par l'autorité australienne de classification des jeux qui refuse qu'il soit vendu dans le pays. Motif : la scène d'introduction aurait choqué le jury, or selon l'éditeur du jeu, elle a surtout été très mal interprétée.

Avant d'entrer sur le marché, les jeux sont généralement soumis au jugement d'un organisme de classification, qui peut-être soit entièrement piloté par les industriels eux-mêmes, comme le PEGI, ou dépendre d'une autorité gouvernementale. Ce sont ces organismes qui déterminent si un jeu doit être déconseillé à telle ou telle tranche du public, et dans certains cas, ils ont la possibilité de faire interdire la vente d'un jeu dans leur juridiction.

Un peu d'histoire : Saints Row IV et la sonde anale

Le bureau australien de classification (ACB) a justement ce pouvoir, et en a déjà fait usage, l'exemple marquant le plus récent remonte à 2013. Saints Row IV avait alors fait les frais d'une interdiction à la vente à cause de l'utilisation d'une sonde anale en guise d'arme, ce qui aux yeux de l'organisme permettait la représentation d'« agressions sexuelles caractérisées ». L'ACB avait également précisé que le fait d'offrir la possibilité d'utiliser cette arme sur une victime totalement innocente, et sans que le contexte du jeu ne justifie de le faire, constituait un facteur aggravant. 

Saints Row IV

Pour contourner l'interdiction à la vente de Saints Row IV, le studio Voliton avait alors du proposer une version de son jeu spécifique au marché australien, dans laquelle l'arme fautive n'était pas disponible.

Le cas Hotline Miami 2

Un nouveau cas délicat s'est présenté à l'ACB au moment de rendre son jugement au sujet de Hotline Miami 2, un titre édité par Devolver Digital. Il s'agit d'un jeu de tir avec une vue de dessus, un aspect très pixellisé, où la violence, bien que dépeinte de manière assez abstraite et comique est omniprésente. Une fois de plus, ce n'est pas l'explosion de cervelles de trois pixels de côté qui a retenu l'attention de l'organisme de classification, mais un détail dans la scène d'introduction du jeu, que le jury décrit ainsi, dans le rapport que se sont procurés nos confrères de Kotaku Australia.

« Dans la séquence de jeu baptisée Midnight Animal, le personnage fait irruption dans ce qui semble être un studio de cinéma et tue explicitement 4 personnes, qui tombent au sol dans une copieuse mare de sang, souvent accompagnée d'éclaboussures. Après avoir écrasé la tête d'un cinquième personnage masculin, il frappe une femme portant des sous-vêtements rouges. Elle est inconsciente et au sol, tandis que nous la voyons allongée face au sol dans une copieuse mare de sang. Le personnage masculin est alors montré avec son pantalon à moitié baissé, exposant ses fesses. On le voit ensuite attraper la femme par les bras et s'allongeant sur elle, la violant implicitement (par derrière ou par voie anale) pendant qu'on voit ses jambes bouger montrant qu'elle se débat en dessous de lui. Cette représentation sous-entendant des violences sexuelles est renforcée par le fait qu'elle est affichée au milieu de l'écran, avec un fond rouge clignotant tandis que le reste de l'écran se noircit ». 

Présentée comme ceci, la scène semble être d'une rare violence. C'en est quoi qu'il en soit assez pour que l'ACB frappe le jeu de son tampon « Classification refusée », synonyme d'interdiction à la vente dans le pays. Une distinction rare qui n'est attribuée qu'aux jeux qui « dépeignent des sujets tels que le sexe, l'utilisation ou l'abus de drogues, le crime, la cruauté, la violence [...] de telle façon qu'ils vont à l'encontre des standards de moralité et de décence généralement acceptés par des adultes raisonnables ».

