Suite à notre changement de nom, qui s'accompagne du changement de l'URL principale du site, nous avions anticipé une baisse de notre référencement au sein du moteur de recherche de Google le temps que tout soit correctement pris en compte. Mais cette opération a surtout été l'occasion de voir le comportement d'Analytics, l'outil de mesure d'audience du géant du web, et notamment son étrange gestion des sources.
Universal Analytics, la prochaine évolution de l'outil de Google
Si comme nous l'avons évoqué ce week-end, un changement de nom n'est pas une pratique si peu courante, elle s'accompagne de certains passages obligés. Parmi eux, la fameuse crainte de l'algorithme de Google et de sa capacité à bien prendre en compte (ou non) la redirection mise en place ainsi que la déclaration faite au sein des « Webmaster Tools ».
Comme nous l'avons déjà dit, pour nous ce n'était pas spécialement un problème puisque le moteur de recherche est loin de représenter notre principale source d'audience. Pour sa part, Google News ne nous référence pas spécialement, et le fait que notre financement vienne désormais en partie de nos lecteurs nous rend toujours plus indépendant de ce genre de craintes. Pour autant, cette phase de transition constituait pour nous un moment intéressant à analyser.
Google juge, partie et bourreau potentiel des sites web
En effet, comme nous l'avions déclaré l'année dernière, nous utilisons en partie Google Analytics pour notre mesure d'audience. Gratuit, cet outil est plutôt complet et nous y avons un historique assez long. Il a néanmoins une mauvaise image puisqu'il s'agit au passage d'un tracker du géant du web mis en place sur une majorité de sites web par les éditeurs eux-mêmes, de la même manière que les fameux boutons Facebook ou Twitter. Mais il reste néanmoins nécessaire pour nous de mesurer l'audience du site afin de pouvoir l'analyser et comprendre le comportement de nos lecteurs.
Outre la question du blocage ou non des outils de ce genre (que nous proposons à nos abonnés), il reste une problématique de fond qui est assez peu analysée alors qu'elle est pourtant majeure : est-ce que Google ne se sert pas de l'omniprésence d'Analytics pour surestimer l'importance de Google dans ses résultats ? Celui-ci ayant déjà quasiment un droit de vie et de mort sur les sites concernant leur positionnement au sein de ses outils, cela pourrait commencer à faire beaucoup de pouvoirs concentrés dans une seule et même société.
Nombreux sont ceux qui répondront « Oui » sans même chercher à le justifier. Le changement d'URL du site était l'occasion pour nous de chercher à le vérifier. Car avec des outils comme Alexa qui nous placent à 10/15 % de visiteurs provenant des moteurs de recherche ou comme Xiti qui nous place à 60 % d'accès directs, contre Analytics qui indique qu'il est à l'origine du tiers de notre audience, il n'est pas toujours simple d'y voir clair.
PC INpact devient Next INpact... et les accès directs explosent
Avec le changement d'URL du site, il y avait un phénomène que nous avions anticipé : une baisse de l'audience, mais surtout, une baisse drastique de celle provenant de Google. En effet, dans la phase de transition, les anciennes URL doivent être remplacées par les nouvelles au sein de l'index du moteur de recherche, et il y a donc toute une phase plus ou moins longue pendant laquelle le site est forcément moins visible. Mais nous nous attendions alors à deux résultats possibles :
- Google baisse dans nos résultats, les autres sources stagnent
- Google baisse dans nos résultats, les autres sources grimpent
En effet, si Google ne surestime pas son importance dans nos audiences, la baisse constatée est sans influence sur les autres résultats. Par contre, si Google a tendance à être trop optimiste, les visites qui apparaissaient précédemment comme issues de Google de manière trompeuse devront apparaître d'une manière ou d'une autre. Et c'est exactement cela qui s'est passé :
La transition vers le domaine principal Next INpact s'est effectuée en début de semaine dernière. On voit alors que les visites issues de Google ou d'un accès direct étaient à peu près au même niveau, ce qui se vérifie dans nos résultats depuis bien longtemps. Avec le changement de domaine, nous n'avons finalement pas constaté de chute énorme de l'audience, bien que nous soyons en période de vacances scolaires, dans le pire des cas, il est question de 7 à 8 %. Par contre, on constate une baisse importante de visites depuis Google.
