La Cour de cassation vient de valider le jugement d’une juridiction de proximité qui avait donné raison l’année dernière à un ancien client de Free, lequel s’était retourné contre son FAI pour une histoire de frais de résiliation. L’opérateur a été sanctionné dans la mesure où le mail qu’il avait envoyé à cet abonné afin de lui notifier un changement de contrat n’était pas suffisamment clair, de telle sorte que les nouvelles dispositions contractuelles ne pouvaient lui être opposables. Explications.
En avril 2011, Jean-Jack X. a reçu de Free, son fournisseur d’accès à Internet depuis 2009, un email l’avertissant de changements portés à son contrat d’abonnement. Le courriel indiquait ainsi :
« Nous vous informons qu’à compter du 1er juin 2011, votre forfait Freebox évolue. Vous trouverez à la rubrique « Mon abonnement » de votre interface de gestion les conditions contractuelles applicables à votre forfait à compter de cette date. Un document détaille les modifications apportées. »
Cette évolution n’était pas anodine, puisqu’elle faisait suite à la condamnation de l’opérateur par le tribunal de grande instance de Paris. Ce dernier, saisi par l’association UFC-Que Choisir, avait alors sanctionné Free pour différentes pratiques illicites, à commencer par son système de frais d’activation à perception différée (plus l’abonné attendait avant de résilier, moins ces frais étaient importants). Le FAI s’était plié à la décision de la justice en imposant à ses abonnés des frais de résiliation fixes de 49 euros.
Extrait de la brochure tarifaire actuelle de Free.
Problème : lorsque Monsieur X. résilie en décembre 2011 son abonnement chez Free suite à un déménagement, l’opérateur lui facture l’opération 49 euros. Si l’on ajoute quelques frais d’impayés, le FAI réclame au total 58,49 euros à son client sur le départ... Sauf que ce dernier ne l’entend pas de cette oreille. Il estime que le mail qui lui a été envoyé quelques mois plus tôt ne permettait pas d’avoir connaissance des changements opérés, notamment au niveau des frais de résiliation. Jean-Jack X. affirme en effet qu’il fallait se rendre sur un site spécifique (la rubrique « Mon abonnement ») pour deviner les changements puisque le contenu du courriel n’était en ce sens pas suffisant.
Free condamné à rembourser les frais de résiliation à son ancien client
Pour obtenir le remboursement de ces frais de résiliation qui lui ont été imposés sur la base des nouvelles conditions contractuelles de Free, le plaignant se tourne au cours de l’année 2012 vers une juridiction de proximité, devant laquelle il réclame que les conditions de 2009 (celles auxquelles il avait initialement souscrit) lui soient appliquées. Et le 14 mars 2013, il obtient gain de cause ! La juridiction de proximité de Saintes considère en effet que les nouvelles conditions contractuelles sont inopposables à Jean-Jack X. Free est alors condamné à rembourser à son ancien client la somme de 58,49 euros, plus 70 euros de dommages et intérêts, ainsi que 600 euros au titre des frais de justice.
Mais le FAI ne lâche pas le morceau. La société de Xavier Niel s’est pourvue en Cassation dans l’espoir de pouvoir faire annuler le jugement. Elle estime que la juridiction de proximité a mal appliqué le droit, notamment dans la mesure où l’article L. 121-84 du Code de la consommation prévoit que « tout projet de modification des conditions contractuelles de fourniture d’un service de communications électroniques est communiqué par le prestataire au consommateur, au moins un mois avant son entrée en vigueur, assorti de l’information selon laquelle ce dernier peut tant qu’il n’a pas expressément accepté les nouvelles conditions, résilier le contrat sans pénalité de résiliation et sans droit à dédommagement, jusque dans un délai de quatre mois après l’entrée en vigueur de la modification ». Or dans le cas présent, Monsieur X. s’est bien vu notifier le changement de contrat, et n’a pas demandé de résiliation (sans frais) dans les quatre mois suivants l’entrée en vigueur des nouvelles dispositions - il avait jusqu’au 1er octobre.
Des démarches de recherche trop importantes
Sauf que la Cour de cassation vient de valider le jugement de première instance. Dans un arrêt rendu le 2 juillet dernier et relayé par Legalis (voir la décision) la haute juridiction retient en effet « qu’ayant relevé que le courriel adressé en avril 2011 à M. X. ne permettait pas à ce dernier, sauf à se livrer à des recherches sur son interface de gestion, de comprendre qu’à défaut de mettre fin à la relation contractuelle dans un délai de quatre mois, les frais d’activation prévus dans le contrat initial seraient remplacés par des frais de résiliation, la juridiction de proximité en a exactement déduit que la modification contractuelle litigieuse n’était pas opposable à M. X. ». Autrement dit, Free ne pouvait pas réclamer les frais de résiliation prévus par le nouveau contrat, dans la mesure où l’opérateur n’expliquait pas assez clairement à son client quels étaient les changements à ce sujet.
Le pourvoi de Free a ainsi été rejeté et l’entreprise condamnée à verser 2 500 euros de frais de justice à Jean-Jack X.