Le nombre de demandes de déréférencement envoyées par les ayants droit dans l’espoir de lutter contre le piratage vient de franchir un nouveau record chez Google. La semaine dernière, le géant de l’internet en a en effet reçu plus d'un million par jour en moyenne, un record.
Plutôt que de s’en prendre directement aux « pirates », les industries culturelles s’attaquent aujourd’hui davantage à leurs canaux d’accès aux contenus illicites. L’objectif est simple : empêcher Madame Michu de tomber trop facilement sur un site permettant en quelques clics de télécharger ou de visionner illégalement un film ou une série. Et pour arriver à leurs fins, les ayants droit tentent désormais de plus en plus de s’en prendre à la principale porte d’accès vers ces sites, c’est-à-dire Google.
Très régulièrement, ils adressent ainsi des demandes de déréférencement au célèbre moteur de recherche. Comme le veut la législation applicable aux hébergeurs, ceux-ci sont tenus d’empêcher promptement l’accès à un contenu dès lors qu’on leur en signale l’illicéité. Concrètement, si le géant de l’internet donne une suite favorable à une telle requête, la page dénoncée n’apparaît plus au sein des résultats de son moteur de recherche.
Une multiplication par cinq du nombre de requêtes en deux ans
En augmentation quasi continue depuis plusieurs années, le nombre de demandes de déréférencement reçues par Google vient de franchir un nouveau record, comme l’a remarqué TorrentFreak. Au cours de la semaine du 11 août, la firme de Mountain View a en effet vu arriver dans sa boîte aux lettres 7,82 millions de requêtes DMCA (voir tous les chiffres ici). Soit plus d’un million par jour en moyenne. Un niveau jusqu’ici jamais atteint. Cela représente plus de 12 demandes par seconde !
Sur deux ans, l’augmentation est plus que vertigineuse : le nombre de demandes de déréférencement envoyées par les ayants droit a quasiment été multiplié par cinq (1,6 millions de requêtes pour la semaine du 13 août 2012).
Google reste cependant assez silencieux sur les suites qu’il donne à ces requêtes. L’entreprise indique seulement avoir « retiré 97 % des résultats de recherche spécifiés dans les demandes reçues entre juillet et décembre 2011 ». Mais à cette époque, le dispositif était à des années-lumières de son rythme de croisière actuel. Le géant de l’internet demeure également assez vague lorsqu’il explique que ses équipes vérifient les requêtes, qui doivent être « formulées clairement et précisément », en cherchant à établir que le contenu des pages dénoncées porte effectivement atteinte aux droits d’auteur du plaignant. Le tout dans un temps record : « En décembre 2012, notre délai moyen de traitement (...) est d'environ six heures » affirme à cet égard Google.
Une montée de régime qui va de pair avec les effets de bords
Au regard de toutes ces données, il n’est aujourd’hui guère surprenant que la firme de Mountain View s’emmêle parfois les pinceaux. Google a ainsi procédé au déréférencement de pages permettant de télécharger le documentaire « The Pirate Bay - AFK », alors que celui-ci était sous licence Creative Commons et que son auteur n’était en rien lié à ces requêtes (qui émanaient de grandes majors du cinéma hollywoodien). De la même manière, des pages permettant de télécharger la suite de bureautique libre « Open Office » avaient été supprimées des résultats du moteur de recherche l’année dernière. Google ne s’était jamais expliqué de ces épisodes.
Le pire dans cette histoire est peut-être que les ayants droit ne semblent même pas satisfaits du dispositif. On se souvient en effet de la complainte de la RIAA, qui affirmait en mai 2013 « ne pas voir le bout du tunnel », dans la mesure où les contenus signalés une première fois finissent la plupart du temps par réapparaître ailleurs. Le puissant lobby américain disait ainsi qu’il luttait « avec un seau » contre « un océan de téléchargements illégaux ». Le producteur Jean Labadie, qui a interpellé il y a deux semaines la ministre de la Culture, allait d’ailleurs dans le même sens. Aurélie Filippetti pourrait toutefois s’inspirer des récentes propositions de Mireille Imbert-Quaretta pour avancer sur ce dossier.