Depuis plusieurs années, la question du passage à l'IPv6 revient régulièrement sur le devant de la scène, notamment à cause de la pénurie d'IPv4. Interpellé sur le sujet par Corinne Erhel, le Gouvernement évoque la lente adoption de cette technologie, mais sans pour autant annoncer de mesure concrète.
La fin de l'IPv4 et la (trop) tranquille adoption de l'IPv6 en France
Ce n'est un secret pour personne, la question de la pénurie d'adresses IPv4 est un problème. Une solution de remplacement existe depuis longtemps avec l'IPv6, mais elle n'est pour autant pas massivement adoptée à travers le monde. La France ne fait pas exception à la règle.
Pour s'en rendre compte, il suffit de se rendre sur ce graphique montrant le pourcentage d'utilisateurs qui accèdent à Google en IPv6. Dans l'hexagone, il est ainsi question de 5,41 % seulement, contre une moyenne mondiale d'un peu moins de 5 %. Mais certains de nos voisins font bien mieux, comme la Belgique avec 28,6 % et l'Allemagne avec 11,91 %. À titre de comparaison, les États-Unis sont actuellement à 11,85 %.
Notez que Benoît Tabaka, directeur des politiques publiques de Google France, a dégoté un outil plutôt pratique qui permet de comparer, sur un même graphique, l'adoption de l'IPv6 de plusieurs pays. On peut ainsi remarquer que si l'Allemagne et les États-Unis sont en bonne progression depuis 2013 (courbe orange et rouge), la France stagne depuis des années (courbe bleue), perdant ainsi l'avance qu'elle avait précédemment :

Après un projet de loi sur une voie de garage, une réponse sans plus de conviction
En juillet dernier, une proposition de loi avait été déposée par une vingtaine de députés afin de tenter d'imposer l'IPv6 à tous les appareils connectés, et ce, dès le 30 juin 2015. Depuis, rien n'a bougé dans la pratique et le texte est toujours dans un des tiroirs de l'Assemblée nationale... pour une durée indéfinie.
Mais le sujet est récemment revenu sur le devant de la scène, notamment via une réponse du ministère en charge du numérique à une question écrite de Corinne Erhel, membre de la commission des affaires économiques. Cette dernière demandait en effet « dans quelle mesure l'État pourrait ouvrir la voie à une adoption plus rapide de cette nouvelle norme [NDLR : l'IPv6] nécessaire au développement de ces filières en encourageant les constructeurs ainsi que les revendeurs-distributeurs à rendre compatibles les terminaux connectés tout en incitant à ce que les services en ligne soient eux aussi joignables en v6. »
Dans sa réponse, le gouvernement reconnait que « la disponibilité très limitée en adresses IPv4 au niveau européen est une réalité depuis deux ans ». Il ajoute que « les acteurs économiques ayant décidé de déployer le protocole IPv6 ont pu se fournir auprès des grands équipementiers qui proposent déjà une large gamme compatible en IPv6. Ces mêmes équipementiers font d'ailleurs la promotion du déploiement IPv6 depuis plusieurs années [...] Selon Google, en septembre 2014, 5,6 % de ses utilisateurs en France accèdent au moteur de recherche au travers d'une adresse IPV6, contre environ 4 % dans le monde et la France continue à être l'un des leaders mondiaux en termes d'adoption de l'IPV6 dont le déploiement devrait, d'après les spécialistes, fortement s'accélérer au cours des prochains mois (nouveaux équipements de réseau, nouveaux terminaux...) ». Mais, comme nous avons pu le voir un peu plus haut, on est désormais assez loin d'être l'un des leaders mondiaux en la matière, et, pire encore, le taux d'adoption affiché par Google n'est pas vraiment dans une phase de croissance.
Le gouvernement se contente ensuite de rappeler que, « afin de mobiliser les administrations aux enjeux liés à la transition IPv4/Pv6, une circulaire interministérielle du 8 décembre 2011 a été diffusée demandant aux administrations d'intégrer la norme IPv6 dans leurs marchés publics d'achats de biens et de services faisant appel au protocole IP. Il a été également exigé que les services d'information de l'administration à destination du public soient accessibles en IPv4 et IPv6 ». Rien de plus concret, donc, pour le moment.
IPv6 : Free et SFR sont toujours les seuls parmi les gros FAI
Quoi qu'il en soit, l'adoption de l'IPv6 en France passe aussi par une disponibilité de cette technologie chez les fournisseurs d'accès à internet. Or, comme le rappelle l'ARCEP dans son récent et controversé observatoire de la qualité de service fixe (voir cette actualité), « seuls Free et SFR offrent une connectivité IPv6 à leurs clients grands publics parmi les 5 opérateurs testés ». Parmi les autres, on retrouve de l'IPv6 chez OVH et Nerim par exemple. Bouygues Telecom, Orange et Numericable étant encore limité à de l'IPv4. Espérons que les choses bougeront rapidement, notamment avec l'arrivée des nouvelles générations de box.