La revente de fichiers d’occasion toujours en débat aux États-Unis

La revente de fichiers d’occasion toujours en débat aux États-Unis

Une occasion à ne pas manquer ?

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Marc Rees

Publié dans

Droit

09/06/2014 6 minutes
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La revente de fichiers d’occasion toujours en débat aux États-Unis

La commission des affaires juridiques de la chambre des représentants aux États-Unis s’est penchée sur la question de la revente des fichiers d’occasion. Le débat oppose, sans surprise, les ayants droit qui sont farouchement opposés à des acteurs comme ReDigi, une plateforme qui veut justement ouvrir ce second marché. La justice a pour l’heure donné raison aux titulaires de droits.

Les travaux initiés à la chambre des représentants portent sur la doctrine de la « first sale », dégagée par la Cour Suprême américaine en 1908. Avec elle, un ayant droit peut toucher des royalties pour la première vente de ses oeuvres, non au-delà. C’est cette doctrine, dont on retrouve un pendant en France, qui permet aux utilisateurs de pouvoir revendre leurs livres ou leurs CD dans les vide-greniers, sur eBay ou LebonCoin. Avec l’explosion du numérique, se pose du coup la question des fichiers numériques : peut-on revendre d’occasion un fichier MP3 ou un film acheté légalement sur internet ? Vaste problématique.

 

redigi

 

En préparation aux travaux d’études qui se sont déroulés voilà quelques jours à la commission des affaires juridiques de la chambre des représentants, la MPAA qui représente les intérêts des studios d’Hollywood a dit tout le mal qu’elle pensait d’une possible extension de cette doctrine au numérique. Cette ouverture « porterait atteinte de manière significative aux nouveaux modèles d'affaires émergents » affirme-t-elle. Pour la Motion Picture Association, les effets actuels de cette doctrine sur les biens physiques sont limités par la qualité même des supports. En effet, les CD, les livres, etc. « prennent de la place, nécessitent des efforts pour être transportés, ils imposent des coûts pour produire des unités supplémentaires, sont souvent fabriqués en quantités limitées ou deviennent rares par l’effet du temps, et se désagrègent avec l'âge. »

Ouvrir le second marché au numérique, un risque inutile

L’industrie du cinéma refuse de voir consacrer cette extension au numérique, d’autant selon elle que le numérique a pallié les difficultés inhérentes aux biens tangibles. « Si vous perdez ou abimés des copies physiques, vous devriez repayer pour le remplacer. Vous ne pouvez pas perdre ou casser un contenu internet, et si vous perdez votre appareil (PC, tablettes, etc., NDLR) de nombreux services vous permettront de recharger ce contenu gratuitement ». Bref, les nouveaux services apportent une bonne « flexibilité ». Une doctrine de la première vente étendue au numérique serait « inutile, ou mieux, d’une utilité limitée face aux avantages que les consommateurs retirent de ces services en ligne. »

 

La MPPA dissuade donc les États-Unis d’ouvrir cette brèche : le marché de l’occasion des biens physiques est un marché plutôt distinct de celui des produits neufs. Intrinsèquement, les occasions sont des « substituts imparfaits ». Dans le numérique, il y a au contraire confusion de ces marchés. Le bien est identique à l’original ce qui permet de supplanter les sources initiales. « Forcer les créateurs afin de permettre la revente de contenus sur Internet les conduirait à une augmentation sensible des prix voire à décourager à proposer des modèles flexibles en ligne ». La MPAA invite du coup ceux qui préfèrent la propriété physique aux joies des systèmes de licence, d’aller acheter des livres, des CD et des DVD. Ni plus ni moins.