Comment expliquer cela ? Et bien assez simplement si l'on en croit ce graphique : les visites qui étaient auparavant attribuées au moteur de recherche, sont désormais attribuées à des accès directs. Ainsi, le total évolue peu, mais leur perception est tout à fait différente et il y a désormais un rapport de 1 à 2,5 entre les deux chiffres. Le géant du web n'est par contre pas le seul touché puisque d'autres sites référents voient aussi leurs statistiques baisser au profit des accès directs, mais les rapports et l'impact sur les chiffres sont bien moins élevés.
Le réglage par défaut d'Analytics minimise les accès directs
Google déciderait-il sciemment de mentir ? Impossible à dire, mais on peut tout de même constater qu'il dispose d'un certain optimisme concernant les accès depuis des sites tiers, qui joue assez largement en sa faveur pour ce qui est de l'analyse des sources. Un point qui est plutôt problématique pour un outil dont on attend de la précision plutôt qu'un tel biais.
Est-ce pour autant une fatalité ? Non, parce que tout cela est avant tout une histoire de cookies. En effet, Google utilise plusieurs paramètres pour décortiquer les audiences au sein de ses scripts, et les enregistre de cette manière. L'un d'entre eux, __utmz, concerne les différentes sources d'un visiteur, mais il affiche une durée de vie de pas moins de six mois. Ainsi, la réinitialisation des cookies sur Next INpact suite au changement de domaine a sans doute permis de nettoyer les choses sur le coup. Et si l'on constate aussi les écarts relevés sur plusieurs jours, cela devrait finir par se réguler avec le temps. Nous devrions donc à terme retrouver les ordres de grandeur précédents.
Un problème qui n'a rien de nouveau, qui peut être résolu (en partie ?)
En 2012, Emmanuel Parody de ZDNet (le « P » de CUP Interactive), sensibilisait déjà sur la question en mettant en avant une analyse de François Derbaix. Il évoquait alors ce cookie d'attribution des sources et sa durée de vie par défaut de six mois, réduisant d'autant la possibilité de voir une visite considérée comme un accès direct. Il était alors préconisé de réduire sa durée de vie à un jour pour disposer de résultats plus fiables. Cela peut être mis en place en utilisant la méthode _setCampaignCookieTimeout.
Est-ce que cela sera suffisant ? Nous verrons bien. Nous continuerons à analyser nos chiffres et à faire quelques essais dans les semaines à venir pour ajouter des conclusions à nos premières analyses. Mais quels que soit les résultats, le problème de fond restera le même : l'importance énorme de Google pour ce qui est des solutions d'analyses des statistiques contre laquelle il semble compliqué de lutter.
La mesure d'audience : une question qui concerne du monde, mais qui préoccupe peu
Car Analytics est l'une des rares solutions permettant de disposer gratuitement de statistiques complètes, avec une bonne ergonomie et une évolution constante. Les autres acteurs du secteur ont pour la plupart décidé de se focaliser sur des services coûteux dédiés aux professionnels ou très incomplets lorsqu'ils sont utilisés gratuitement, laissant ainsi tous les sites n'ayant pas les moyens faire face à Analytics et lui seul.
Il existe néanmoins des alternatives. Alexa, qui appartient à Amazon, propose notamment un outil de mesure d'audience à la manière d'Analytics, gratuit ou payant. Des outils open source comme Piwik peuvent aussi être utilisés. Ils restent néanmoins assez minoritaires pour le moment, une situation qui parait assez identique à celle que l'on constate sur le marché des moteurs de recherche, où la domination de Google pose de plus en plus de soucis.
Espérons donc que cela pourra évoluer avec le temps et la prise de conscience de ces problématiques, tant du côté des utilisateurs, que des éditeurs, que des concurrents de Google. Sans quoi, celui-ci pourra continuer à faire comme il le souhaite, et aller vers un suivi de plus en plus poussé des internautes, sans vraiment avoir à rendre de comptes.