Des inspecteurs de l’Éducation nationale s'opposent au « permis Internet »

Des bâtons dans les roues

Alors que la formation aux outils numériques est déjà prévue par le Code de l’éducation, des élèves de CM2 ont l’opportunité de passer depuis quelques mois un « permis Internet pour les enfants ». Sauf que l’opération, menée en coopération entre la Gendarmerie nationale et l’assurance AXA, provoque l’ire de certains professionnels de l’Éducation nationale. Ces derniers appellent tout simplement à son boycott.

 

En décembre dernier, la gendarmerie nationale et AXA Prévention lançaient en grande pompe le coup d'envoi de l’opération « Permis Internet pour les enfants ». L’objectif ? Sensibiliser en trois ans un million d’élèves de CM2 (ainsi que leurs parents) vis-à-vis des règles de prudence à respecter sur Internet : rencontres virtuelles, cyberharcèlement, respect de la vie privée, achats en ligne, téléchargement illégal, etc.

 

Concrètement, les gendarmes commencent par venir distribuer des « kits pédagogiques » - conçus avec l’assurance - dans les écoles ayant souhaité participer à l’opération. L’instituteur prend ensuite le relais pour plusieurs leçons, avant que les gendarmes ne reviennent en classe pour faire passer le test, qu'il faut réussir pour obtenir son permis. Une remise officielle du fameux document est prévue en présence des gendarmes, des parents, des enseignants, des élus locaux ainsi que d’un représentant d’AXA.

 

permis internet

Les visées commerciales et pédagogiques de l'opération en question 

Sauf que même si le dispositif a le soutien officiel des autorités, les personnels de l’Éducation nationale n’adhèrent pas tous à cette opération. Dès le 18 décembre, le Sgen-CFDT s'est inquiété des visées et de la portée de l'initiative, et a demandé à l'exécutif des explications. Le syndicat a été suivi par le SE-Unsa, qui a lui aussi écrit à Vincent Peillon, le 24 janvier, pour l’interpeller sur ce qu’il perçoit comme une opération doublement critiquable. Sur la forme d’abord, puisqu’une entreprise privée s’immisce dans une mission de service public bien particulière : l'éducation. « L’objectif n’est pas uniquement de faire de la prévention, mais bien de proposer aussi des produits commerciaux qui dépassent largement le seul cadre de la protection des enfants » regrette à cet égard le syndicat dans sa lettre (PDF).

 

Sur le fond, ensuite, l’incitation à l’achat de produits commerciaux étant selon l’organisation volontairement poussée par une « pédagogie de la peur ». « Le "permis Internet AXA" réussit le tour de force de former aux dangers d’Internet sans initier aux usages (...). Éduquer à l’internet et au numérique s’inscrit dans un temps pédagogique long, attaché à une vraie éducation à la culture informationnelle dès le primaire » poursuit ainsi la lettre. Alors que Vincent Peillon a largement insisté sur le fait qu’il souhaitait faire entrer l’École dans l’ère du numérique, le syndicat lui rétorque que cette opération est « une mauvaise solution de facilité ».

Peillon temporise mais n'empêche pas l'appel au boycott

Un mois plus tard, le cabinet du ministre a répondu au syndicat qu’il ne fallait pas s’inquiéter : « Je peux vous assurer que nous sommes très vigilants à ce que l’école reste un lieu libéré de toutes pressions économiques et commerciales » peut-on ainsi lire dans ce courrier daté du 28 février (PDF). Mais si les services de Vincent Peillon promettaient que les académies apporteraient « la plus grande attention et une extrême vigilance aux opérations liées à ce "permis Internet" », aucune remise en cause du dispositif n’était faite. Il était en outre rappelé que l'initiative ne dépendait que de l’accord des écoles.

 

Si le SE-Unsa n’a pas caché sa déception face à la réaction du ministre de l’Éducation nationale, le syndicat a finalement préféré s’en remettre au choix des instituteurs, appelant symboliquement à « la vigilance ». Mais du côté du syndicat d’inspecteurs SI.EN UNSA, c’est un appel au boycott bien plus explicite qui a été lancé mardi. L’organisation demande en effet aux inspecteurs de l’Éducation nationale de « ne pas promouvoir le projet de "permis Internet" proposé par la Gendarmerie Nationale et de la compagnie d'assurances AXA ». Le dispositif est une fois de plus présenté comme « diamétralement opposé aux démarches préconisées dans le cadre du socle commun des compétences, des connaissances et de la culture ».

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