Le plaidoyer de ReDiGi pour le marché de l’occasion numérique

Les parlementaires américains ont également pu entendre John Ossenmacher, le dirigeant de ReDigi, première plateforme de revente de fichiers d’occasion aux États-Unis. Et pour cause, ce service ouvert fin 2011 permet la revente de MP3 d’occasion, du moins ceux achetés sur iTunes ou la plateforme, non les fichiers rippés depuis un CD. Les fichiers sont copiés vers ReDiGi et l’utilisateur doit éviter d’en garder une copie. Le 30 mars 2013, la justice donnait cependant raison aux ayants droit de la musique : elle estime que la first sale doctrine n’est pas applicable : en effet, quand l’utilisateur vend un fichier, il ne vend pas ce fichier, mais une duplication de celui-ci. Du coup, seule la vente intégrale d’un disque dur bourré de MP3 achetés légalement pourrait justifier son application, mais pas une vente sans support.

 

Dans son discours devant les parlementaires américains (résumé, discours complet, signalé par Torrent Freak), John Ossenmacher a présenté un plaidoyer en faveur de ses activités. Il en a profité pour condamner les choix de l’industrie qui font croire, par l’apposition d’un bouton « acheter » que les utilisateurs deviennent de vrais propriétaires, alors les conditions de ces contrats font qu’ils ne disposent que d’une licence à long terme. De même, s’« il y a bien des boutons acheter ou louer, il n’y a pas de boutons revendre ou donner » regrette-t-il. Selon lui, finalement, la question n’est pas de savoir si la first sale doit être étendue au numérique, mais plutôt comment assurer son plein exercice dans cet univers connecté. Il rappelle judicieusement qu’Apple comme Amazon se sont empressés de déposer chacun un brevet sur ces opérations anticipant les potentialités du marché secondaire numérique.

 

Et à ceux qui estiment que ce second marché viendrait détruire l’industrie, il rappelle que les marchés de l’occasion ont toujours existé. « Ils jouent un part importante dans notre économie et notre culture. Certaines personnes ne peuvent tout simplement pas se permettre d'acheter de nouveaux produits, d’autres les achètent sachant que ce qu'ils possèderont aura une valeur à la revente ou au don. Tous ceux-là devraient-ils être discriminés et aliénés en raison des progrès technologiques? Nous pensons que non. »

Un débat qui s’invite en France

En France, ce sujet est également sur le feu, spécialement au CSPLA comme nous l'avions révélé. Le Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique planche dessus depuis des mois entre les murs du ministère de la Culture. Le sujet pose question alors que la Cour de Justice de Luxembourg a justement accepté les licences de logiciel d’occasion. Au fil de ces travaux, les ayants droit de l’audiovisuel n’ont de cesse de chanter les avantages de l’initiative UltraViolet. Une offre qui couple Cloud et DRM en permettant à l’acheteur d’un DVD de visionner le contenu sans détenir le support lors du visionnage.  La Sacem, elle, considère que « l’existence d’un marché de l’occasion pour le MP3 entraînerait une perte de valeur de 18 % pour le marché et 35 % pour les ayants droit. »

Écrit par Marc Rees

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Sommaire de l'article

Introduction

Ouvrir le second marché au numérique, un risque inutile

Le plaidoyer de ReDiGi pour le marché de l’occasion numérique

Un débat qui s’invite en France

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Commentaires (20)








l’article a écrit :



« Si vous perdez ou abimés des copies physiques, vous devriez repayer pour le remplacer. Vous ne pouvez pas perdre ou casser un contenu internet, et si vous perdez votre appareil (PC, tablettes, etc., NDLR) de nombreux services vous permettront de recharger ce contenu gratuitement ».







C’est officiellement accepté cette enculerie de dire qu’on ne garde pas les droits d’écoute qu’on a pourtant acheté en plus du support pourri?

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« inutile, ou mieux, d’une utilité limitée face aux avantages que les consommateurs retirent de ces services en ligne. »





Nan mais là ils se foutent de la gueule du monde (oui c’est pas nouveau). Donner des avantages aux consommateurs ? Ha bah non surtout pas, il faut bien leur faire les fesses aux consommateurs !




« Si vous perdez ou abimés des copies physiques, vous devriez repayer pour le remplacer. Vous ne pouvez pas perdre ou casser un contenu internet, et si vous perdez votre appareil (PC, tablettes, etc., NDLR) de nombreux services vous permettront de recharger ce contenu gratuitement ».





