Afin de punir les auteurs de « revenge porn », les autorités du très conservateur État de l’Utah viennent d’introduire un nouveau délit de « distribution d’images intimes ». Les personnes diffusant sur Internet des images de nu d’une de leur ex-relation peuvent ainsi se voir sanctionnées à hauteur d’un an de prison et 2 500 dollars d’amende. Explications.
Le « revenge porn » inquiète de plus en plus d’élus américains. En effet, après l’État de Californie, c’est au tour de l’Utah d'en passer par la loi afin d’encadrer ce phénomène relativement nouveau. Le principe ? Publier sur Internet des photos ou vidéos d’un ou d’une ex petit(e) ami(e), de préférence dans une position sexuellement très explicite, le tout dans le simple but de l’humilier. Certains sites spécialement prévus à cet effet ont ainsi vu le jour outre-Atlantique, demandant à leurs utilisateurs de préciser obligatoirement le nom, l’adresse et l’âge de leurs victimes, tout en rajoutant des liens vers leurs pages Facebook notamment.
Après avoir été adopté successivement par les députés et sénateurs de cet État fédéré, le projet de loi « H. B. 71 » a été promulgué lundi dernier par le gouverneur de l’Utah, Gary Herbert. Le texte (PDF) introduit un nouveau délit de « distribution d’images intimes » au sein du Code pénal local. Toute personne communiquant à un tiers une photo ou vidéo de nu (parties génitales et/ou poitrine pour les filles) d’une personne âgée d’au moins 18 ans commet une telle infraction, à trois conditions cumulatives :
- Si la personne que l’on voit sur l’image n’a pas donné son accord à cette diffusion,
- Si l’image a été prise ou transmise alors que son sujet pouvait « raisonnablement » s’attendre à ce qu’elle reste privée,
- Si la diffusion de l’image cause « une détresse ou un préjudice émotionnel réel » à la victime.
Un nouveau délit passible d'un an de prison et de 2 500 dollars d'amende
Les opérateurs, les fournisseurs d’accès à Internet et les hébergeurs pouvant potentiellement être considérés comme des « personnes » distribuant de telles images, la loi prend un soin particulier à les écarter expressément du dispositif, à certaines conditions. L’immunité d’un hébergeur peut par exemple tomber à partir du moment où la diffusion d’images intimes a été intentionnellement encouragée ou aidée.
Le texte vise surtout à lever l’un des principaux obstacles juridiques à ce phénomène : la plupart du temps, les victimes ont donné volontairement les images, ou bien se sont laissées prendre en photo, n’imaginant pas le sort que celles-ci pourraient ensuite connaître... La nouvelle infraction est un délit de classe A, ce qui signifie que celle-ci est passible d’une peine maximale d’un an de prison et de 2 500 dollars d’amende.
Rappelons enfin que les autorités américaines ont arrêté en décembre dernier l’administrateur d’un site de Revenge porn, lequel attend désormais son procès. Kevin Bollaert, 27 ans, doit en effet répondre de pas moins de 31 chefs d’accusation, dont usurpation d’identité, harcèlement et extorsion de fonds. L’intéressé a par ailleurs été condamné il y a une quinzaine de jours à verser, solidairement avec un autre administrateur, 385 000 dollars de dommages et intérêts à une victime de son site (voir notre article, ainsi que notre interview de l’avocat de la victime).