Cul sec ! Le phénomène de neknomination consiste sur Facebook à se filmer en buvant d’un trait un verre d’alcool et en mettant au défi de mettre trois de ses « amis » de l’imiter. « À 10 ans, il participe à une neknomination et finit à l'hôpital », « neknomination : quand boire avec excès devient "tendance" », la presse s’est fait écho de cette mode sur les réseaux sociaux. Le sujet a finalement débordé sobrement dans les couloirs de l’Assemblée nationale.
Le député François Loncle a ainsi saisi d’une question la ministre des Affaires sociales et de la Santé sur ces modes « d'alcoolisation massive pratiqués par des adolescents et de jeunes adultes ». Il cite pour sa part le cas d’un jeune homme de 20 ans, originaire de Nottingham, qui « vient de mourir à l'issue d'un tel pari stupide, ayant ingurgité plus d'un litre de vodka ». Il serait la cinquième victime de cette pratique depuis le début de cette année.
Mais le député socialiste de l’Eure évoque aussi « tous ceux et toutes celles qui, souvent soumis à une forte pression sociale, se sont livrés à un exercice similaire et ont sombré dans un coma éthylique, ont souffert de lésions cérébrales, ont été gravement intoxiqués ». Il en appelle ainsi à une « réponse adéquate et urgente, d'autant qu'un bar bordelais se propose d'organiser une soirée neknomination et qu'un site diffusant des vidéos de soûlerie a été visionné, en une semaine, par plus de 20 000 internautes ». II vient de demander à Marisol Touraine les programmes de prévention et de lutte contre l'alcoolisme au sein de la jeunesse et si un renforcement de la législation est envisagé.
Une jurisprudence inexistante
À ce jour, la jurisprudence ne s’est jamais penchée sur un tel cas. Elle s’est intéressée surtout aux pratiques des fabricants d’alcool sur les réseaux. Ainsi, en juillet 2013, la Cour de cassation avait-elle examiné le cas de Ricard qui diffusait sur les réseaux sociaux un film publicitaire. Cette pub permettait de collecter des codes donnant accès à des recettes de cocktails que l’utilisateur pouvait partager sur Facebook. Pour la haute juridiction, validant l’analyse de la Cour d’appel, « le fait que ce message soit relayé par l’intervention d’un internaute à l’intention de son « réseau d’amis » ne lui faisait pas perdre son caractère publicitaire ». C’était donc à bon droit que les juges du fond lui avaient appliqué les dispositions des articles L. 3323-2 et suivants du code de la santé publique qui encadrent les publicités en faveur des boissons alcoolisées. Cependant, avec la neknomination, la situation est différente puisqu’aucun fabricant n’est a priori derrière ce phénomène.
À la Santé, la ministre se dit attentive
Faute de mieux, le Ministère des Affaires sociales et de la Santé a déjà mis récemment en garde les internautes contre les risques liés à cette mode. « La « neknomination » représente un véritable danger, notamment pour les jeunes, population ultra-connectée et particulièrement concernée par la consommation rapide et massive d’alcool (ou « binge-drinking »). Une alcoolisation aiguë peut rapidement engendrer des troubles respiratoires, voire un coma » prévient le gouvernement.
Marisol Touraine affirme aussi être « vivement préoccupée », promettant d’être très « attentive » à l’évolution de ce phénomène chez les jeunes. Le ministère rappelle par ailleurs qu’il a demandé à l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (INPES) « de proposer, sur son site, de nombreux outils d’information et de pédagogie spécialement adaptés aux jeunes sur les dangers de l’alcool ». Outre, le gouvernement indique encore qu’ « un plan pour la santé des enfants, défini dans le cadre de la stratégie nationale de santé (SNS) et visant à lutter notamment contre l’alcoolisation des jeunes, sera intégré à la future loi de santé publique. »