S’ils nous assurent contractuellement qu’on pourra toujours “recharger ce contenu gratuitement” pour plus que la durée de vie d’un CD/DVD actuel alors pas de problème puisque c’est ce qu’ils mettent en avant que c’est “plus mieux que le modèle physique”… Sachant qu’un CD peut durer une bonne dizaine d’année et quand on voit la durée de certains serveurs de jeux, que soudain, un jeu ou une musique que tu avais acheté légalement “mais que pour une question de droit”, pouf ça a disparu du serveur et tu ne peux plus le retélécharger…



Bref, ils nous prennent pour des jambons…


ils ne savent plus quoi faire pour faire payer, payer, payer,payerpayer, payer, payer,payerpayer, payer, payer,payerpayer, payer, payer,payerpayer, payer, payer,payerpayer, payer, payer,payerpayer, payer, payer,payerpayer, payer, payer,payerpayer, payer, payer,payerpayer, payer, payer,payerpayer, payer, payer,payerpayer, payer, payer,payerpayer, payer, payer,payerpayer, payer, payer,payerpayer, payer, payer,payerpayer, payer, payer,payerpayer, payer, payer,payerpayer, payer, payer,payerpayer, payer, payer,payerpayer, payer, payer,payerpayer, payer, payer,payer !!!!?<img data-src=" />



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Note que j’attend toujours qu’Universal me donne la possibilité de lire les fichiers que j’avais acheté sur une plateforme de musique qu’ils avaient ouvert en partenariat avec NRJ, Coca Cola et ecompil, plateforme qui est aujourd’hui fermée.



La musique en question était protégée par des DRM, WMA moisis, et les serveurs de licence ne sont plus en ligne depuis plusieurs années.



Cela fait maintenant depuis bientôt 4 ans que j’attend réponses à mes mails…



Le site en question :

http://www.mynrjcokemusic.fr


Il existe pourtant des fichiers d’occasion qui se revendent très bien et légalement.

Il s’agit simplement des fichiers contenant vos adresses email que les raclures du marketing achetent, vendent, louent pour pourrir nos boites aux lettres.








barlav a écrit :



C’est officiellement accepté cette enculerie de dire qu’on ne garde pas les droits d’écoute qu’on a pourtant acheté en plus du support pourri?

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Tu as acheté le support et le droit de lire ce support. Rien de plus. <img data-src=" />





l’utilisateur doit éviter d’en garder une copie



Oui c’est préférable, mais c’est basé sur quoi techniquement ?



On fait la promesse en cliquant sur “accepter les conditions” ?

(un peu comme les sites de c : oui j’ai 18 ans je le jure)


C’est peut-être moi qui suis con mais…j’ai du mal a associer “fichier numérique” et “bien d’occasion”.



Elle est ou l’usure ? Il n’y a aucune différence entre deux copies d’un même fichier, et sachant qu’un fichier ne se dégrade pas après chaque utilisation…faudrait m’expliquer le concept.








unCaillou a écrit :



Oui c’est préférable, mais c’est basé sur quoi techniquement ?



On fait la promesse en cliquant sur “accepter les conditions” ?

(un peu comme les sites de c : oui j’ai 18 ans je le jure)





Il scanne les disques durs, je crois.

Mais ça n’empêche absolument pas d’en garder une copie ailleurs.



L’idéal serait de pouvoir simplement revendre sa licence.


en voyant l’illustration de l’article sur la page principale, j’ai cru que la législation concernant la revente de fichiers clients avait encore changé <img data-src=" />








Funigtor a écrit :



L’idéal serait de pouvoir simplement revendre sa licence.





Et puis c’est quoi cette licence de toute manière ?

Droit de posséder le fichier ? de le lire ? de l’écouter ?









Krutors a écrit :



C’est peut-être moi qui suis con mais…j’ai du mal a associer “fichier numérique” et “bien d’occasion”.



Elle est ou l’usure ? Il n’y a aucune différence entre deux copies d’un même fichier, et sachant qu’un fichier ne se dégrade pas après chaque utilisation…faudrait m’expliquer le concept.



en quoi un bien d’occasion doit être forcément usé?

occasion, ca veut juste dire que ca a déjà été acheté neuf par un non-commercant qui revend ensuite, rien de plus.









