François Hollande a affiché hier ses ambitions en matière de participation des citoyens à la vie publique, en parlant notamment d’Open Data et de la concertation menée par le CNNum à propos du futur projet de loi numérique. Le locataire de l’Élysée s’est cependant un peu emmêlé les pinceaux à certains moments...
À l’occasion de la semaine du Web social et solidaire, le président de la République recevait hier à l’Élysée de nombreux représentants d’associations, dont certaines proposent des services innovants grâce à Internet. Le chef de l’État a ainsi prononcé un discours marquant un soutien appuyé à l’égard de ces initiatives qui promeuvent de nouvelles formes de participation. « Le déploiement du numérique redonne aux citoyens un pouvoir (...). C’est en partant de ce « nouveau pouvoir » que l’on peut, non pas changer le pouvoir, mais changer les moyens d’exercice du pouvoir ».
Face au potentiel « considérable » des nouvelles technologies, François Hollande a affirmé qu’il souhaitait « mettre cette capacité au service de l’engagement ». Le président rêve en effet de « ces millions de citoyens qui se rassemblent à travers le numérique pour créer de nouvelles solidarités ». Selon lui, « c’est ça l’enjeu : faire comprendre que chacun peut, à travers le digital, faire ce qu’il n’avait jamais pu imaginer faire seul. L’avantage du digital, c’est qu’on met le monde avec soi ».
Agendas désynchronisés à propos du projet de loi numérique
Mais derrière ces belles paroles, le président est resté vague sur l’action de son gouvernement en la matière. Il a bien évoqué la concertation menée par le Conseil national du numérique en vue de l’élaboration du projet de loi numérique d’Axelle Lemaire, tout en semblant bien mal informé... Voilà ce qu’a déclaré le chef de l’État :
« Nous ferons une grande consultation aussi sur la préparation de la loi numérique avec une formule « Contribuer ». Ce serait paradoxal que de préparer une loi numérique, simplement entre experts, entre administrations ! La loi numérique doit être préparée par la communauté numérique. Elle sera donc appelée à largement contribuer. »
Problème : la fameuse concertation a d’ores et déjà débuté, depuis le 4 octobre ! Elle est même proche de sa fin, puisque trois des quatre thèmes ouverts à la consultation seront clos à la fin du mois, et le dernier à la mi-janvier...
Hollande veut finalement « relancer l’Open Data »
Autre sujet évoqué par François Hollande, toujours en lien avec la participation des citoyens, l’ouverture des données publiques. « Nous allons relancer l’Open Data » a étrangement déclaré le président, laissant entendre qu’il y aurait donc eu une période de mou... L'utilisation de ce terme est d'autant plus surprenante que les éléments de langage habituels tournaient jusqu'ici autour de l'accélération du mouvement d'Open Data.
Le chef de l’État a quoi qu’il en soit tenu des propos encourageants sur ce dossier, tout en restant extrêmement vague :
« Grâce à l’ouverture des données, nous allons faire progresser la santé et la protection de l’environnement (...). Nous voulons donc que ces données, qui viennent à travers de multiples canaux, puissent être diffusées partout. Ce trésor n’est pas la propriété de l’État, c’est un bien commun de la nation. Nous devons le mettre pleinement à disposition. Voilà pourquoi la plateforme data.gouv.fr sera ouverte à toutes les contributions. Tout le monde pourra y apporter ses propres données : les citoyens, la presse, les associations, les chercheurs, les entrepreneurs. »
À nouveau, François Hollande semble avoir été mal informé, puisque n’importe quelle personne, entreprise ou association, peut partager des données sur data.gouv.fr, et ce depuis la refonte du portail national d’Open Data, en décembre 2013. C’était d’ailleurs l’une des principales nouveautés de ce site, particulièrement mise en avant à l’époque (voir notre article).
Le président a poursuivi en faisant référence au partenariat majeur scellé il y a quelques semaines entre l’État, le groupe La Poste et l’association Open Street Map France. Comme nous l’avons expliqué, il s’agit de mettre sur pied, à partir de l’année prochaine, une base d’adresses nationale qui sera proposée en Open Data, et qui contiendra notamment des informations de géolocalisation. « Nous avons un important accord entre l’Institut géographique national, La Poste, l’Administrateur général des données et la communauté de cartographie pour faire « openstreetmap », pour pouvoir donner partout la meilleure information, y compris pour les soins » a maladroitement déclaré François Hollande, probablement perdu au milieu du nom de toutes initiatives qui lui furent présentées hier... La future base d’adresses collaborative s’appellera en effet BAN, pour « base adresse nationale ».
Un effort de transparence promis sur le TTIP et CETA
La seule véritable annonce de ce discours réside en fait dans un geste en matière de transparence sur les négociations commerciales de la France avec d’autres pays. Un ensemble de documents relatifs au Partenariat transatlantique de commerce et d’investissement (appelé TTIP ou TAFTA) entre l’Union européenne et les États-Unis ainsi qu’à l’Accord économique et commercial global (CETA en anglais) entre l’UE et le Canada, a ainsi été diffusé dès hier soir sur data.gouv.fr.
On y retrouve notamment le mandat de négociation confié à l’UE dans le cadre des négociations sur le TTIP, un compte-rendu des discussions, quelques questions/réponses, etc. « Ce corpus, qui s’enrichira au fur et à mesure de la progression des négociations, met en pratique les principes de gouvernement ouvert que se donne la France » souligne à cet égard la mission Etalab, sur son blog.