Les révélations successives engendrées par les documents d’Edward Snowden ont provoqué une série d’électrochocs sur le plan politique. Désormais, plusieurs pays n’hésitent plus à afficher leur méfiance vis-à-vis des États-Unis, notamment l’Allemagne. Le Brésil, où règne un climat équivalent, a justement annoncé qu’un nouveau câble sous-marin allait relier le pays à l’Europe.
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Épauler le vieillissant câble actuel
C’est hier que se tenait le septième sommet entre le Brésil et l’Union européenne. Parmi les sujets abordés, un en particulier était pleinement en phase avec l’actualité de la sécurité et du respect de la vie privée. Le Brésil et l’Union européenne se sont en effet mis d’accord sur la construction d’un câble sous-marin qui reliera la ville de Fortaleza, sur le continent sud-américain, à Lisbonne, au Portugal.
Pourquoi un tel câble ? Il existe en fait deux raisons majeures selon Le Monde. La première est qu’il existe déjà un câble, mais dans un état proche de l’obsolescence qui ne le réserve plus qu’aux échanges de transmission vocales. Il est donc nécessaire de planifier l'installation d'un nouveau câble capable de transporter l’intégralité des transmissions électroniques entre les deux régions.
Des communications qui seraient hors de portée de la NSA
L’autre raison, on le devine aisément, est que le Brésil, comme l’Union européenne, affichent leur méfiance au grand jour et souhaitent tout simplement s’affranchir des câbles américains. Actuellement, tout échange entre le Brésil et l’Europe passe obligatoirement par des infrastructures appartenant aux États-Unis. À la lumière des révélations d’Edward Snowden, l’objectif est donc de ne pas risquer l’espionnage direct des données qui transitent sur les câbles.
Le projet est évalué à 135 millions d’euros et sera concrétisé dès l’année prochaine. La mise en place s’étalera sur plusieurs mois via un partenariat entre les équipementiers Telebras (Brésil) et IslaLink Submarine Cables (Espagne). Le financement est quant à lui réalisé par le Brésil et l’Union européenne, mais on ne connaît pas les proportions.
La construction de ce câble se fera dans un contexte délicat. Lors de la conférence de presse donnée hier par Dilma Roussef et les présidents la Commission européenne et du Conseil européen, la présidente brésilienne n’a pas hésité à marteler que « la vie privée, les droits de l'homme et la souveraineté des nations doivent être respectés », en référence très claire aux tensions avec les États-Unis.
Des pays échaudés par les scandales successifs
On rappellera à ce sujet que la section 702 de la loi FISA permet aux États-Unis, en tout légalité, d’espionner directement les données des utilisateurs étrangers à partir du moment où elles transitent par leurs réseaux et sont stockées sur leurs serveurs. C’est ce qui se passe par exemple avec les comptes Google, Microsoft, Apple ou encore Yahoo et Facebook. Concernant la circulation simple des informations cependant, la situation est beaucoup plus floue. Ce sont, là encore, les documents de Snowden qui ont montré que la NSA pouvait se servir directement à même les câbles.
En outre, la situation au Brésil est particulière : les esprits ont été marqués par une série de révélations à l’automne dernier. TV Globo, sur la base des informations de Snowden, avait enfin mis au grand jour un espionnage de la présidente brésilienne, et plus globalement de la population du pays, sans parler de la firme pétrolière Petrobras. Des révélations de ce type ont également eu lieu en Europe avec le scandale du propre smartphone d’Angela Merkel.
La décision de construire un nouveau câble intervient d’ailleurs alors que la chancelière allemande invite l’Europe à se pencher sur la mise en place d’un « réseau de communication européen », même si le détail d’une telle infrastructure n’a pas été donné.