Hier soir, les députés ont adopté en seconde lecture l’article 17 de la loi sur l’égalité entre les femmes et les hommes. Une disposition qui va accentuer la responsabilité des intermédiaires techniques sur les abus de la liberté d’expression.
Les arguments de Sergio Coronado n’auront visiblement pas suffi hier soir. Le député EELV s’est dit opposé à ce que la loi pour la confiance dans l’économie numérique soit modifiée « à petites touches ». Il se souvient que le gouvernement s’était engagé à lancer une réflexion de fond sur les libertés numériques (habeas corpus) et qu’une commission sur le numérique a été fraîchement lancée, parfaitement apte à plancher sur ces questions. Mais les parlementaires ont préféré voter l’article du projet de loi de Najat Vallaud-Belkacem visant à accentuer le rôle des intermédiaires sur les contenus homophobes, sexistes ou handiphobes. FAI et hébergeurs devront ainsi mettre en place un dispositif de signalement, transférer à la police les dénonciations des internautes et purger les contenus manifestement illicites (voir notre émission 14h42 et notre dossier).
Isoler les blagues sur les blondes des appels à la haine sera « très facile »
De son côté, le rapporteur Sébastien Denaja (PS) tentera de relativiser les inquiétudes du député écologiste : « Il ne faut pas trop exagérer la portée que cela va avoir pour les acteurs (intermédiaires, NDLR) ce n’est pas une modification substantielle des équilibres de la loi de 2004. Il s’agit simplement de signalements de contenus illicites au motif qu’il s’agit de fait d’incitation à la haine en raison du sexe, de l’orientation sexuelle ou du handicap. Ce sont des contenus très faciles à identifier ou qui sont en pratique limités. »
Très facile à identifier ? Les intermédiaires techniques devront pourtant isoler les contenus litigieux avant de les envoyer à la plateforme Pharos, gérée par l’OCLCTIC, laquelle arrive déjà à saturation. Sur cette problématique, Denaja assure que les intermédiaires sauront laisser de côté les contenus « visant à moquer simplement quelqu’un sur son sexe ou éventuellement son orientation sexuelle, même si par ailleurs on pourrait le regretter. Ce n’est pas une société de censure qui va s’instaurer après l’adoption de cet article 17. »
« Rendre obligatoire leur suppression »
Pour autant, Najat Vallaud-Belkacem, ministre des droits des femmes, exposera que « je ne suis pas prête à céder sur la définition d’une règle sur Internet pour permettre aux internautes de signaler aux hébergeurs les propos homophobes, handiphobes ou sexistes et rendre obligatoire leur suppression. »
La nouvelle secrétaire d'État au Numérique, Axelle Lemaire, qui s'était opposée à cet article alors qu'elle était députée, était absente des débats hier soir. Il sera intéressant en bout de course parlementaire de voir la position du Conseil constitutionnel si tant est que celui-ci soit saisi par 60 députés ou 60 sénateurs.