Alors que Vivendi attend impatiemment des offres concrètes pour sa filiale SFR, les prétendants s'activent. Si Bouygues Telecom pourrait bien déposer une offre sur la table malgré les complications que cela risque d'engendrer en matière de concurrence, Numericable compte bien rafler la mise. Et il ne manque pas d'arguments.
SFR sera-t-il bientôt racheté ou Vivendi se contentera-t-il de s'en séparer en le lançant en bourse ? Tous les indicateurs nous dirigent pour le moment vers une acquisition, ceci malgré la complexité de l'affaire, l'opérateur ayant une valeur située entre 10 et 15 milliards d'euros. Selon des rumeurs très insistantes, Bouygues Telecom rêve de se marier avec SFR, le transformant en un géant à la fois dans le fixe et le mobile, capable de concurrencer Orange et d'écraser Free, tout en réalisant de solides économies grâce aux synergies des deux groupes. Mais les conséquences sur l'emploi risquent d'être importantes, et ne parlons même pas de la problématique de la concurrence.
L'autre grand scénario, que nous connaissons depuis plus d'un an et demi désormais, est bien entendu le rachat de SFR par Numericable, et plus précisément par son actionnaire principal Altice. Si financièrement, croquer l'opérateur au carré rouge impliquera un endettement relativement important, pour le reste, un tel rapprochement a bien plus de sens et est bien plus crédible que tous les autres. Les conséquences sur l'emploi seront quasi nulles, la concurrence n'en pâtira pas spécialement, et les investissements n'auront pas de raison de s'effondrer. Trois points majeurs qui peuvent convaincre les autorités d'accepter un tel mariage.
Pas de licenciement, et même des recrutements et des investissements
Interrogé par Le Figaro, Patrick Drahi, le patron d'Altice, a affirmé qu'il « s'engageait à ne pas licencier, à conserver les 8500 emplois chez SFR et les 2400 emplois chez Numericable, et même recruter des commerciaux pour le marché des entreprises ». Il faut dire que les principaux emplois de SFR sont dévolus au secteur mobile, alors que Numericable est quasi exclusivement centré sur le secteur fixe. Et Numericable n'a pas caché qu'il comptait capter 30 % du marché professionnel (dominé par Orange et des opérateurs spécialisés), marché qui pèse 6,5 milliards d'euros.
Outre le volet de l'emploi, il y a celui de l'investissement. Là encore, Patrick Drahi assure que des dépenses seront faites, que ce soit pour couvrir 12 millions de foyers d'ici 2017 et 15 millions de foyers d'ici à 2020 grâce à la fibre et son propre réseau, ceci sans compter la présence de SFR dans le secteur du xDSL. L'objectif avoué serait de recruter 6 millions de clients d'ici trois ou quatre ans, ceci afin de faire exploser le chiffre d'affaires de 3 milliards d'euros. On notera toutefois que capter 6 millions de clients en trois ou quatre ans est franchement trop ambitieux, même si Numericable compte abandonner sa marque pour celle de SFR.
Toujours du côté de l'investissement, le néo-milliardaire promet de s'allier avec les industriels français comme Alcatel-Lucent et Sagemcom, que ce soit dans l'Hexagone et pour ses autres sociétés présentes à l'étranger. De quoi satisfaire Arnaud Montebourg, qui a pressé les opérateurs de faire preuve de patriotisme et de soutenir Alcatel, il ne s'agit néanmoins que d'une promesse et non de contrats signés.
Un futur groupe endetté
Selon notre confrère, une ligne de crédit de 15 milliards d'euros a été sécurisée le week-end dernier afin de financer ce mariage gigantesque à l'échelle française. Vivendi pourrait recevoir 11 milliards d'euros tout en détenant toujours près d'un tiers du duo Numericable/SFR. Sur les 11 milliards reversés à Vivendi, « 8 milliards d'euros seraient constitués de dette, montant d'ores et déjà garanti par les plus grandes banques françaises et internationales. Le solde (3 milliards d'euros) serait levé via une augmentation de capital de Numericable, qui serait pour l'essentiel souscrite par Altice, et pour le reste auprès des marchés (750 millions d'euros) » a indiqué une source de BFM Business.
Le duo pourrait cumuler une dette de 10,5 milliards d'euros. À titre de comparaison, la dette d'Orange est de 29,610 milliards d'euros (remboursable sur 9 ans) au 30 juin 2013. Celle du groupe Iliad (Free) est légèrement supérieure à 1 milliard d'euros, tandis que le groupe Bouygues affiche une dette nette de plus de 4,4 milliards d'euros.