Dans une affaire jugée le 30 avril, la Cour de justice de l'Union européenne a expliqué à l’ensemble des pays européens qu’ils ne peuvent exiger d’un prestataire Internet l’installation d’une filiale ou d’une succursale locale. La décision confirme donc l'impossibilité pour le ministère de la Culture de trouver une solution contraignante pour inciter Netflix à s’installer en France.
UPC est une société qui fournit des bouquets de TV payantes dans plusieurs pays européens depuis le Luxembourg. Lors d’un conflit avec plusieurs abonnés en Hongrie, les autorités locales avaient exigé d’UPC des informations relatives aux relations contractuelles avec l’un des clients. UPC avait refusé, arguant de son siège au Luxembourg.
La Hongrie lui avait infligé malgré tout une amende. Saisie du dossier, la CJUE a considéré que les autorités hongroises sont parfaitement habilitées à surveiller l’activité d’UPC en Hongrie. Spécialement, elles sont en droit de subordonner cette prestation au respect de conditions spécifiques au secteur des communications électroniques. Du coup, résument les services de la CJUE, « les autorités nationales peuvent demander aux entreprises les informations nécessaires pour vérifier le respect des conditions relatives à la protection des consommateurs, lorsqu’elles reçoivent une plainte ou qu’elles mènent une enquête de leur propre initiative. »
Liberté d'établissement
Dans le même temps, comme l’a noté Alexandre Archambault (@AlexArchambault), la CJUE a réaffirmé qu’un État membre ne peut exiger d’un prestataire Internet l’installation d’une filiale ou d’une succursale locale : « Une disposition de droit national selon laquelle une entreprise établie dans un autre État membre doit créer un établissement stable dans l’État membre où elle prétend fournir des services de communications électroniques méconnaît l’interdiction (…) de toute restriction à la libre prestation de services ».
La mesure avait finalement été anticipée par Aurélie Filippetti qui, au Figaro, avait reconnu qu’« aucune contrainte ne peut s'appliquer pour faire venir chez nous tel ou tel acteur. » La ministre de la Culture témoignait ainsi de son impossibilité à forcer Netflix à s'installer dans nos frontières.
Pour le cas de la plateforme américaine, la locataire de la Rue de Valois a heureusement d’autres mesures pour charmer l’opérateur aux douceurs de la réglementation française. En maniant la carotte et le bâton.
En janvier dernier, par exemple, elle expliquait en ces termes au Journal du Dimanche que « la directive SMA [services de médias audiovisuels] va être réouverte, et la France demandera que les règles de régulation s'appliquent désormais au pays de consommation et non pas au pays du siège, comme ce sera le cas pour la TVA dès l'année prochaine. Une réponse législative pourra aussi être envisagée, comme c'est le cas avec Amazon sur la gratuité des frais de port, afin de rétablir les conditions d'une concurrence équitable. La France a réaffirmé l'année dernière, lors des négociations sur le libre-échange entre la France et les États-Unis, que l'exception culturelle était un principe intangible. Nous maintiendrons cette ligne rouge. »
Résultat des courses, Netflix proposera bien son service en France, mais depuis le Luxembourg.