Il y a quelques semaines, Manuel Noriega, un ancien général panaméen s'étant proclamé chef de l'État en 1983 au Panama, a engagé une procédure judiciaire contre Activision. L'ancien dictateur estime que son image a été utilisée sans son consentement. Une plainte que l'éditeur juge sans fondement, voire complètement ridicule.
Un dictateur soucieux de son image
Dans Call of Duty : Black Ops II, Activision s'est inspiré de l'histoire de Manuel Noriega, un célèbre dictateur panaméen ayant officié entre 1981 et 1989 dans le pays, avec le soutien de la CIA. L'homme a également trempé dans une affaire de trafic de stupéfiants, ce qui lui a valu des relations tendues avec les États-Unis et justement, les scénaristes ont dépeint à deux occasions ces liens plutôt compliqués.
Emprisonné au Panama depuis de nombreuses années, l'ancien dictateur a profité de son temps libre pour déposer plainte contre l'éditeur, jugeant que « dans le but d'augmenter la popularité et les revenus générés par Black Ops 2, [Activision Blizzard] a utilisé sans autorisation ni consentement l'image et la ressemblance [de Manuel Noriega] dans Black Ops 2 ». De plus, Noriega estime que le jeu « le dépeint comme le coupable de nombreux crimes odieux, mais fictionnels » L'objectif étant pour le plaignant d'obtenir des dommages et intérêts à hauteur du préjudice subi.
Activision ne mâche pas ses mots
Le géant américain a répondu de façon virulente aux accusations de Noriega. « Ce qui est étonnant, c'est que Manuel Noriega, un dictateur notoire qui est en prison pour les crimes odieux qu'il a commis, est contrarié parce qu'il a été dépeint comme un ennemi d'État dans le jeu Call of Duty. Pour faire simple, c'est absurde ». Clame Rudolph Guiliani, l'avocat de l'entreprise, et ancien maire de New-York, dans un communiqué officiel. « Je n'ai pas envie de donner des documents à une personne condamnée pour meurtre et trafic de drogue, comme Manuel Noriega, qui réclame de l'argent à Activision et à sa franchise Call of Duty, parce qu'ils exercent leur droit à la liberté d'expression. L'attaque de Noriega sur les droits de Call of Duty n'est pas une surprise, considérant le fait qu'il est un tyran sans foi ni loi qui a piétiné les droits de son propre peuple ».
On s'étonnera du registre de langage employé par l'éditeur qui n'hésite pas à employer des mots très crus, et à ramener le plaignant à son statut de criminel de guerre. Un procédé commode qui permet surtout de décrédibiliser l'attaquant en le jugeant sur ses actes plutôt que de parler du fond de la procédure.
Sur le fond justement, l'éditeur se défend en expliquant que les œuvres vidéoludiques sont protégées par le premier amendement de la constitution des États-Unis, qui sacralise le principe de liberté d'expression. L'éditeur estime en outre que Noriega tente de censurer « une description créative de son rôle dans des faits historiques d'intérêt public », un type d'œuvre assez régulièrement produit. Activision cite d'ailleurs dans sa réponse à la plainte de Noriega des dizaines de films comme Forrest Gump, Inglorious Basterds ou Che, dépeignant tous des personnages historiques dans des fictions.
L'affaire s'annonce donc plutôt compliquée pour les deux parties. Quoi qu'il en soit, Activision semble avoir voulu jouer cartes sur table, puisque l'ensemble des documents fournis à la justice par l'éditeur sont librement accessibles à cette adresse.