En Californie, une cour de district vient de condamner l’hébergeur de fichiers Fileserve à verser plus de 890 000 dollars à une société de production qui l’accusait d'avoir contribué - au travers de ses services - au piratage d'un de ses films. Mais pas sur que la société, basée dans les Îles Vierges britanniques, se plie très facilement à cet ordre...
La juge Audrey B. Collins a rendu son verdict jeudi dernier : l’hébergeur de fichiers Fileserve devra verser un total de 891 019 dollars à la société de production Cowslip Film Partners, soit l’équivalent de 646 650 euros. Une petite partie de cette somme (un peu plus de 21 000 dollars) correspond à des frais de justice, le reste étant tout simplement des dommages et intérêts.
Il était reproché à Fileserve d’avoir porté atteinte au copyright de la société de production, notamment en incitant les internautes à violer ses droits d’auteur relatifs au film American Cowslip. « FileServe est conscient que son site sert à véhiculer des copies illégales ainsi qu’à distribuer de grandes quantités de fichiers contrefaisants. En raison des frais d'adhésion réclamés pour avoir un accès immédiat aux oeuvres protégées hébergées sur ses serveurs, il est un distributeur et un vendeur de fichiers piratés » faisait ainsi valoir la société de production au travers d’une plainte déposée l’année dernière. En somme, la plaignante estimait que le modèle économique de la plateforme de stockage était davantage voué à accueillir des œuvres protégées que les dernières photos de vacances de Madame Michu...
D’autre part, Cowslip considérait que Fileserve avait failli à ses obligations d’hébergeur. La législation américaine veut en effet qu’un contenu signalé comme illicite soit retiré promptement. Ce n’est que si l’intermédiaire n’agit pas qu’il peut voir sa responsabilité engagée. Or la société de production affirmait avoir notifié diverses violations à Fileserve, en vain.
L'équivalent de plus de 43 dollars par téléchargement
L’hébergeur de fichiers n’a cependant guère pris la peine de se défendre. Il n’a en effet pas répondu à la plainte, et s’est encore moins présenté lors du procès... Du coup, la juge en charge du dossier n’a pu que constater la validité des preuves fournies par Cowslip et accorder à la société de production les dommages et intérêts qu’elle avait réclamé lors d’une précédente audience.
Fait intéressant : pour calculer le montant de ses indemnités, Cowslip est partie du principe qu’elle prévoyait de générer 1,25 million de dollars de revenus en Amérique du Nord grâce à la distribution de son film (contrats avec les chaînes du câble, avec Netflix, etc.), sans expliquer toutefois d’où provenait cette prévision... La société de production a quoi qu’il en soit retranché 25 % à ce chiffre, afin de prendre en compte la possibilité que le film ne marche pas. Cela nous donnait donc un total de 937 500 dollars.
Sauf que la distribution du film n’a finalement rapporté que 68 000 dollars à Cowslip... Cette dernière estimait par conséquent que le reste correspondait au préjudice causé par les services de Fileserve. Soit 869 500 dollars. Quand on sait que la société de production affirme quelques lignes plus tôt avoir dénombré 20 000 téléchargements effectués grâce à l’hébergeur de fichiers, cela donne des dommages et intérêts de plus de 43 dollars par téléchargement.
Restera maintenant à voir si Cowslip arrivera à obtenir dans la pratique la rondelette somme que vient de lui accorder la justice californienne, sachant que Fileserve n’a jusqu’ici pas montré beaucoup d’entrain, et ce d’autant plus que l’entreprise est basée dans les Îles Vierges britanniques.