Personne ne l'aura manqué, la nouvelle de la semaine est bien évidemment le remplacement officiel de Steve Ballmer par Satya Nadella à la tête de Microsoft. Une information qui nous démontre surtout la montée en puissance de l'Inde ou de personnalités d'origine indienne dans le secteur high-tech. Et Nadella qu'est qu'un exemple parmi bien d'autres.
Le nouveau PDG de Microsoft
Un pays discret, dans l'ombre de la Chine
Depuis trop longtemps, et aujourd'hui encore, l'Inde est dans l'ombre de la Chine. Deuxième pays le plus peuplé au monde (derrière la Chine), l'Inde connait une explosion des secteurs high-tech bien plus tardive que son voisin. Il est ainsi en retard sur la téléphonie mobile, l'équipement informatique, etc. Côté constructeurs, alors que la Chine peut mettre en avant Lenovo, Huawei ou encore ZTE, le pays de Gandhi manque encore de figure de proue dans le secteur high-tech grand public. Il en est d'ailleurs de même pour les sites internet, où Baidu, Alibaba, Weibo et QQ n'ont pas encore leur équivalent sur les terres de Siddhartha Gautama. En réalité, au point d'en devenir un cliché, l'Inde n'est aux yeux du monde qu'un gisement d'ingénieurs informatiques où les SSII sous-traitent massivement, ceci grâce aux bas salaires qu'on y trouve.
Mais les choses changent. Les ventes de PC sont désormais très fortes, au point de surpasser celles de grands pays. Du côté des smartphones, l'Inde est devenu il y a quelques mois le troisième marché le plus important au monde, derrière la Chine et les États-Unis, et donc devant le Japon, le Royaume-Uni, l'Allemagne, la France, le Brésil ou encore la Russie. Il est d'ailleurs situé à la même place en ce qui concerne le nombre d'internautes, devancé par exactement les mêmes pays.
Concernant les entreprises indiennes, là aussi, il y a du mouvement. Bangalore, aussi appelée la Silicon Valley Indienne, compte des centaines de startups et ne cesse de croître. Quelques sociétés locales sortent d'ailleurs du lot, c'est notamment le cas d'Infosys, une SSII qui multiplie les acquisitions ces dernières années (ici et là par exemple). En 2007, la rumeur d'un rachat de Capgemini par Infosys a même fait le tour de la toile. Toujours dans le secteur des services, notons aussi que les sociétés indiennes Wipro et TCS montent en puissance. Cette dernière a d'ailleurs croqué le Français Alti l'an passé.
Profitant du succès des smartphones sur leurs terres, des entreprises indiennes spécialisées dans la fabrication de téléphones commencent aussi à éclore, à l'instar de l'apparition des constructeurs chinois, qui ont avant tout misé sur leur marché local avant d'envahir le monde. Pour l'Inde, nous pouvons citer Karbonn Mobiles, LAVA International, Intex Technologies, Micromax, Zen Mobile ou encore Spice qui réussissent non seulement dans leur pays face aux géants du secteur (Samsung, etc.), mais aussi parfois en dehors de leurs frontières, notamment en Asie, en Afrique et en Europe de l'est. Leur aura en Europe de l'ouest et en Amérique est par contre quasi inexistante, mais pour combien de temps ?
Nadella, Pichai, et bien d'autres
Mais la véritable ascension du pays du sud de l'Asie est principalement visible via certaines de ses personnalités, tout du moins en Occident. La place de PDG de Microsoft désormais occupée par Satya Nadella est l'évènement le plus emblématique pour le natif de Hyderabad (une grande agglomération indienne), immigré aux États-Unis uniquement après avoir obtenu son diplôme d'ingénieur en électronique dans son pays. Mais son cas est bien loin d'être unique.
L'an passé, une autre personnalité d'origine indienne a crevé l'écran : Sundar Pichai. Depuis longtemps cadre important de Google et dirigeant la division Chrome et Chrome OS, l'homme a grimpé d'un cran en intégrant Android dans ses pouvoirs, en lieu et place d'Andy Rubin, le fondateur du fameux système d'exploitation mobile. Pour Pichai, la promotion fut importante, au point même qu'une rumeur a envoyé le natif de Chennai (Inde) au poste de... PDG de Microsoft, en concurrence directe de Nadella. Un duel indo-indien qui a donc profité au second. Mais cela prouve l'importance grandissante de Pichai. Ce dernier, âgé à peine de 42 ans, a d'ailleurs bien des chances d'être courtisé dans les années à venir, les dirigeants de Google doivent s'y attendre.
Cette évolution n'est toutefois pas étonnante. Selon diverses statistiques, si les Indiens ou Américains d'origine indienne ne constituent que 6 % de la population de la Silicon Valley, ils représentent 15 % des entreprises. Aujourd'hui, la majorité des entreprises high-tech ont au moins un directeur ou un chef d'origine étrangère, et les Indiens sont particulièrement bien placés.
Le Monde titrait d'ailleurs cette semaine que plus du tiers des entreprises de la Silicon Valley comptent un dirigeant d'origine indienne. Un signe qui ne trompe pas. L'évolution de Pichai et de Nadella ne sont donc que la suite logique d'une présence incontournable de leurs compatriotes aux États-Unis, même si Microsoft n'est pas basé en Californie faut-il le rappeler. Le quotidien français rappelait d'ailleurs qu'outre Microsoft, des sociétés comme Adobe, MasterCard et PepsiCo ont des dirigeants indiens ou d'origine indienne. Shantanu Narayen, le patron d'Adobe, est d'ailleurs né au même endroit que Satya Nadella. Et l'un des fondateurs de Foursquare, Naveen Selvadurai, est aussi né en Inde.
La mise en avant d'étrangers en Amérique du Nord n'est cependant pas une nouveauté. Rappelons tout de même que les fondateurs de NVIDIA, ATI ou encore Yahoo étaient Chinois ou Taiwanais. L'un des fondateurs de Google est d'origine russe (Sergey Mikhaïlovitch Brin), et eBay a pour créateur Pierre Omidyar, né à Paris et d'une famille iranienne. Et bien d'autres exemples pourraient être cités parmi les startups moins connues. La vague indienne n'a cependant jamais été aussi flagrante.