Le CSA plaide pour un rapprochement avec l’ARCEP, non avec l'Hadopi

Contenants vs contenus

Alors que les propositions gouvernementales s’agissant d’un rapprochement entre le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) et l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP) sont attendues pour fin novembre, le CSA vient de publier une contribution, dans laquelle l’institution explique pourquoi et comment le gouvernement devrait rapprocher les deux autorités. 

 

À la mi-août, le Premier ministre mettait sur les rails la fusion entre le CSA et l’ARCEP. Jean-Marc Ayrault demandait ainsi à trois de ses ministres (Aurélie Filippetti pour la Culture, Fleur Pellerin pour l’Économie numérique et Arnaud Montebourg pour le Redressement productif) de lui soumettre d’ici fin novembre des propositions d’évolutions législatives et réglementaires de rapprochement entre ces deux autorités, chargées de réguler respectivement l’audiovisuel et les télécoms. Un objectif selon le chef du gouvernement : « assurer la cohérence et l’efficacité de la régulation ».

 

Mais alors qu’aucun des ministres concernés n’a encore dévoilé officiellement ses propositions, le CSA vient de publier une « contribution à la réflexion sur l’évolution de la régulation de l’audiovisuel et des communications électroniques » (PDF). Ce document, qui fait suite à une quarantaine d’auditions, a été transmis hier aux ministres concernés ainsi qu’au chef du gouvernement. L’institution explique également qu’elle s’est intéressée à d’autres exemples étrangers avant de rendre ces conclusions.  

Convergence entre audiovisuel et communications électroniques 

Que décrit le CSA dans cette contribution ? Ce qu’il a déjà eu l’occasion d’expliquer à maintes reprises : que les contenus restent les mêmes (émissions TV, films, séries, etc), mais que les contenants, eux, évoluent (télévision, ordinateurs reliés à Internet, smartphones, TV connectée,...). Or, cela pose de nombreuses difficultés aux régulateurs, et plus particulièrement au CSA. « Ces évolutions posent (...) des problèmes techniques, juridiques et économiques fondamentaux, explique l’institution, qu’il s’agisse de la dispersion des audiences, de la coexistence de contenus régulés et non régulés sur un même écran, de la possibilité pour les studios américains de proposer leurs films ou leurs fictions directement sur internet sans passer par les chaînes nationales, ou encore l’irruption de nouveaux concurrents puissants ».

 

À partir de là, l’autorité envisage deux hypothèses :

  • Rapprocher progressivement le CSA et l’ARCEP, en deux étapes

Dans un premier temps, CSA et ARCEP seraient maintenus, mais une instance paritaire de régulation rassemblant un certain nombre de membres appartenant à chacune des institutions serait créée. Celle-ci serait dotée d’un pouvoir décisionnel, et pourrait être « appelée à statuer sur des sujets d’intérêt commun, comme la gestion du spectre, la régulation économique et la régulation des services en ligne, qui pourraient être définis par la loi ».

 

À cette phase transitoire succèderait un second temps, qui se traduirait par l’instauration d’une autorité unique. «Celle-ci serait composée de deux collèges, présidés par une même personne, l’un pour les contenus et le pluralisme, l’autre pour les infrastructures et les réseaux. Chaque collège pourrait associer, à titre consultatif, un ou plusieurs membres appartenant à l’autre. Les deux collèges pourraient siéger en formation commune sur les sujets qu’ils détermineraient. Les services seraient fusionnés et regroupés sur un même site », explique le CSA. L’institution ne se prononce pas sur un éventuel calendrier de mise en place de ces deux étapes, et en laisse même le choix au législateur.

  • Créer directement une institution unique

Autre solution, bien plus radicale, rapprocher en une seule fois le CSA et l’ARCEP, et doter la nouvelle institution unique d’un collège, lui aussi unique. Le régulateur de l’audiovisuel note cependant que cette option « suscite des oppositions et peut paraître prématurée. Le risque de voir les logiques économiques et concurrentielles l’emporter sur les aspects culturels et sociétaux est souvent évoqué ».

 

Quelle que soit l’option retenue, les avantages sont les mêmes pour l’institution. Un rapprochement progressif ou radical améliorerait notamment selon le CSA « l’optimisation de la gestion opérationnelle des fréquences » ainsi que « la diffusion des contenus sur les réseaux de données, fixes et mobiles ». Il permettrait également d’éviter « les risques d’interférence entre des principes de régulation différents » et de garantir « la prise en compte du financement de la création audiovisuelle et cinématographique dans la mise en œuvre du principe de neutralité des réseaux ».

Les mises en garde de La Quadrature du Net 

Tout le monde ne voit néanmoins pas ce rapprochement d’un bon œil. La Quadrature du Net a par exemple pointé les risques d’une fusion entre le CSA et l’ARCEP. « Le principal danger est que l’on applique les modèles de régulation qui sont ceux du CSA à Internet », s’alarmait Jérémie Zimmermann, porte-parole de l’association, cet été. « Tenter d’imposer le même type de règles à la multitude d’acteurs, commerciaux et non-commerciaux, qui constituent le réseau décentralisé qu’est Internet (...) est une aberration. Internet c’est aussi la diffusion de vidéos, mais c’est avant tout la mise en œuvre de nos libertés fondamentales, le partage de la connaissance et de la culture, la participation démocratique, etc ».

 

L’intéressé redoutait aussi que la fusion du CSA et de l’ARCEP n’amène les intérêts du CSA (dont les membres « sont notoirement proches des chaines de télé, donc des grands groupes du divertissement qui prônent la mise en œuvre d’un droit d’auteur toujours plus répressif et, à ce titre, souhaiteraient qu’Internet soit mis sous contrôle (Hadopi, SOPA, ACTA, etc.) ») au cœur de la régulation des communications.

Petit clin d’œil à Hadopi

Dans la contribution du CSA, il est également question d’Hadopi, probablement en ce qu’une fusion entre CSA, ARCEP et Hadopi fut parfois évoquée, par exemple dans un rapport parlementaire de 2010. Même s’il se refuse de considérer cette piste en attendant la fin des travaux de la mission Lescure (prévue pour mars 2013), le CSA note que « mis à part un souci partagé de développer l’offre légale, les sujets d’intérêt commun entre l’HADOPI et le CSA sont quasiment inexistants ». Cette absence de lien démontré laisse ainsi penser que le CSA ne recommandera pas de rapprochement avec la Rue du Texel.

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