Copie privée : 1500 professionnels exonérés et bras de fer avec Apple

Une pomme de discorde

Selon les derniers chiffres fournis par Copie France, il y a désormais 1500 (1508) professionnels exonérés de redevance pour copie privée. C’est environ 300 de moins qu’en janvier 2014, date du dernier relevé. Ces chiffres sont fournis alors qu’Apple poursuit son litige avec les sociétés de gestion collective sur le thème des tablettes.

liste exonération copie privée

 

Il y a désormais en France 1500 professionnels qui ont signé une convention d'exonération avec Copie France, l'organisme collecteur de la RCP. À titre de comparaison, ils étaient 1711 en mai 2012, 1872 en août 2012, 1600 en janvier 2013 et 1700 en avril. On voit donc que le nombre de ceux qui sont en droit d’acheter sans avoir à supporter la copie privée est stable, voire régresse comme le montre les derniers relevés.

Pourquoi un si faible niveau ?

Ce chiffre est symptomatique : le processus mis en place par la loi sur la copie privée de 2011 ne fonctionne pas vraiment. Plusieurs raisons : d’une part, il y a déjà un problème de publicité puisque les pros ne sont pas informés de cette possibilité. Certes, un arrêté publié récemment devrait changer la donne. À compter du 1er avril prochain, les acheteurs non particuliers seront informés sur leurs factures éditées par les détaillants de la possibilité de se faire exonérer. D’autre part, l’exonération est d’une utilité relative puisque chez Copie France, comme expliqué dans le passé, il n’existe pas de listing indiquant nommément les distributeurs vendant sans copie privée. Conclusion : l’exonéré doit se débrouiller pour trouver un distributeur qui vend sans copie privée ou se lancer ensuite dans une procédure de remboursement, impliquant des moyens supplémentaires et donc un coût pour l’entreprise.

Des hôpitaux, TMG, des universités...

Dans la liste des 1500 professionnels (PDF), on notera la présence une nouvelle fois de plusieurs sociétés travaillant dans le secteur de la création comme France Télévisions Distribution, TV5 Monde ou encore Trident Média Guard, le fameux prestataire des ayants droit qui pratique les relevés d’adresses IP en amont de la Hadopi. On note aussi des universités telles Lyon 2 ou Caen, des institutions comme le Sénat, le ministère de la Défense ou celui de l’Intérieur, l’Institut national de la propriété intellectuelle. Il y a aussi des hôpitaux, très consommateurs de supports vierges pour graver des IRM, avec notamment la Timone à Marseille. Signalons aussi la présence d’églises évangéliques…

Un système qui reste grippé

De fait, les professionnels qui ne sont pas exonérés sont privés de possibilité de remboursement, ou presque. Pourquoi ? Simple : rares sont les distributeurs à fournir une facture mentionnant le montant de la copie privée. Normalement cette mesure sera obligatoire dès le 1er avril, cependant la constitution du dossier de demande de remboursement aura dans certains cas un coût plus élevé que le montant de la copie privée en cause.  En effet, l’arrêté d’application de la loi sur la copie privée exige que les sociétés devront fournir un extrait K-Bis, or celui-ci est facturé par le greffe 3,11 euros pour une copie sur place, 3,84 euros par courrier et 5,44 euros pour une transmission en ligne. Conclusion : des sommes continueront à être collectées sans avoir à être remboursées par les ayants droit et leurs sociétés de gestion collective.

Le bras de fer entre Apple et les ayants droit se poursuit

Cet état des lieux n’empêche pas Pascal Nègre de se plaindre de la posture d’Apple, selon les propos rapportés par 01Net. « Apple ne veut toujours pas payer pour l’iPad qu’il estime être un appareil professionnel, a expliqué la semaine dernière le numéro un d’Universal Music et président de la société civile des producteurs phonographiques. Ils n’ont jamais payé et leur dette augmente ».

 

Le détail de ce dossier est cependant un peu plus complexe qu'un simple refus pur et bête. Apple a intenté un bras de fer avec les ayants droit estimant que les barèmes des tablettes étaient boiteux par ricochet, pourrait-on dire. Il est en effet calqué sur celui des téléphones mobiles, lui-même victime de vices.

 

Si le barème des tablettes fut très inspiré de celui des smartphones, c'est parce que les ayants droit voulaient taxer au plus vite ces produits, sans faire d'étude d'usage : et pour cause, ces produits déferlaient sur le marché et il fallait les assujetir sans attendre. La commission copie privée l'avait expliqué en ces termes, s'estimant « fondée à considérer que les tablettes tactiles multimédias avec fonction baladeur (…) sont utilisées dans des conditions comparables aux téléphones mobiles permettant d’écouter des phonogrammes ou de visionner des vidéogrammes. » 

 

Sauf que sur ce barème téléphones, les ayants droit avaient fait grimper les montants de la ponction sur les smartphones en s’appuyant sur le volume des copies illicites. Ainsi, plus les internautes « pirataient », plus les ayants droit butinaient des sommes importantes.

 

Le Conseil d’État avait mis un coup d’arrêt à ce drôle de mélange entre copie licite (indemnisée par la copie privée) et les copies illicites (indemnisées par des actions en contrefaçon. Mais un miracle technicojuridique s'est produit : par un tour de passe-passe, le nouveau barème voté en commission copie privée fut très exactement le même que l’ancien, celui mis à l’index par le Conseil d’État. Les sociétés de gestion collective décidèrent en effet du jour au lendemain de purger les copies illicites de leurs calculs tout en tenant compte maintenant de la variable « taux de compression » : plus on compresse, plus on fait de la copie privée. Et voilà comment les barèmes des téléphones mobiles furent votés identiquement au centime avant et après l’arrêt du Conseil d’État.

 

Problème, Apple sait aussi que pour déterminer les taux de copie privée, le Conseil d'État exige une « étude objective des techniques et des comportements » sans se fonder sur « des hypothèses ou des équivalences supposées ». D’où les étincelles qui crépitent autour des tablettes. Toutes ces questions sont désormais dans l'attente d'une nouvelle décision de la haute juridiction administrative.

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