Les industries culturelles claironnent leur apport dans l’économie européenne

Donc subventions = aides d’État ?
Droit 4 min
Les industries culturelles claironnent leur apport dans l’économie européenne
Crédits : Images Money (CC BY 2.0)

Demain, 2 décembre, le Groupement européen des sociétés d'auteurs et de compositeurs (GESAC) révèlera le contenu d’une étude jaugeant le poids des industries culturelles sur les autres industries européennes. L'an dernier, des travaux similaires avaient déjà été menés en France, à la demande de la SACEM. Ils avaient fait l’objet de lourdes critiques.

Selon les conclusions de ce rapport réalisé pour le GESAC par E&Y (ex Ernst & Young), l’industrie culturelle européenne génèrerait 536 milliards d'euros de revenus, ce qui représente 4,2 % du PIB dans la zone concernée. Ce secteur, pris dans un sens très large, emploierait même 7,1 millions de personnes, soit plus que l’industrie automobile. Il serait ainsi à la troisième place en Europe, si on exclut les services publics. Tels sont les premiers chiffres dévoilés par les Échos.

 

L’an passé, un rapport similaire d’E&Y, mandaté par la SACEM, membre du GESAC, jaugeait que les neuf filières culturelles françaises (musique, spectacle vivant, cinéma, télévision, radio, jeu vidéo, livre, presse et arts graphiques) avaient générée à elles seules 75 milliards de chiffre d’affaires français, pour engendrer dans notre pays 1,2 million d’emplois (voir cet article des Échos, encore).

 

Il faudra patienter jusqu'à la publication de cette nouvelle étude E&Y financée par le GESAC, mais si on approche ces deux chiffres, le secteur en France, pourtant suraidé, pèserait 14 % de cette industrie en Europe. En attendant, l’étude de l’an passé avait fait l’objet de lourdes critiques de la part d’un professeur de Sciences Politiques de Paris.

De nombreux amalgames

Dans un document de travail pour le « Groupe d'Économie Mondiale » au sein de cette école, Patrick Messerlin avait critiqué les méthodes de calcul, et spécialement ses nombreux amalgames. « Le rapport E&Y additionne les innombrables emplois temporaires aux CDI, sans distinctions (ex. pour les chaînes télé : 112 926 emplois temporaires sont ajoutés aux 22 041 CDI afin d’obtenir le nombre total d’ «emplois créés» dans ce secteur). Par ailleurs la méthodologie suivie ne permet pas de garantir l’absence d’un double comptage des postes créés (notamment entre les emplois du cinéma, des chaines télé, du spectacle vivant et ceux des arts visuels). »

 

Il jugeait pour le moins étonnant que les emplois permanents soient additionnés aux emplois non permanents. « Un emploi d’une heure par semaine et un emploi de 35 heures font donc deux emplois. Pas surprenant qu’avec une telle arithmétique les emplois totaux dans le seul cinéma se montent à 105.890, dont ... 77.200 emplois non permanents ».

Industrie culturelle, industrie mécanique

L’enseignant cassait par la même occasion l’évaluation de la valeur économique prétendument générée par cette industrie culturelle. « Pour évaluer la valeur économique, l’étude inclut les produits et services consommés par les industries culturelles pour produire films, morceaux de musique, etc. Elle considère ainsi que le billet d’avion ou la nuit d’hôtel pour réaliser un film est ‘produite’ par l’industrie culturelle ». Selon Messerlin, encore, nettoyée de ces biais, la vraie valeur ajoutée en France par ce secteur serait au mieux de 30 Mrds et même 10 Mrds « pour les estimations les plus précises. »

 

Selon lui, l’intitulé « industries culturelles et créatives » représente un champ de secteurs extrêmement large. Or, comparer un tel ensemble à d’autres secteurs particuliers (comme celui de l’automobile) ne fait selon lui aucun sens. « Dans ce cas, pourquoi ne pas les comparer à l’ensemble des industries mécaniques (automobile, aéronautique, chantiers navals, etc.) ? »

Quel est le poids des subventions ?

Selon ce professeur émérite, encore si « les industries du cinéma et de la télévision ne comptent que pour 15 pour cent de la valeur ajoutée des « industries culturelles » mais elles empochent 60 pour cent de leurs subventions, un point encore souligné par le tout récent rapport de la Cour des comptes. En clair, la taille est ce qui attire l’attention des décideurs politiques. La notion d’industries culturelles procède d’un lobbying élémentaire : recruter le plus d’industries supplétives pour faire masse afin de maintenir en place le système existant au profit des quelques privilégiés. En somme, pas très différent de ce qui se passe lorsque les gros agriculteurs font donner les petits pour conserver leurs subventions »

L'industrie culturelle, une industrie exceptionnelle ? 

Sur ce créneau, si le secteur culturel se présente comme une industrie comme une autre, ne devrait-il pas en subir toutes les conséquences au regard de ces aides d’État ? L'intervention publique via des aides publiques est certes possible, mais seulement si elle intervient dans les conditions normales du marché. En matière de réseaux de télécommunications, par exemple, ce coup de pouce n'est pas considéré comme une aide d'État, car Bruxelles est particulièrement sensible au principe de l'investisseur avisé en économie de marché. Il tient alors compte de la participation importante d'investisseurs privés ou l'existence d'un plan d'affaires afin de flairer un retour sur investissement approprié… Est-ce le cas pour les industries culturelles européennes ?

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