Les députés prolongent le crédit d’impôt à destination des producteurs de disques

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Droit 4 min
Les députés prolongent le crédit d’impôt à destination des producteurs de disques
Crédits : Xavier Berne

L’Assemblée nationale a prolongé hier de trois ans le crédit d’impôt dont profitent depuis presque dix ans les producteurs de musique, telle que l’avait proposée le gouvernement afin de venir en aide à la filière. Certains députés ont pourtant tenté de faire disparaître ce dispositif, arguant que celui-ci s’apparente à une niche fiscale inefficace.

Depuis 2006, les producteurs de disques qui investissent dans la production, le développement ou la numérisation d'albums studio ou live peuvent prétendre au « crédit d’impôt en faveur de la production phonographique ». Si elles respectent certaines conditions, telles que produire des « nouveaux talents » (avec moins de 100 000 ventes pour deux albums précédents), les majors peuvent se faire rembourser 20 % du montant total de leurs dépenses éligibles – voire 30 % pour les petites et moyennes entreprises – et ce dans la limite de 800 000 euros par an et par bénéficiaire.

Un dispositif prolongé jusqu’en 2018, outre un assouplissement

Censé expirer au 31 décembre 2015, ce crédit d’impôt vient toutefois d’être prolongé de trois ans par les députés, qui ont voté hier soir l’article 23 du projet de loi de finances rectificative pour 2014. Compte tenu du « contexte de crise » frappant actuellement la filière musicale et plus particulièrement de cette « période de transition numérique », le gouvernement avait effectivement souhaité une application du dispositif jusqu’au 31 décembre 2018, outre divers assouplissements.

 

Il était ainsi proposé d’augmenter considérablement l’enveloppe maximale allouée à chaque maison de disque. De 800 000 euros par an, l’exécutif envisage un relèvement à 1,1 million d’euros. Par contre, chaque bénéficiaire ne devrait pouvoir obtenir davantage que 15 % du montant total des dépenses engagées (contre 20 % jusqu’ici), sauf s’il s’agit d’une petite ou moyenne entreprise, auquel cas ce taux reste à 30 %.

 

Autre évolution : alors qu’il faut aujourd’hui que l’entreprise bénéficiaire existe depuis au moins trois ans pour être éligible, un an pourrait désormais suffire. C'est très exactement ce qu'avait souhaité le député Franck Riester (UMP) dans un précédent amendement, rejeté en 2010.

Une efficacité grandement remise en question

Cet article a cependant fait l’objet de vives critiques de la part de certains députés. L’UMP Gilles Carrez, rejoint par le centriste Charles de Courson, a ainsi soutenu un amendement visant à la suppression pure et simple de ce crédit d’impôt. Le motif ? Celui-ci serait tout simplement inefficace, pour un coût loin d’être négligeable : 11 millions par an jusqu’ici, puis 13 millions à partir de 2016 (du fait des assouplissements prévus).

 

S’appuyant sur un rapport remis à Bercy l’année dernière (PDF), Gilles Carrez a ainsi repris les résultats d’une évaluation menée par l’administration. « Le dispositif ne produit pas les effets escomptés » était-il ainsi expliqué, dans la mesure où « depuis 2003, le nombre de nouveaux talents « engagés » par les maisons de disques françaises a baissé de 47 % ». On peut encore y lire : « Le dispositif n’atteint pas ses objectifs et ne paraît donc pas nécessaire ».

 

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Extrait du rapport de la députée Valérie Rabault.

 

L’élu de l’opposition, par ailleurs président de la commission des finances, s’en est donc donné à cœur joie dans l’hémicycle, réclamant la fin de cette « niche fiscale » auprès de la majorité socialiste. « On nous propose en particulier d'augmenter le plafond de dépenses de 800 000 à 1,1 million d'euros. Mais qui est-ce qui va en profiter ? Ce sont les trois majors ! Elles sont actuellement à 800 000, elles vont passer évidemment à 1,1 million. À trois, ça fait 900 000 euros. C'est automatique ! Et on nous dit dans la présentation du gouvernement que l'augmentation du plafond serait de 2 millions d'euros. Donc la moitié va être empochée par les trois majors... » s'est-il écrié.

13 millions d'euros par an pour cette « niche fiscale »

Quelques minutes plus tôt, le député socialiste Pierre-Alain Muet avait pourtant pris la parole pour défendre ce crédit d’impôt, dont le coût représente selon lui « une goutte d'eau dans l'océan de nos déficits ». « Cet article est important puisqu'il soutient la production phonographique pour un coût très modeste, a-t-il déclaré. Le crédit d'impôt représente 11 millions, il passera à 13 après cette mesure. Il soutient les petits labels francophones, puisqu'il soutient essentiellement les PME. »

 

Sans grande surprise, l'amendement de suppression de Gilles Carrez a été rejeté, après avoir fait l’objet d’un avis défavorable de la part du gouvernement, de la même manière que celui de Charles de Courson. La seule concession de la majorité fut d’exclure des dépenses éligibles au titre du crédit d’impôt la « rémunération, incluant les charges sociales, du ou des dirigeants correspondant à leur participation directe aux répétitions » pour les majors. Seules les PME et TPE pourront donc s’en faire rembourser une partie. Cet amendement, déposé par la rapporteure socialiste Valérie Rabault, visait à « éviter les effets d’aubaine ».

 

Dès ce matin, l’UPFI (Union des producteurs phonographiques français indépendants) a publié un communiqué pour faire part de sa « très grande satisfaction » suite à l'adoption de cet article du projet de loi de finances rectificative. « C'est avec confiance que l'UPFI attend maintenant le vote de ces mesures au Sénat et leur adoption définitive par le Parlement » poursuit l’organisation. Mais rappelons que si elle était définitivement approuvée, cette mesure devra également être validée par la Commission européenne, qui se penchera en particulier sur sa conformité avec la législation européenne en matière d’aides d'État.

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