Un détail qui fâche

Seulement, un détail est sensé rendre la scène plus supportable, et l'ACB a semble-t-il oublié de le mentionner. Quelques secondes après la fin de la scène, le jeu montre le visage d'un metteur en scène qui crie « Coupez ! Très bien, c'est dans la boîte ! Bon travail les gars ». Toute cette scène n'est pas réelle dans le jeu, et notre héros n'est pas en train de violer la demoiselle au bikini rouge, il fait semblant devant la caméra. Nous ne sommes pas en face de la représentation d'une violence sexuelle, mais de la dépiction d'une dépiction de violence sexuelle, ce qui est un brin différent.

Hotline Miami 2

Depuis, l'organisme est également passé outre un deuxième point, mis en avant par Devolver dans une vidéo suite à l'annonce. Avant le lancement du jeu, un menu précise au joueur que « ce jeu contient des scènes faisant allusion à des violences sexuelles », tout en lui proposant de passer automatiquement ces scènes. C'est donc la personne devant son écran qui choisit ou non s'il souhaite voir de tels passages. Ces deux éléments auraient potentiellement pu adoucir quelque peu le constat rendu par l'organisme de classification, mais il n'en est rien. 

Cela étant, le passif lié à cette scène a pu également jouer en la défaveur du titre. En septembre 2013, Devolver avait publié une démo jouable de Hotline Miami 2, dans laquelle se trouvait la fameuse scène, et déjà à l'époque, quelques dents avaient grincé. Dennis Wedin, un des développeurs du jeu avait alors dû apporter quelques explications publiquement, notamment chez nos confrères de Rock, Paper, Shotgun. Malgré cela, l'éditeur et le studio ont maintenu leur position et aucune modification n'a été apportée à ce passage du jeu.

Devolver se dit déçu par la décision de l'ACB, les australiens sont encouragés à pirater le jeu

Au lendemain de la décision prise par l'ACB, Devolver et Dennaton Games ont réagi sur leur blog, et ne mâchent pas vraiment leurs mots concernant le verdict rendu par l'organisme de classification. « Nous sommes préoccupés et déçus par le fait qu'un organisme de professionnels chargés d'évaluer et de juger les jeux de manière juste et honnête puisse déformer d'une telle manière des faits, pour sortir un rapport qui décrit des actions qui ne sont tout simplement pas présentes dans la séquence en question et dépeint de manière incorrecte ce qui leur a été présenté ». Malgré ce désaccord manifeste, l'éditeur et le studio ne comptent pas aller à l'encontre de la décision prise par l'autorité.

Cette décision n'a d'ailleurs pas manqué de faire réagir quelques joueurs au pays des kangourous, l'un d'entre eux allant même jusqu'à contacter l'un des co-créateurs de la franchise, Jonatan Söderström, afin de lui demander comment il pouvait se procurer le jeu malgré l'interdiction. La réponse de l'intéressé est sans appel : « Si le jeu devait ne pas être lancé en Australie, piratez-le après sa sortie. Pas besoin de nous envoyer d'argent, profitez seulement du jeu ». L'e-mail en question a dans un premier temps été publié chez Oxcgn, avant d'être authentifié par un des employés de Devolver.

En Europe, la classification des jeux se passe autrement

Sur le marché européen, la situation est différente puisque la classification des jeux n'est pas assurée par des organismes gouvernementaux, mais par une structure fondée par les acteurs de l'industrie : le PEGI (Pan European Game Information). 

Son principe est simple : un formulaire a été mis au point par les studios et les éditeurs avec le concours de diverses instances gouvernementales, et les éditeurs n'ont qu'à le remplir. Celui-ci passe en revue 50 critères tels que la présence de « sous-entendus à caractère sexuel » ou de « dépictions de violence brute tels que des scènes de torture ou de démembrement ». Si le jeu répond favorablement à l'un de ces critères, il se voit normalement attribuer le pictogramme correspondant. 

En théorie, le PEGI peut procéder à une vérification de la véracité des informations données par le formulaire en jouant au jeu, mais il peut également simplement se contenter des déclarations de l'éditeur. L'organisme ne se substitue par contre pas aux autorités nationales qui peuvent, si leur législation le prévoit, interdire la mise en vente d'un jeu.

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