Information Next INpact : Le ministère de l’Intérieur devrait dévoiler au printemps prochain un plan « police 3.0 ». S’il sera bien entendu question de renforcer le lien de « proximité numérique » entre les forces de l’ordre et la population, notamment au travers des réseaux sociaux ou d’autres téléservices, l’exécutif songe également à développer des outils d’analyse de données visant à anticiper les phénomènes de délinquance. Plus de 100 millions d’euros devraient être alloués à ce plan, sur trois ans.
En septembre 2013, Manuel Valls annonçait l’installation d’un groupe de travail visant à l’avènement d’une police et d’une gendarmerie « 3.0 ». Si le ministre de l’Intérieur d’alors pensait bien évidemment à la présence des forces de l’ordre sur les réseaux sociaux, il avait également en tête le développement des services en ligne - de type pré-plainte - et la modernisation des équipements (tenues intégrant des tissus intelligents, caméras-piétons, etc.).
Un récent rapport des sénateurs Alain Gournac et Michel Boutant (PDF) nous apprend justement que les conclusions de ces travaux confiés à Thierry Delville ont été remises au ministère de l’Intérieur en juin dernier. Surtout, les élus indiquent que ce rapport, conservé discrètement par la Place Beauvau, a servi de base à l’élaboration d’un plan « de modernisation des systèmes d’information et de communication », appelé « plan police 3.0 », et dont la mise en œuvre doit débuter l’année prochaine.
Un plan « police 3.0 » issu des conclusions du rapport Delville
En fouillant un peu dans les documents budgétaires annexés au projet de loi de finances pour 2015 (voir par exemple ici), on apprend ainsi que « ce plan ambitieux verra le déploiement d'actions essentielles pour la modernisation des forces : proximité numérique, rénovation des réseaux radios, portabilité des outils, modernisation et mutualisation des salles de réception des appels, développement des capacités d'anticipation et de conduite opérationnelles ».
Ces grands axes font justement partie des préconisations du rapport de Thierry Delville, telles que reprises dans le rapport sénatorial d’Alain Gournac et Michel Boutant (voir ci-dessous).

Que retenir ? Que différentes études techniques et fonctionnelles seront lancées en 2015 par le ministère de l’Intérieur. Cela concernera notamment le lancement de nouveaux téléservices, et plus particulièrement d'une « plateforme de dématérialisation et de centralisation des plaintes en matière d'escroquerie et fraudes sur Internet ». Les autorités se pencheront également sur la modernisation de leurs réseaux de radiocommunication.
Plus intéressant : on apprend que « l'année 2015 verra le démarrage de réalisation d'outil informatique géodécisionnel et prédictif ainsi que d'outil de veille des sources ouvertes sur internet ». Il n’est donc ici plus question de simples études. Le ministère prévoit en effet de passer à l’action. Mais si la discrétion est de mise pour ce dispositif, il est tout de même précisé que le rapport Delville préconisait « le développement de moyens de traitements de données de masse permettant de suivre, analyser, investiguer et anticiper les phénomènes de délinquance, de troubles à l'ordre public, de sécurité routière ou de secours ». En clair, on devine la mise en place d’un outil capable d’aller fouiller le web « public » afin d’y rechercher des indices permettant d’avertir les forces de l’ordre de la préparation de certains délits.
108 millions d’euros d’investissement sur trois ans
Le coût de ce plan, qui devrait s’étaler sur plusieurs années, est relativement important. Un second rapport sénatorial (PDF), signé cette fois par Philippe Dominati, précise que « les crédits au titre de la mise en œuvre du plan police 3.0 s’élèvent à 8,96 millions d’euros en autorisation d’engagement et 6,86 millions d’euros en crédits de paiement dans le projet de loi de finances pour 2015. Ce plan prévoit un investissement total de 108 millions d’euros sur trois ans, dont 68 millions d’euros pour la police nationale ».
Du côté du ministère de l’Intérieur, on reste relativement discret sur ce plan police 3.0. « Le plan d'action est toujours en cours de préparation et fera l'objet d'une communication au printemps 2015 » nous a ainsi confié une source proche du dossier. Davantage de détails devraient donc être connus à ce moment-là.
1 800 tablettes pour la gendarmerie
En attendant, on notera que les annexes budgétaires relatives à la gendarmerie nationale reviennent sur différents projets mutualisés avec la police nationale, toujours en lien avec les nouvelles technologies et le numérique. On observe ainsi que le projet de loi de finances pour 2015 prévoit, indépendamment du plan police 3.0 :
- 3 millions d’euros pour « l’acquisition et (...) la maintenance d'environ 1 800 tablettes PC ». Lors d’une audition, un responsable de la gendarmerie a fait savoir que l’idée était que chaque gendarme soit doté à terme de sa propre tablette, connectée en permanence lors du service.
- 8,3 millions d’euros pour le renouvellement du parc informatique, avec l’acquisition d’environ 13 000 ordinateurs fixes et portables.
- 2 millions d’euros pour le renouvellement des matériels et logiciels mis à disposition des spécialistes NTECH.
- 2,6 millions d’euros pour l’achat de « terminaux 3G associés aux bulles tactiques ». Il est expliqué que ces dispositifs « visent à former une zone de communication radio centrée autour du véhicule de patrouille, permettent à tout gendarme débarqué de rester en contact avec les centres opérationnels de la gendarmerie ».