« Signalement IGPN » mis en ligne sans autorisation : l’Intérieur s’explique

Une publication « effectivement tardive »
Droit 4 min
« Signalement IGPN » mis en ligne sans autorisation : l’Intérieur s’explique
Crédits : Hemera Technologies/AbleStock/ThinkStock

Pourquoi le dispositif de signalement en ligne des agissements litigieux de certains policiers a-t-il été mis en place plus de huit mois avant d’être officiellement autorisé, et ce au grand dam de la CNIL ? Interrogé par un député de l'opposition, le ministère de l’Intérieur vient d’apporter sa version des faits. 

« À titre liminaire, la commission regrette que ce traitement ait été mis en œuvre avant même qu'elle se soit prononcée sur le projet d'arrêté. Elle appelle dès lors l'attention du ministère sur l'obligation de la saisir préalablement à la mise en œuvre de tout traitement, d'une part, et de ne mettre en œuvre un traitement qu'une fois le texte réglementaire l'autorisant et l'avis de la CNIL publiés, d'autre part. » C’est avec ces mots malgré tout très policés - comme à son habitude - que la Commission nationale de l’informatique et des libertés a fait savoir au ministère de l’Intérieur qu’elle n’était pas très contente que le site « Signalement IGPN » ait été mis en place de nombreux mois avant son feu vert officiel...

 

Mais un petit rappel des faits s’impose. Septembre 2013. Manuel Valls inaugure la fameuse plateforme Signalement IGPN, dont le nom fait référence à l’Inspection générale de la police nationale. Ce site permet à n’importe quel internaute d’avertir la « police des polices » d'un comportement susceptible de mettre en cause un ou plusieurs agents affectés dans un service de la police nationale. Ainsi, toute personne s’estimant victime ou témoin d’agissements litigieux est invitée à laisser ses noms, prénoms, coordonnées, puis à décrire brièvement les faits signalés (date, heure, lieu, résumé, etc.), le tout via un formulaire en ligne.

 

Avril 2014. La CNIL transmet au ministère de l’Intérieur son avis sur le projet d’arrêté venant acter la création du fameux dispositif. Comme nous l’avons évoqué précédemment, l’institution est très remontée : non seulement le ministère de l’Intérieur ne l’a pas saisie avant de mettre en œuvre ce traitement de données personnelles, mais en plus celui-ci fonctionne depuis six mois sans autorisation... Il faudra en plus attendre le 21 mai pour que la Place Beauvau publie l’arrêté autorisant un tel traitement de données personnelles, et, par la même occasion, l’avis de la CNIL.

 

signalement igpn

Le ministère de l'Intérieur affirme avoir soumis un projet d'arrêté dès le mois d'août 2013

Intrigué par ce « double manquement surprenant », le député Lionel Tardy avait posé en juin dernier une question écrite au ministère de l’Intérieur. Ce dernier était invité à faire la lumière sur cet épisode et à présenter « les mesures qu'il compt[ait] prendre pour éviter qu'il ne se reproduise à l'avenir ». La réponse de l’exécutif vient justement d’être publiée au Journal Officiel.

 

Si la Place Beauvau reconnaît que la publication de l’arrêté autorisant ce traitement de données fut « effectivement tardive », elle ne se montre cependant guère fautive. « Dans le souci de mettre au plus vite ce nouveau service à la disposition du public, il a été décidé de lancer ce téléservice dès le mois de septembre 2013 » expliquent ainsi les services de Bernard Cazeneuve, qui a succédé à Manuel Valls en avril dernier. « Sur le plan du droit, poursuivent-ils, les démarches utiles ont été entreprises pour respecter les différentes procédures, nécessairement longues, devant accompagner la création d'un traitement de données à caractère personnel. »

 

La Place Beauvau affirme en ce sens avoir soumis dès le mois d’août 2013 un projet d'arrêté et un dossier technique détaillé sur les finalités et les caractéristiques de la plateforme Signalement IGPN. À partir de là, un dialogue se serait noué entre le ministère de l'Intérieur et la CNIL. « Dans le cadre des échanges, habituels en la matière, entre le ministère de l'Intérieur et la commission, des éléments complémentaires détaillés lui ont par ailleurs été apportés, en réponse à ses diverses demandes » est-il précisé. Mais à aucun moment l’exécutif ne concède avoir commis une erreur ou ne fait de promesses de bonnes intentions quant à l’avenir.

Pas de protocole sécurisé, au moins à court terme

Autre chose. La CNIL avait tiqué sur le fait que la plateforme Signalement IGPN n'utilise pas de protocole sécurisé de type « https ». L’institution avait pourtant recommandé au ministère de l’Intérieur d’opter pour ce protocole, au nom de « la nécessité d'assurer la confidentialité des données transmises ». Interrogée sur ce point par Lionel Tardy, la Place Beauvau est une nouvelle fois restée droite dans ses bottes : « Cette option n'est pas envisagée à court terme, considérant l'impact technique important qu'elle aurait sur le fonctionnement de l'ensemble des plates-formes hébergées par le site « interieur.gouv.fr » et son coût non négligeable » ont répondu les services de Bernard Cazeneuve.

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