Open Data : le gouvernement va modifier la loi « CADA » de 1978

La CADA sur mon bidet
Droit 6 min
Open Data : le gouvernement va modifier la loi « CADA » de 1978

D’ici au 18 juillet 2015, la France devra avoir transposé en droit national une directive européenne qui impactera directement la législation applicable à l’ouverture des données publiques. Pour ce faire, le gouvernement entend modifier la loi « CADA » de 1978 par voie d’ordonnance, loin des regards du Parlement. 

C’est le 10 septembre prochain, à partir de 9h30, que la Commission des finances de l’Assemblée nationale examinera un énième projet de loi « portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne en matière économique et financière ». Au travers de ce cavalier législatif présenté devant le Parlement au plein cœur de l’été, le gouvernement espère transposer une multitude de directives européennes par voie d’ordonnances. Le tout au pas de charge, puisque le texte a été engagé sous une procédure d’urgence, ce qui signifie qu’il n’y aura - sauf surprise - qu’un examen par chambre.

 

Parmi les textes adoptés par Bruxelles et que la France doit désormais basculer dans son droit interne, se trouve la directive du 26 juin 2013 relative à « la réutilisation des informations du secteur public ». Avec ce texte, qui vient modifier une précédente directive sur le même sujet, chaque État est tenu de veiller, à partir du 18 juillet 2015, à ce que les documents publics détenus par l’administration (hors données protégées par le secret défense ou le secret d’affaires notamment) « puissent être réutilisés à des fins commerciales ou non commerciales ». Si cette directive n’est pas forcément très contraignante, elle incite globalement les États à s’engager davantage sur la voie de l’Open Data.

 

Seulement voilà. Initialement, le gouvernement avait annoncé par la voix d’Axelle Lemaire et de Marylise Lebranchu (respectivement secrétaire d’État au Numérique et ministre de la Réforme de l’État) que la transposition de ce texte se ferait au travers du grand projet de loi numérique prévu pour l’année prochaine, et que cela serait surtout l’occasion d’avancer davantage encore en matière d’Open Data. La nouvelle locataire de Bercy avait notamment envisagé un renversement de logique en matière d’ouverture des données publiques - avec une fermeture qui deviendrait l’exception, au profit d’une ouverture par défaut.

 

Or l’exécutif a finalement opté pour un cavalier législatif bien différent... Il demande en effet au Parlement l’autorisation de le laisser légiférer tout seul, par voie d’ordonnance. En clair, les députés et sénateurs n’auront pas leur mot à dire : ils ne pourront pas amender le texte de transposition, qui restera du seul ressort du gouvernement. Les associations Savoir Com1 et Regards Citoyens s’étaient ainsi vivement émues de ce choix, de même qu’Axelle Lemaire, qui avait eu du mal à cacher sa désapprobation sur Twitter.

Vers une modification de la loi « CADA » par voie d'ordonnance

Mais en dépit de ce changement soudain de programme, quelles sont les intentions du gouvernement ? Jusqu’ici, le gouvernement se montrait bien silencieux à cet égard. Toutefois, la récente mise en ligne de l’étude d’impact rattachée au projet de loi soumis à l’Assemblée nationale nous en apprend davantage (voir ici). « L’ordonnance devrait modifier le titre 1er de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public et diverses dispositions d'ordre administratif, social et fiscal » peut-on ainsi y lire. Sans grande surprise, l’exécutif envisage de modifier la loi « CADA » - du nom de la Commission d’accès aux documents administratifs - qui encadre de par son titre premier les droits d’accès et de réutilisation des données publiques.

 

Si l’étude d’impact ne précise pas quelles dispositions vont évoluer, il est toutefois précisé qu’il devrait y avoir des changements « en profondeur » au niveau des règles de tarification applicables à la réutilisation des informations du secteur public. Si la directive prévoit que les administrations seront toujours autorisées à réclamer des redevances, le montant de celles-ci ne devra toutefois pas dépasser les « coûts marginaux de reproduction, de mise à disposition et de diffusion » des données publiques en question. Le gouvernement ajoute que le texte à transposer « impose également des règles nouvelles en matière de transparence de ces tarifications qui vont nécessiter un ajout substantiel au droit français. En outre, la directive intègre dans son champ d’application certaines institutions culturelles (bibliothèques, musées et archives) ce qui est une nouveauté par rapport à la directive du 17 novembre 2003. »

 

axelle lemaire

 

En plus de cette modification de la loi CADA, c’est le décret d’application de cette même loi, en date du 30 décembre 2005, qui devrait lui aussi être remanié par l’exécutif, afin de « prendre en compte les dispositions relevant du règlement dans la directive du 26 juin 2013 ».

 

Il est à noter que l’étude d’impact précise que la transposition par ordonnance de la directive sur la réutilisation des informations du secteur public « n’a pas fait l’objet de consultations préalables ».

Bercy maintient ses ambitions quant au futur projet de loi numérique

Mais avant même que les débats aient commencé au Parlement, deux députés de l’opposition ont tenté d’interpeller Axelle Lemaire sur cet épisode qui a de grands airs de reculade pour la secrétaire d’État au Numérique. Thierry Lazaro et Lionel Tardy ont en effet demandé des explications à l’intéressée, le premier ayant fait valoir le mois dernier qu’un débat parlementaire « eût été préférable » sur ce texte, en raison de son champ d'application qui vise symboliquement la transparence et l’ouverture...

 

Contacté par nos soins, le secrétariat d’État au Numérique nous assurait que cela ne remettait pas en question la volonté du gouvernement d’avancer sur le dossier de l’Open Data via le futur projet de loi numérique. « Il ne faut pas opposer la transposition de la directive avec le projet de loi numérique. C'est-à-dire qu'il faudra aller encore plus loin que ce que la directive demande. En tout cas c'est notre volonté » jurait-on à Bercy.

 

Pour autant, force est de constater que les ambitions affichées par l’exécutif sont régulièrement revues à la baisse. La concertation sur le grand projet de loi promise pendant des mois par Bercy, n’a toujours pas débuté. Le Conseil national du numérique n’a toujours pas été officiellement saisi, même si l’institution se prépare à débuter ses travaux le mois prochain. De plus, le futur « chief data officer », en dépit d’une annonce en grandes pompes au mois de mai en Conseil des ministres, n’a toujours pas été nommé. Ses compétences ne sont pas davantage définies, faute de publication des textes correspondants (pour en savoir plus, voir notre article). 

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