Patch a écrit :



en quoi un bien d’occasion doit être forcément usé?

occasion, ca veut juste dire que ca a déjà été acheté neuf par un non-commercant qui revend ensuite, rien de plus.







Oui mais un bien physique d’occasion, il a forcément des traces d’utilisation etc…



Or un bien numérique, entre un fichier “Neuf” et un fichier “d’occasion”, il n’y a aucune différence.



Si une chanson X est disponible “d’occasion” pour 0,5€ alors que le fichier “neuf” est disponible sur le site de l’éditeur a 0.99€, qui achètera la seconde ? Personne.









Krutors a écrit :



Oui mais un bien physique d’occasion, il a forcément des traces d’utilisation etc…



non.

un exemple : les consoles de jeux, qui se font acheter en masse à leur sortie pour être pour certaines vendues dans la foulée : ce sont des biens d’occasion neufs (neuf car jamais sortis du carton, d’occasion car revendus par un non-commercant).









Krutors a écrit :



Si une chanson X est disponible “d’occasion” pour 0,5€ alors que le fichier “neuf” est disponible sur le site de l’éditeur a 0.99€, qui achètera la seconde ? Personne.





Bha le fichier “neuf” est disponible en quantité “illimité” alors que la quantité de titre d’occasion sera limitée.









cactusbidon a écrit :



Sachant qu’un CD peut durer une bonne dizaine d’année





Un CD pressé (ceux que l’on achète dans le commerce avec un contenu dessus - sauf peut être des distributions linux achetées avec la presse ? ) tiendra beaucoup plus longtemps. mes premiers ont 25 ans et ont pas mal été écoutés et n’ont pas bougé d’un poil.

Côté marketing, le CD pressé a été annoncé comme pouvant tenir 100 ans. On n’a plus qu’à attendre pour vérifier ;-)



De toutes manières, tant qu’ils n’indiquent rien dans la loi sur les transmuteurs grognons de Bluxte, je ne crains rien.



Bon, les ayants-droits dans leur logique toute tordue veulent gagner de l’argent sur les 2 tableaux : vendre un produit et interdire la revente ou palper du blé une 2ème fois.



Le fichier audio/vidéo assimilé à vol lorsqu’il s’agit d’une copie de contrefaçon ou du piratage.



Ce même fichier audio/vidéo acquis légalement ne serait plus un bien que l’on pourrait revendre grâce à l’intervention du Saint Ayant-Droit.





« Si vous perdez ou abimés des copies physiques, vous devriez repayer pour le remplacer. Vous ne pouvez pas perdre ou casser un contenu internet, et si vous perdez votre appareil (PC, tablettes, etc., NDLR) de nombreux services vous permettront de recharger ce contenu gratuitement »





Torrent ? Emule ? … Play Store ou Itune avec le compte qui va bien.

Mais pour les nombreux services légaux … je ne vois pas trop.



Que l’on ne me parle pas d’Ultraviolet, c’est une vraie salop !



D’ailleurs qui oserait l’installer sur son PC, j’ai vu l’engin … heeu comment dire … non. Ma tablette m’a fait la gueule (et ma femme du coup).



Ce n’est clairement pas fait pour la paix des ménages ce bousin.





Le Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique planche dessus depuis des mois entre les murs du ministère de la Culture





J’aimerais savoir pourquoi le débat et les lois qui vont en découler son au sinist(è)re de l’inculture au lieu de l’industrie et le commerce.



Parce que question “proximité” / “lobbing” avec les ayants-droits, on n’a pas encore vu mieux que ce ministère à l’improductivité légendaire surtout pour la défense du consommateur.




« Forcer les créateurs afin de permettre la revente de contenus sur Internet les conduirait à une augmentation sensible des prix voire à décourager à proposer des modèles flexibles en ligne »





Quand c’est mauvais normal de vouloir s”en séparé,le principe du droit d’auteur est le suivant ma pensée créatrice est tellement géniale qu’on s’arrache mon produit.