Skype est-il un logiciel ou un opérateur ? Pour les autorités françaises, cela ne fait pas de doute : il s'agit d'un opérateur. Mais l’éditeur, propriété de Microsoft, refuse toujours de se laisser assimiler à autre chose qu’un gros bout de codes.
La question du statut de Skype est posée depuis belle lurette en France. Après quelques étincelles en 2011 et en 2013, l’autorité de régulation des télécoms haussait le ton en informant le Parquet de Paris « d’un manquement possible de la société SKYPE à son obligation de se déclarer en tant qu’opérateur de communications électroniques en France ». Cette procédure suit son cours : selon L’Express, François Molins, procureur de la République de Paris, a ordonné l'ouverture d'une enquête préliminaire. Le dossier est dans les mains de la brigade de répression de la délinquance aux personnes.
Quelle est exactement la problématique ? L’Arcep a dans son viseur la capacité pour l’utilisateur Skype de téléphoner directement vers un fixe. « Ce service consiste à fournir un service téléphonique au public » interprète-t-elle. Or, dans un tel cas, une déclaration préalable est nécessaire comme le veut l’article L. 33-1 du Code des postes et des communications électroniques (CPCE) : « l'établissement et l'exploitation des réseaux ouverts au public et la fourniture au public de services de communications électroniques sont libres sous réserve d'une déclaration préalable auprès de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes ». Faute de déclaration, le contrevenant personne morale s’expose à 375 000 euros d’amende.
Ce statut d’opérateur, s’il est confirmé en France, devrait obliger Skype/Microsoft à acheminer les appels d’urgence, mais aussi et surtout à mettre en œuvre des moyens nécessaires à la réalisation des interceptions judiciaires. Problème : Skype a toujours refusé de se plier aux autorités françaises. Pour mémoire, la société propriété de Microsoft nous avait répondu qu’elle ne s’estimait « pas un fournisseur de services de communications électroniques au sens de la législation française ». Et l’éditeur de souhaiter continuer de « travailler avec l'ARCEP de manière constructive afin de trouver un accord qui garantisse que les gens, où qu'ils soient, puissent continuer à compter sur Skype de la même manière qu’aujourd’hui ».
Skype est l'objet d'autres enquêtes, dont une au Luxembourg, ouverte par l'autorité de protection des données personnelles qui scrute ses relations avec la NSA. Un dossier qui fait ici suite aux révélations du lanceur d’alertes Edward Snowden qui avait mis en évidence des liens intimes entre Microsoft et les autorités américaines.