Les députés avaient hier une opportunité de revenir sur l’article 20 de la loi de programmation militaire. Mais l’amendement défendu par les écologistes à l’occasion du projet de loi sur la géolocalisation fut sans grande surprise rejeté par l’Assemblée nationale et le gouvernement.
L’Assemblée nationale a adopté hier le projet de loi relatif à la géolocalisation. Mais pour plusieurs députés, ce texte était aussi l’occasion de revenir sur le très contesté article 20 de la loi de programmation militaire. Comme nous avons déjà eu l’occasion de l’expliquer, cet article ouvre, à partir du 1er janvier 2015, les vannes du droit de communication à une ribambelle d’administrations - du côté de Bercy, de l’Intérieur ou de la Défense - à propos de tous les « documents » et « informations » transmises ou stockées dans les câbles des opérateurs ou dans les nuages des hébergeurs (pour en savoir plus, voir notre analyse détaillée, ou notre résumé).
En Commission des lois, des amendements avaient ainsi été déposés par une poignée d’élus UMP, dont Lionel Tardy et Xavier Bertrand, mais aussi par deux députés écologistes. Avec un seul et même objectif : réécrire ce qui est désormais codifié au sein de l’article L 246-1 du Code de la sécurité intérieure, et qui n’entrera en vigueur que l’année prochaine. Sauf qu’après avoir essuyé un premier revers à la fin janvier en commission, certains parlementaires ont voulu retenter leur chance en séance publique.
Hier, le député Sergio Coronado défendait ainsi un amendement soutenu par le groupe écologiste. Concrètement, il était question de gommer la référence aux « informations » et « documents » de l’ex-article 20 de la loi de programmation militaire. « La rédaction de cet article a été contestée, notamment, en ce qui concerne les informations qui pourront être collectées par les services » a dans un premier temps fait valoir l’élu. « Comme des scandales récents ont pu le démontrer, le contenant est désormais tout aussi important et porteur d’informations que le contenu. C’est pourquoi cet amendement propose de préciser cet article et de remplacer la collecte de tout type d’information par la collecte habituelle des seules données de localisation et de celles concernant l’auteur, le destinataire, la durée et la date des communications » (voir le compte-rendu des débats).
Avis défavorables du rapporteur et du gouvernement
Mais le député rapporteur du projet de loi sur la géolocalisation, Sébastien Pietrasanta, a émis un avis défavorable à cet amendement. « La loi de programmation a été votée au mois de décembre, l’encre est à peine sèche et l’on voudrait y revenir ! » s’est-il ainsi exclamé. L’élu socialiste a ensuite expliqué que la LPM vise selon lui uniquement les « documents dans lesquels les opérateurs de communication recenseraient des données de connexion » et non pas « le contenu des documents personnels d’un particulier qui seraient conservés dans le cloud ».
Sauf que l’article litigieux ne précise justement pas ces termes, d’où les levées de boucliers de ces derniers mois. « L’intitulé du chapitre VI du code de la sécurité intérieure, "Accès administratif aux données de connexion", montre bien qu’il ne s’agit pas d’accéder au contenu, mais seulement aux données de connexion, c’est-à-dire au contenant » a sur ce point tenté de rassurer Sébastien Pietrasanta.
Sans grande surprise, la ministre de la Justice a elle aussi émis un avis défavorable à cet amendement. Motif ? « Cet amendement revient sur une disposition qui vient d’être votée ». L’amendement a donc été rejeté par les députés en présence.
D'autres opportunités devraient se présenter dans les prochains mois
Mais les députés ne baissent cependant pas les bras. Laure de la Raudière nous avait ainsi expliqué suite à la promulgation de la LPM qu’elle présenterait « rapidement » une proposition de loi afin de rendre l’article 20 « lisible, précis, sans interprétation juridique trop large comme aujourd’hui ». Jointe par PC INpact, l’élue UMP affirme qu’elle travaille toujours à la réécriture du fameux article, épaulée par « un expert juridique des questions de renseignement ». La parlementaire n'avait cependant pas déposé d'amendement au projet de loi discuté hier, et ne s'était pas non plus jointe à ceux déposés par certains de ses collègues de l'opposition à propos de la loi de programmation militaire. « Je n’étais pas prête à ce stade pour le projet de loi sur la géolocalisation » nous a confié la députée.