Au 1er avril, un site unique devait diffuser les liens d’intérêts existant entre les laboratoires pharmaceutiques et les professionnels de santé. Sauf qu'au 10 avril, toujours rien. Ce qui laisse les citoyens intéressés par ces liens d'intérêts dans le flou le plus total. Nous avons contacté le ministère de la Santé pour connaitre les raisons de ce retard.
Pourquoi un tel retard sur cette dernière étape du Sunshine Act à la française ? Du côté du cabinet de Marisol Touraine, l'explication est simple : « En raison du remaniement, les courroies de transmission et les services en cette période-là étaient tout simplement stoppés en raison de l’incertitude ». Cependant, nous ajoute encore le ministère, la nomination des ministres et des secrétaires d’État devrait maintenant débloquer la situation. « La date du 1er avril est intervenue à une période où ces courroies étaient rompues. Nous n’avions pu donner ordre pour la mise en ligne. Cette mise en ligne est désormais imminente. Tout est prêt, il suffit que la situation se débloque au plan institutionnel. »
Une analyse plus contrastée du côté du Formindep
Du côté des professionnels de santé, le Formindep, association de médecins favorable à la transparence de ces liens, l’analyse est plus contrastée. Philippe Masquelier, son président, nous assure ainsi avoir testé une version parfaitement fonctionnelle de ce dispositif fin 2013 : « Le Formindep avait été appelé à participer à l’élaboration de ce site en décembre dernier. Nous avions vu des démonstrations avec le ministère et le site était bien fonctionnel. Ce retard n’est donc visiblement pas un problème technique. »
L’association remarque surtout qu’au fil des textes orchestrant cette obligation de transparence, les contraintes ont changé de camp. « Les projets de décrets initiaux étaient beaucoup moins favorables aux intérêts des firmes » (voir spécialement cet édito). Et Philippe Masquelier, qui dénonce une proximité forte des industriels avec le ministère de la Santé, cite cet exemple d’épluchage en règle du Sunshine Act : « Normalement, la mise en ligne devait intervenir dans les 15 jours des signatures de convention entre les labos et les professionnels de santé ». Cependant, un projet de décret en examen au Conseil d’État, signé du ministère de la Santé, veut décaler ce calendrier de plusieurs mois cette publication.
Un nouveau projet de décret ombragé
Ce nouveau décret en gestation veut aussi limiter la transparence aux avantages consentis aux seules personnes. Seront ainsi exclus de cette obligation, les liens des labos avec les « associations, établissements, fondations, sociétés, organismes ou organes ». Une mesure qui, confirmée, provoque déjà la colère du Formindep : « Si tel devait être le cas, cela signifie que le financement des sociétés savantes, des associations hospitalières, associations de patients, organismes de formation professionnelle par les firmes commercialisant ou produisant des produits de santé ne sera pas rendu public. L’influence des firmes pourra ainsi continuer à s’exercer en toute opacité sur ces secteurs clés comme elle s’était déjà exercée dans l’affaire du Médiator ».