Le chef du gouvernement a annoncé hier qu’un groupe de travail interministériel sur « l’accessibilité numérique » allait être installé dans les prochains jours. Au programme, notamment, la question de l’accessibilité des personnes handicapées aux sites Internet.
Hier, se tenait à Matignon une concertation relative à « l’accessibilité de la société », sous-entendu aux personnes handicapées. Jean-Marc Ayrault a reçu pour l’occasion un rapport de la sénatrice Claire-Lise Campion, spécialiste de cette question. Mais surtout, le Premier ministre a annoncé différentes mesures visant à améliorer les choses tant sur le plan matériel (infrastructures, équipements, etc.) qu’immatériel. « L’accessibilité ne se résume pas au cadre bâti ou aux transports. Elle vise "l’accès de tous à tout" » résume-t-on en ce sens du côté de l'exécutif, qui a ainsi présenté plusieurs chantiers.
Une expérimentation nationale de « relais téléphoniques » pour sourds et malentendants va par exemple être lancée d’ici le mois d’avril. Concrètement, 500 personnes handicapées vont tester pendant un an un dispositif fourni par la société Websourd, ce qui leur permettra d’être mis en relation avec des interlocuteurs n’ayant pas de problèmes auditifs. Comment ? Grâce à des interprètes en Langue des Signes française, des codeurs en Langage Parlé Complété, ou bien encore des transcripteurs de l’oral vers l’écrit, qui pourront accompagner ces individus en temps réel et à distance, notamment par webcam. Le coût de l’opération est de 2,8 millions d’euros pour l’État (pour en savoir plus, voir ici).
Les règles devraient également évoluer, afin d’imposer aux personnes proposant des téléviseurs dans des lieux publics (gares, cafés, etc.) une activation systématique des sous-titres. De plus, Matignon annonce que pour les hôtels, un mode d’emploi du sous-titrage devra être disponible dans les chambres. Quand aux cinémas, les salles « seront équipées pour diffuser le sous-titrage et l’audio-description des films » assure le gouvernement.
Mise en place d'un groupe de travail interministériel sur « l’accessibilité numérique »
Concernant plus spécifiquement l’accès des personnes souffrant d’un handicap (principalement visuel) aux sites Internet, Jean-Marc Ayrault a annoncé la nomination d’un « groupe de travail interministériel sur l’accessibilité numérique ». Ses travaux, visant à pousser au développement de l’accessibilité des sites Internet, qu’ils soient publics ou privés, sont censés débuter « fin février 2014 » - soit très prochainement.
Le rapport de la sénatrice Claire-Lise Campion (PDF) dresse cependant un premier bilan en la matière, évoquant au passage plusieurs pistes de travail. Car la situation est plutôt mauvaise selon la parlementaire, qui évoque des retards et des lacunes dans la mise en œuvre des dispositions de loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, qui impose à l'État, aux collectivités territoriales et aux établissements publics de fournir des sites Internet « accessibles aux personnes handicapées ».
Alors qu'un décret de 2009 prévoit pourtant une telle mise à niveau des sites publics, « les associations de personnes handicapées jugent absolument nécessaire de rendre accessibles en priorité les sites Internet « service-public.fr » et « mon.service-public.fr », tout en conservant l’objectif d’accessibilité de tous les sites publics, et de prévoir la possibilité de demander tout document dans un format accessible » rapporte la sénatrice Campion, qui précise que certains réclament qu’un calendrier contraignant soit mis en place, avec à la clé la possibilité de sanctionner une administration qui serait en retard.
Pour les sites privés (banques, réseaux sociaux, sites de vidéos, etc.) le rapport explique que les associations aimeraient qu’ils soient soumis à des obligations similaires, avec encore une fois des possibilités de réprimande en cas de manquement. « S’il est aujourd’hui difficile de se prononcer dans l’immédiat sur une telle obligation en France sans regarder à l’étranger si ce type de contraintes a été mis en place et quelles ont été les conséquences, il paraît pertinent de continuer les travaux d’élaboration de chartes d’engagements d’accessibilité avec les fédérations professionnelles volontaires » préconise à cet égard la sénatrice Campion.
En novembre dernier, le Conseil national du numérique s’inquiétait déjà, au travers d’un rapport sur l’inclusion numérique, de la situation des sites Internet publics, dont l’accessibilité était jugée « insuffisante ». L’institution brandissait au passage une étude européenne reléguant la France en avant dernière position sur ce terrain... Le CNNum en appelait lui aussi à ce que le Référentiel général d'accessibilité pour les administrations (RGAA) devienne contraignant, « en l’assortissant de sanction en cas de non-application ».