Quelles sommes puisées sur la redevance pour copie privée sont consacrées par les sociétés de gestion collective, aux actions de défense, de promotion et d'information ? Questionnée à deux reprises, la ministre de la Culture a fini par répondre au député Lionel Tardy, non sans mal.
En 2013, le député Lionel Tardy demandait à la ministre de la Culture une ventilation précise des sommes provenant de la copie privée et affectées au conformément à l’article L. 321-9 du code de la propriété intellectuelle. Cet article indique en effet que les sociétés de perception et de répartition des droits (SPRD) consacrent 25 % des sommes collectées sur la copie privée - grosso modo 50 millions chaque année - aux actions de défense, promotion et informations engagées dans l'intérêt des créateurs et de leurs œuvres. Cette mesure est très vaste puisqu’elle permet aussi de financer les frais engagés lors des actions en justice (actions en contrefaçon).
Aurélie Filippetti répondait une première fois qu’elle était bien démunie : elle « ne dispose (…) que de données chiffrées globales, correspondant aux trois grandes catégories d'actions que sont les aides à la création d'une part, les aides à la diffusion du spectacle vivant et les aides à la formation des artistes d'autre part ». Problème, la ministre se gardait de fournir ces données même globales, ce qui a entrainé une nouvelle question, plus insistante, du député.
La ministre a finalement donné ces informations ce 8 avril, tableau à l’appui.
Et pour le détail des affectations voire des frais ponctionnés ici et là par les SPRD dans la gestion de ces flux ? Dans sa réponse, La Rue de Valois renvoie Lionel Tardy aux rapports que « les SPRD communiquent chaque année au ministère de la Culture et de la Communication », rapports décrivant « une information sur la ventilation des montants versés par catégorie d'actions. »
Des rapports toujours difficilement accessibles
Elle se garde cependant de préciser que ces rapports sont toujours inaccessibles aux communs des mortels : à l’issue de notre procédure CADA, le ministre de la Culture nous indiquait benoitement que les rapports sur l’affectation de la copie privée ne sont pas copiables et transférables. Le citoyen, même député, désireux de connaître ces affectations doit donc se déplacer physiquement au ministère pour consulter des milliers de pages au format papier. Ce que NextInpact a fait, sous la surveillance d’une archiviste, assise à un mètre de nous… (notre compte rendu).
Précisons qu’en 2012, aux Rencontres de Dijon, le président de la SACEM avait expliqué sans nuance que l’ « une des raisons pour lesquelles un grand nombre de parlementaires, c’était à dire des élus nationaux, se sont mobilisés quand on leur a demandé de le faire, c’est que la copie privée, ils ont en tout cas un bénéfice : c’est celui des 25 % qui contribuent dans leur commune, dans leur département, dans leur région, à aider ce qui [soutient] la création (…) notamment tout ce qui tourne autour du spectacle vivant. »
En clair, la copie privée est une courroie importante entre les SPRD et les députés-maires par exemple, puisque les festivals organisés dans leur circonscription sont arrosés par la copie privée. Jean-Noël Tronc applaudissait ce mécanisme, présenté comme « un levier important de pédagogie, de sensibilisation, on peut même dire de solidarité entre décideurs publics et créateurs autour de la copie privée. »