Mozilla jette l'éponge : Firefox gérera les DRM dès cette année

Bitter Sweet Symphony
Logiciel 5 min
Mozilla jette l'éponge : Firefox gérera les DRM dès cette année

Mozilla abandonne le combat contre les DRM. Dans une annonce faite hier soir, la directrice de la fondation, Mitchell Baker, précise que la décision est le résultat d’une nécessité dictée par le marché. Cependant, l’acceptation du standard EME du W3C représente une série de camouflets car certains aspects ont bien du mal à cadrer avec la mission que s’est donnée Mozilla.

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Les EME, ce standard trouble-fête 

Les EME, pour Encrypted Media Extensions, sont un standard du W3C pour normaliser la gestion des DRM par les sites web et les navigateurs. L’objectif du Consortium est d’en finir avec les plugins tiers tels que Flash et Silverlight pour que les droits numériques soient gérés au sein d’une infrastructure commune et dont le comportement est prévisible. Du moins en théorie.

 

Internet Explorer 11, Chrome et Safari gèrent ces EME, mais ce n’est pas le cas de Firefox. Deux points en particulier causaient un vrai problème à l’éditeur, qui a toujours milité pour les logiciels libres et un équilibre entre la protection des contenus et celle des consommateurs. Or, pour Mozilla, les EME protègent surtout les contenus, donc les entreprises qui se trouvent en arrière-plan, au détriment de l’internaute, surtout à cause d’un composant en sources fermées requis pour lire le contenu protégé.

Une décision nécessaire 

Mais nécessité fait visiblement force de loi. Dans son explication publiée hier soir, la directrice Mitchell Baker indique que les EME seront pris en charge par Firefox dans une prochaine mouture. Ce qui implique pour la fondation d’annoncer publiquement qu’elle renonce au combat contre les DRM, mais qu’elle va devoir également inclure du code propriétaire et fermé au sein de Firefox. Dans le cas présent, l’éditeur indique avoir noué un partenariat avec Adobe pour obtenir le composant idoine, nommé Content Decryption Module (CDM).

 

Car si les EME représentant une infrastructure commune, le CDM est le lecteur proprement dit. La définition du standard au W3C impliquait que les sources de ce composant crucial soient toujours fermées, les éditeurs de contenus craignant que leurs flux puissent être piratés. Pour compenser l’arrivée de ce code fermé, Mozilla a retenu une solution hybride : le composant ne sera téléchargé que lorsqu’il sera requis, et après validation par l’utilisateur. L’ensemble fonctionnera à la manière d’un plugin manquant et dont Firefox suggère l’installation. Pour Mozilla, cela évite de fournir ce code de manière intégrée avec son navigateur.

 

w3c eme drm

Le code fermé ne sera pas directement intégré dans Firefox 

Comme l’explique également le directeur technique de Mozilla, quelques aménagements ont été faits autour du CDM pour éviter que son comportement puisse poser des problèmes. Il sera donc isolé dans son propre espace mémoire (sandbox), sans possibilité de communiquer avec le disque dur de l’utilisateur, ni avec le réseau. Le CDM ne pourra agir que sur la page en cours. Ces efforts d’isolation se retrouvent également dans le fonctionnement du CDM qui, normalement, se sert d’une référence unique pour identifier la machine. À la place, Mozilla fournira un identifiant par site pour empêcher notamment qu’un suivi puisse être fait dans la session de navigation.

 

Côté Mozilla, ce combat ressemble très largement à celui contre le H.264. L’éditeur s’était largement élevé contre ce codec vidéo à cause notamment de la montagne de brevets qui l’accompagnait. Pourtant, à cause d’une utilisation toujours plus intensive de ce format, Firefox Mobile avait fini par le prendre en charge, avant que le changement ne soit répercuté sur la version classique. Le codec n’est pas directement intégré dans le code, le navigateur s’appuyant sur le système d’exploitation et son architecture multimédia.

Pression pour Mozilla, un échec pour l'EFF                                                                         

Or, on peut sentir chez Mitchell Baker que la situation est équivalente : l’accumulation de la pression a fait basculer Mozilla. La problématique pour l’éditeur était dans tous les cas simple, puisqu’un refus obstiné aurait probablement conduit à une chute des parts de marché du navigateur. Baker pense en effet que les internautes suivront dans tous les cas le contenu. Si ce dernier n’est pas lisible dans Firefox mais qu’il l’est dans Internet Explorer, Safari et Chrome, la directrice estime que cela conduira une partie des utilisateurs à abandonner le panda roux. En définitive, Baker se sent incapable de faire changer seule la direction prise par l’ensemble de l’industrie et Firefox se trouvait en danger d’en faire les frais.

 

Mozilla va donc laisser passer la gestion des DRM au sein de Firefox, et personne au sein de l’éditeur n’est heureux de le faire. Cela n’empêche pas l’Electronic Frontier Foundation de regretter ce choix, même si elle reconnait que Mozilla ne l’a pas fait de gaité de cœur. Pour l’EFF, les EME ne changeront cependant rien au problème : tout en n’empêchant pas le piratage des contenus, ils entrainent une baisse de la sécurité pour les internautes, à cause des sources fermées.

« Défendre et promouvoir un web ouvert » 

L’EFF n’est en résumé pas d’accord avec Mitchell Baker quand elle parle de nécessité car c’est justement le fait de céder à ces pressions qui change l’industrie dans une direction qui convient aux majors. Elle conclut : « Mozilla et le W3C sont tous deux des organisations dont les missions sont de défendre et de promouvoir un web ouvert. Les deux sont maintenant engagées envers un système de contrôle des contenus vu comme une violation de ces principes par de nombreux internautes. »

 

On remarquera enfin que la manière de procéder de Mozilla en dit long sur l’ambivalence de la situation. Car si d’un côté Mitchell Baker annonce avec force détails les raisons de cette décision, les travaux ont été menés dans le plus grand secret. La solution n’est pas prête, mais Firefox sera équipé des EME plus tard dans l’année et le partenariat avec Adobe est déjà en place. L’éditeur rappelle cependant dans une FAQ qu’il cherche toujours à mettre en place des solutions alternatives aux DRM. Cependant, d’ici à ce que lesdites alternatives puissent être mises en place, il souhaite que les utilisateurs aient le choix d’accéder aux contenus protégés.

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