L'ARCEP vient de publier un communiqué de presse afin de réitérer « ses mises en garde quant à l’exploitation à des fins commerciales des premiers résultats de la version-test de son nouvel observatoire sur la qualité des services fixe d’accès à internet ». Bouygues Telecom est évidemment le premier visé, même si le FAI n'est pas directement nommé.
Le 25 novembre dernier, l'ARCEP publiait son premier observatoire de la qualité du service fixe d’accès à l’Internet, mais il s'agissait alors d'une « version-test », clairement présentée comme telle. Celle-ci oppose Bouygues Telecom, Free, Numericable, Orange et SFR sur différents critères comme les débits, la navigation, la lecture de vidéo en streaming ainsi que le téléchargement en P2P.
Bouygues communique, Free grogne, l'ARCEP se réveille
Bouygues Telecom ressortait alors vainqueur de ce premier bilan, tandis que Free fermait la marche. Comme nous l'avons alors détaillé, Bouygues Telecom en profitait pour publier dès le lendemain un communiqué de presse où il indiquait être « 1er ou 1er ex-aequo sur 15 des 16 critères d’usage ADSL ». Une pratique courante dans le mobile où de tels observatoires sont monnaie courante, mais ici, cela était fait sans préciser la nature bêta de cette première publication, ce qui avait notamment provoqué la colère de Free qui a mis en demeure Bouygues Telecom ainsi que l'ARCEP.
Si dans un premier temps, le régulateur était assez peu prolixe sur le sujet lorsque nous l'interrogions, près de deux semaines plus tard, il s'est finalement décidé à sortir du bois en publiant un communiqué de presse officiel dans lequel il « réitère ses mises en garde quant à l’exploitation à des fins commerciales des premiers résultats de la version-test de son nouvel observatoire sur la qualité des services fixe d’accès à internet ». Il ajoute que « toute interprétation des données publiées dans ce premier rapport de synthèse doit être faite avec la plus grande prudence » et que « ces premiers résultats ne permettent pas, en particulier, de comparer globalement la qualité de service des fournisseurs d'accès à internet ».
Notez qu'il s'agit certainement d'un moyen pour l'ARCEP de se dédouaner suite à la mise en demeure de Free, en précisant au passage à Reuters que cette étude « n'a pas été conçue pour être exploitée commercialement par les opérateurs ».
Bouygues Telecom est en ligne de mire, mais s'en moque... et dégaine une publicité
Sans y être nommé précisément, Bouygues Telecom et sa communication sont donc directement visés par cette publication. Mais ni la mise en demeure de Free ni ce communiqué n'ont changé quoi que ce soit, Bouygues n'ayant pas réagi de son côté depuis alors que son communiqué de presse qui n'indique toujours, via une petite étoile, que « pour plus de détails, voir rapport et précisions méthodologiques sur arcep.fr », sans lien vers le site de l'ARCEP.
Au contraire, d'après nos constatations, le FAI est passé à la vitesse supérieure en diffusant une campagne de publicité, notamment dans certains journaux gratuits comme celui de 20 minutes par exemple (voir page 35) :
Là encore, s'il est clairement indiqué que Bouygues Telecom est « n°1 en qualité d'accès à internet », on ne retrouve toujours aucune mention de la nature de ce premier bilan de l'ARCEP et du fait qu'il n'est qu'une phase de test. Seule mention, en petit en bas de page : « Rapport Nov 2014 et précisions méthodologiques sur arcep.fr ». Autant dire qu'il n'y a que très peu de chance qu'un lecteur du journal fasse la démarche d'aller sur le site de l'ARCEP afin d'obtenir des détails et de savoir de quoi il en retourne, d'autant plus que la publicité ne laisse planer aucun doute quant à l'« interprétation des données publiées ».
Il sera maintenant intéressant de voir si l'ARCEP usera de ses pouvoirs afin de pousser Bouygues Telecom à revoir sa position sur ce point où bien si le régulateur en restera là, la procédure de Free étant toujours en cours. Reste qu'à moins d'un mois de Noël, le gendarme des télécoms devait bien se douter que les résultats de ses travaux seraient exploités de la sorte alors que la concurrence se fait plus forte sur le marché du fixe, en amont de l'annonce de nouvelles box et de nouvelles offres.
Il lui faudra donc choisir entre siffler la fin de la partie dès maintenant en montrant ses muscles, ou laisser faire, au risque de voir chacun exploiter ses capacités de communication et les pires arguments dans les mois à venir pour attirer de nouveaux clients.