Se plaindre de sa « boîte de con » sur Facebook peut mener au licenciement

Qu'est-ce qu'on est serrés, au fond de cette boîte...
Droit 4 min
Se plaindre de sa « boîte de con » sur Facebook peut mener au licenciement
Crédits : serggn/iStock/Thinkstock

Se plaindre que l’on travaille dans une « boîte de con » sur sa page Facebook peut justifier un licenciement. Au travers d’une décision en date du 24 mars dernier et que Next INpact dévoile aujourd’hui, la cour d’appel de Lyon a en effet estimé que cela pouvait constituer une faute « réelle et sérieuse » de la part du salarié fautif. 

Novembre 2010. Après plus de trois ans passés à travailler en tant que chauffeur routier, Monsieur X est licencié. Plusieurs salariés et quelques clients sont en effet allés raconter à son employeur qu’il avait tendance à se plaindre de son travail sur Facebook... Une « Boîte de con », un « directeur qui ne tient pas ses promesses tafiole (sic) », « du entièrement n’importe quoi », « me prennent pour une bille dans cette boîte de con », etc.

 

Les mots lâchés sur le célèbre réseau social ne sont absolument pas au goût du patron de Monsieur X, qui estime qu’il a commis une faute grave en tenant sur Internet des propos insultants et diffamatoires à son égard, ainsi qu’à celle de son entreprise.  

Une faute réelle et sérieuse, mais pas une faute grave 

Et qui dit licenciement pour faute grave, dit départ immédiat, sans indemnité ni préavis. Mais pour pouvoir infliger une telle sanction, il faut que le maintien du salarié fautif dans l’entreprise soit absolument impossible. Or ici, ce n’était pas le cas ! Saisie par Monsieur X, le conseil de prud’hommes de Lyon a en effet considéré en mars 2013 que son licenciement reposait certes une « cause réelle et sérieuse », mais que cette cause n'était pas suffisamment grave pour qu’il soit licencié sur-le-champ.

 

Manifestement mécontent d'être de ce fait condamné à verser plus de 8 000 euros d’indemnités à son ex-salarié, l’employeur a fait appel de cette décision de première instance. Toutefois, manque de chance pour lui, la cour d’appel de Lyon a elle aussi considéré qu’il n’y avait pas de faute grave de la part de Monsieur X - même s’il y avait bien une faute réelle et sérieuse. En clair, aux yeux des juges, le comportement du chauffeur justifiait le licenciement, mais pas un licenciement aussi sec.

 

pouce facebook

 

Sauf que pour en arriver à cette conclusion, la cour d’appel a suivi un raisonnement assez long. En guise de preuve, l’employeur n’apportait aucune capture d’écran. Il n’avait pas non plus fait réaliser de constat d’huissier, lequel aurait pourtant permis d’attester des paramétrages du compte Facebook de Monsieur X. En lieu et place, l’ex-patron de ce dernier s’appuyait sur deux attestations de salariés ainsi que sur le courriel d’un client. « Pas suffisant ! » a rétorqué la cour, qui a retenu qu’il appartenait à l’employeur « de se pré-constituer une preuve de ses affirmations avant de procéder à la mise à pied du salarié ».

Pour la cour d'appel, le salarié a excédé son droit à la liberté d'expression 

La cour d’appel a cependant pu apprécier la nature des propos litigieux. L’ex-salarié avait en effet apporté ses propres captures d’écran. De manière relativement argumentée, les juges ont estimé que les propos en question devaient être précisément resitués : « la cour constate, tout comme les premiers juges, qu’il s’agit d’échanges intervenus entre le 14 août 2010 et le 27 septembre 2010 entre Monsieur X et des membres de sa famille, dans lesquels le salarié se plaint de ses conditions de travail dans l’entreprise et reçoit les encouragements de ses proches (...). Replacés dans leur contexte, ils relèvent plus de l’expression du malaise du salarié que d’une volonté de porter atteinte à l’entreprise. Pour autant, il qualifie celle-ci en des termes peu flatteurs et excèdent son droit à la liberté d’expression. »

 

Mais ces propos étaient-ils publics ? Faute de preuve suffisante de la part de l’employeur, les magistrats ont retenu que les « sorties » du chauffeur « n’étaient accessibles qu’aux personnes connaissant l’identité de Monsieur X, qui pouvaient accéder à son compte Facebook en renseignant intentionnellement ce dispositifs des noms et prénoms du salarié ». Le chauffeur routier a au passage eu droit à une petite leçon de la part de la cour d’appel : « Monsieur X, en n’activant pas les critères de confidentialité de son compte Facebook, a pris le risque que ses propos, qu’il pensait privés, soient accessibles à d’autres salariés de la société eux mêmes titulaires d’un compte Facebook ».

 

Résultat ? L’employeur a été condamné à verser au total plus de 10 000 euros à son ancien salarié, que ce soit au titre des frais de justice (2 000 euros), de son indemnité compensatrice de préavis (5 160 euros), etc.

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