Fleur Pellerin ministre déléguée aux PME, à l'innovation et à l'économie numérique a tenu cette après-midi une conférence au ministère, afin de présenter le nouveau cadre législatif du financement participatif. Comme prévu, les modifications concernent exclusivement les prêts entre particuliers ou aux entreprises, ainsi que la prise de participation au sein de startups.
« La France doit devenir un pays pionnier dans l'économie participative »
Cet après-midi, se tenait une conférence importante pour les acteurs du financement participatif, pendant laquelle Fleur Pellerin a annoncé un allègement du cadre légal autour de cette activité. Dans les grandes lignes, ce nouveau cadre doit permettre d'assouplir les conditions d'accès au financement participatif pour les entreprises « à forte croissance ».
Après maintes consultations démarrées dès le début de l'année, Fleur Pellerin affirme que le gouvernement est parvenu à trouver un cadre « parmi les plus souples au monde », tout en assurant une sécurité suffisante pour les investisseurs professionnels comme particulier. L'objectif est simple : « la France doit devenir un pays pionnier dans l'économie participative ».
Les plateformes, première cible de la nouvelle réglementation
En première ligne sur le front du financement participatif, on retrouve les plateformes, qui vont bénéficier d'un cadre plus favorable. En effet, les barrières concernant la quantité de fonds propres nécessaires pour l'exercice de leur activité vont être modulées.
Aujourd'hui les plateformes centrées sur le modèle du don contre contrepartie doivent disposer d'une quantité de fonds propres minimale de 40 000 euros. À compter de l'adoption de la loi, elles ne devront disposer que de l'équivalent de 4 % des sommes transitant par leur biais, si les projets financés par leur biais totalisent moins de 5 millions d'euros de dons, le taux étant ensuite dégressif jusqu'à 0,25 % pour les sommes dépassant 250 millions d'euros. Ainsi les 40 000 euros précédemment requis seront suffisants pour assurer le financement de projets à hauteur d'un million d'euros.
Les plateformes devront toutefois détenir un agrément correspondant à leur activité délivré par l'ACPR : l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution de la Banque de France, certifiant que toutes les conditions requises à la pratique de leur activité sont remplies. Cela vaut notamment pour les questions de solvabilité des plateformes.
Les prêts participatifs vont « remettre en cause le monopole bancaire »
Fleur Pellerin l'a clairement énoncé, elle souhaite « remettre en cause le monopole bancaire » s'agissant des prêts aux particuliers et aux entreprises. Pour ce faire, le gouvernement va autoriser les plateformes de financement participatif à proposer des prêts rémunérés, dont les fonds prêtés seraient avancés par toute personne le souhaitant.
En pratique quelques limitations seront de la partie, notamment sur les montants prêtés. Ainsi chaque projet pourra débloquer au maximum 1 million d'euros. Les prêteurs n'auront par contre aucune limite concernant la quantité d'argent prêtée au total, mais leur participation ne pourra excéder 1 000 euros par projet, afin de diluer au maximum les risques.
Les plateformes exerçant cette activité devront obtenir un Agrément d'intermédiaire en financement participatif, délivré par l'ACPR. Celui-ci leur permettra d'accéder au FIBEN, le Fichier bancaire des entreprises, permettant notamment d'analyser les risques de crédits et de détecter les financements les plus risqués. Les plateformes seront également mises à contribution pour renseigner ce fichier.
Enfin, les plateformes devront proposer un système d'aide à la décision pour les prêteurs, afin de leur permettre de connaître les montants qu'ils peuvent engager en fonction de leurs revenus, de leurs charges et éventuellement de leur patrimoine. Ce afin d'éviter que des particuliers tombent en faillite personnelle faute d'avoir correctement compris les risques de cette activité.
Des levées de fonds facilitées pour les startups, notamment les SAS
Le nouveau cadre législatif du financement participatif doit également profiter aux startups souhaitant céder leurs parts en l'échange d'investissements. Pour ce faire, un nouveau statut de « Conseiller en investissement participatif » sera créé et permettra la commercialisation d'actions de Sociétés Anonymes (SA) et de Sociétés par Actions Simplifiées (SAS). Ces dernières ont été intégrées au dispositif en raison de l'utilisation assez large de ce statut par les jeunes pousses.
Pour exercer l'activité de conseiller en investissement participatif, les prérequis seront peu nombreux puisqu'il n'y a aucune obligation concernant les fonds propres nécessaires à son exercice. Par contre, les plateformes devront faire preuve de la transparence la plus absolue quant à leur fonctionnement, aux informations qu'elles transmettent aux investisseurs, ainsi qu'aux risques pris par ces derniers. Les frais éventuels à la charge des investisseurs devront eux aussi être clairement indiqués. De même, un travail important sera demandé aux plateformes quant à la détection des fraudes et des tentatives de blanchiment d'argent.
Autre prérequis, toute personne physique ou morale doit être capable d'investir dans les projets ainsi soumis. Plus question de seuil minimal de patrimoine ou de plafonds d'investissement. Chacun doit pouvoir investir les sommes qu'il souhaite sans rencontrer d'obstacles.
Pour les entreprises financées, les avantages sont multiples. Le point le plus notable étant qu'elles n'ont plus besoin de diffuser des « prospectus de 200 pages » coûteux à produire si la levée de fonds n'excède pas un million d'euros. En outre, les SAS trouveront dans cette solution une alternative à l'offre au public de titres financiers à laquelle elles ne peuvent prétendre, de par leur statut.
Le plafond fixé à un million d'euros pour cette procédure simplifiée n'a pas été choisi au hasard puisque Fleur Pellerin explique que sous ce seuil, les entreprises font face à un « mur du financement ». Concrètement, elle considère qu'au-dessous d'un million d'euros, les fonds d'investissement traditionnels n'approchent pas les entreprises, et que les sommes les plus faibles sont de toute façon trouvées dans l'entourage immédiat des entrepreneurs. Ces levées de fonds facilitées vont donc également se poser en alternative aux prêts auprès des établissements bancaires.
Enfin, il convient de rappeler que toutes ces mesures ne changent absolument rien au fonctionnement du modèle de financement via dons contre contreparties, ou don contre don, tel que celui utilisé par Kickstarter, Kiss Kiss Bank Bank ou Ulule. Vous retrouverez d'ailleurs des explications plus précises sur leur fonctionnement dans notre dossier sur le financement participatif dans le domaine du jeu vidéo.