Lors de son audition le 24 juin devant la commission des affaires européennes, Olivier Schrameck, président du CSA, a expliqué aux députés qu’il souhaitait ne pas être ignoré par la Commission du numérique. Il a réitéré à cette occasion son souhait de voir son pouvoir de régulation étendu aux contenus numériques en ligne.
Olivier Schrameck a été auditionné la semaine dernière par la Commission des affaires européennes. À cette occasion, le numéro un du Conseil Supérieur de l’audiovisuel a fait part de ses souhaits de ne pas être ignoré par la toute récente Commission du numérique : « le Conseil a vocation à contribuer aux travaux de la commission récemment créée par l’Assemblée nationale sur le numérique » soutient-il.
En guise d’arguments favorables à cette prise en compte, le président du CSA fait valoir son rôle et ses missions « en matière de liberté d’expression, de respect du pluralisme, de protection des publics et de soutien à la création s’agissant des services de communication audiovisuelle, y compris ceux de plus en plus nombreux qui sont présents sur internet ». Bref, il ne faudrait pas que cette commission sur le numérique oublie la tentation forte du CSA à vouloir muscler sa régulation des contenus en ligne.
Réguler les contenus en ligne, y compris sur les magasins d'applications
Devant la commission des affaires européennes, à l'Assemblée nationale, le CSA a donc réitéré ses vœux exprimés dans son dernier rapport annuel, dans la droite lignée des préconisations de Pierre Lescure. Faisant état de la convergence entre l’audiovisuel et Internet, il juge souhaitable une modification de la directive européenne sur les services de médias audiovisuels. Il voudrait spécialement que soit redéfini le champ d’application de ce texte afin « d’inclure les distributeurs, les opérateurs de l’internet ouvert dit « over the top » (OTT), les constructeurs de terminaux et les magasins d’application ».
De fait, cette inclusion lui permettra en second lieu d’asseoir la régulation du secteur. « L’apparition de nouveaux gardiens d’accès se positionnant entre les éditeurs et les consommateurs rend nécessaire cette inclusion, par une articulation adaptée avec la directive de 2000 sur le commerce électronique. Si ces différents intermédiaires n’exercent pas nécessairement de responsabilité éditoriale sur les contenus, ils ont néanmoins un poids croissant dans la chaîne de valeur et une responsabilité importante dans l’accès aux contenus, la qualité et la diversité des programmes, ainsi que le développement de la création et de la concurrence. »
Revoir les règles de territorialité face à Netflix
Ce n’est pas tout. Il demande aussi une réforme des règles de territorialité. « Le principe du pays d’origine permet à tout opérateur de proposer, depuis n’importe quel Etat membre de l’Union, des programmes audiovisuels au public français, sans être contraint par la régulation française. Il peut en découler des stratégies de délocalisation et une tentation du moins-disant culturel auxquelles les mécanismes « anticontournement » ne parviendraient pas à répondre ». En guise d’exemple, il cite Netflix qui arrosera la France depuis les Pays-Bas renforce « les inquiétudes des éditeurs nationaux qui contribuent au financement de la création et se trouvent placés dans une situation concurrentielle et réglementaire profondément déséquilibrée. »
Au regard de la législation purement nationale, le CSA fait dès lors des appels du pied au gouvernement pour que d'autres préconisations du rapport Lescure soient enfin retranscrites dans la future loi sur la Création promise de longue date par Aurélie Filippetti. La pierre angulaire du dispositif viserait à inciter les services audiovisuels numériques à adhérer « librement » à un mécanisme de labellisation, de chartes ou de conventionnement volontaire. « Celui-ci consiste à inciter les acteurs qui le souhaitent à prendre des engagements dans le domaine de la création, en matière de diversité et d’exposition des œuvres par exemple, en contrepartie d’avantages comme l’accès facilité aux œuvres ou aux offres des distributeurs » résume le CSA qui veut ici jouer le rôle de chef d’orchestre de ces engagements volontaires. « Cette approche permettrait d’associer aux objectifs de la régulation un certain nombre d’acteurs qu’on ne peut contraindre à appliquer nos règles, mais qui souhaitent s’intégrer au système socioculturel français. »
Seul souci, le ministère de la Culture ne parvient toujours pas à boucler son projet de loi sur la Création. Selon les aveux d’Aurélie Filippetti, le texte est désormais reporté au début 2015, accusant ainsi plusieurs mois de retard au grand désespoir des ayants droit.