Enquêtes sur une page Facebook arborant des photos de prisonniers

Les ondes du pénitencier
Droit 4 min
Enquêtes sur une page Facebook arborant des photos de prisonniers
Crédits : Anatoliy Babiy/iStock Editorial/Thinkstock

Deux enquêtes, une administrative, l’autre judiciaire, viennent d’être ouvertes sur demande de l’administration pénitentiaire. Celle-ci s’est aperçue qu’une page Facebook servait à diffuser des images prises par des prisonniers détenus aux Baumettes, à Marseille.

L’affaire fait grand bruit depuis hier, suscitant l’embarras des responsables de l’administration pénitentiaire. Et pour cause, La Provence a révélé qu’une page Facebook avait permis de diffuser durant le mois dernier de nombreuses photos et vidéos de prisonniers dans des postures pour le moins inattendues... « Au fil de la page, on découvrait une bonne dizaine de détenus se mettant en scène dans leurs cellules, fumant la chicha, faisant la popote, exhibant du shit et des liasses de billets – interdits en détention puisque chaque détenu possède un compte pour "cantiner" –, des selfies au beau milieu des coursives étaient également proposés ainsi que des clichés genre boy's band énervé dans la cour de promenade » expliquent nos confrères.

Six détenus identifiés, deux enquêtes ouvertes

Intitulée « MDR o baumettes », cette page aurait compté jusqu’à 4 800 « J’aime ». Mais elle a aujourd’hui disparu. « On a tout de suite pris des dispositions après la découverte de cette page Facebook en ouvrant une enquête administrative et en saisissant le procureur de Marseille » a expliqué Philippe Perron, directeur interrégional de l'Administration pénitentiaire, auprès de France 3 PACA. Selon lui, elle était administrée depuis l'extérieur, grâce à des images transmises depuis la prison. Son auteur aurait fermé cette page dès que « ça a commencé à se savoir ». Il n’a cependant pas encore été retrouvé.

Quant aux détenus dont on pouvait voir les visages sur les photos, six d’entre eux ont été identifiés. Cinq cellules ont également été fouillées, les gardiens ayant retrouvé à cette occasion trois téléphones portables, une lime à bois et une clé USB.

baumettes prison facebook
Crédits : Capture réalisée par La Provence

Si les deux enquêtes doivent encore poursuivre leurs cours, en vue d’éventuelles sanctions disciplinaires ou pénales, les réactions n’ont pas tardé. « Quand la direction a découvert cette page, elle nous a tout de suite demandé ce que faisaient les agents pour ne pas avoir vu ce cinéma ! Mais le problème c'est que nous ne sommes plus assez nombreux, nous le répétons depuis des années. Ils n'ont plus peur de rien, et nous, nous n'avons pas les moyens de lutter » a ainsi déploré David Cucchietti, le secrétaire local de la CGT, majoritaire aux Baumettes, auprès de La Provence.

Le député-maire de Nice, Christian Estrosi (UMP) a de son côté dénoncé un « véritable scandale ». « Quand on voit que la contrôleuse générale [des prisons], ayant pris ses fonctions sous Taubira, est favorable au téléphone portable en prison, on peut se demander où l’on va en matière de sécurité et de laxisme... Cette affaire prouve que cette utilisation par les détenus occasionne une grande difficulté pour le contrôle des surveillants ! » a-t-il déclaré sur sa page Facebook.

La question des brouilleurs à nouveau sur la table ?

En mars 2013, la mise en ligne sur YouTube d’une vidéo mettant en scène plusieurs détenus, armés de couteaux, avait conduit un député à réclamer auprès du gouvernement l'installation de « brouilleurs d'ondes efficaces », et ce afin de limiter l'introduction de téléphones portables dans les établissements pénitentiaires. La Garde des Sceaux n’a toujours pas répondu à cette requête, mais a eu le temps d’affirmer entre temps qu’une expérimentation de brouillage avait été menée en 2010. Sauf que « les résultats, peu concluants, ont conforté l'administration pénitentiaire dans sa démarche en sollicitant l'éclairage de services experts, chargés de proposer des solutions de brouillage/interception optimisées, compatibles avec les exigences de sécurité pénitentiaire et pouvant s'adapter aux nouvelles technologies ». En clair, l’idée est séduisante, mais aucun projet n’est officiellement lancé faute d'arriver à une solution pleinement efficace.

En attendant, rappelons que le Contrôleur général des prisons plaide depuis plusieurs années pour que certains détenus puissent avoir accès à un téléphone portable (voire à Internet), et ce dans des conditions précisément délimitées. Dans son dernier rapport, il était expliqué que les mobiles détenus frauduleusement avaient « pour principale utilisation les contacts avec la famille et les amis et non l’objectif de préparation de projets d’évasion ou de continuité d’actes de délinquance ». L’idée était donc d’autoriser les personnes détenues en centres de semi-libertés (ces établissements dans lesquels les prisonniers reviennent par exemple après une journée de travail à l’extérieur) à appeler seulement certains numéros, et d’exclure du dispositif les smartphones ou téléphones trop élaborés – ceux avec appareil photo notamment.

Cette affaire ne semble d’ailleurs pas isolée, Nice-Matin rapportant que des images similaires sont partagées sur Facebook par des détenus de la maison d'arrêt de Nice.

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