Au 30 juin dernier, onze décisions de justice avaient été prises en application de la loi Hadopi. C’est en tout cas ce qu’assurait la Haute autorité dans son dernier rapport annuel. Cependant, l’institution refuse de communiquer les détails relatifs à chacun de ces jugements. Retour sur ce manque de transparence qui peut poser problème.
Depuis les débuts de la riposte graduée, en octobre 2010, combien d’abonnés ont été traînés devant les tribunaux pour « contravention de négligence caractérisée » ? Dans son dernier rapport d’activité, publié en octobre dernier, la Hadopi donne une réponse à cette question, affirmant qu’au 30 juin 2013, « 11 décisions » avaient été rendues par la justice (voir ce PDF, page 35).
Si la Rue du Texel précisait à l'époque qu’outre une relaxe, « plusieurs types de décisions ont ainsi été pris, allant de la condamnation assortie d’une dispense de peine à la condamnation à une peine d’amende d’un montant variant de 50 à 600 € (avec ou sans sursis) qui a été assortie, dans un cas, d’une peine complémentaire de suspension de l’accès à Internet de 15 jours [laquelle ne fut d’ailleurs finalement pas appliquée, ndlr] », aucun autre détail n’était fourni par la Haute autorité. Pourtant, il est difficile de croire que la Haute autorité n’a pas en sa possession le détail complet de toutes ces décisions dès lors qu'elle en dresse un bref éventail...
La Hadopi refuse de donner le détail des 11 décisions qu’elle évoque dans son rapport
Sauf que lorsque PC INpact lui a demandé à connaître le sens de chacune de ces 11 décisions, la Hadopi lui a adressé un refus catégorique. « On ne pourra malheureusement pas aller vers un niveau de détail supplémentaire que ce qui est déjà dans le rapport » nous a-t-on indiqué. Motif invoqué ? « Ça relève des tribunaux ». Autant dire qu’il est extrêmement difficile dans ces conditions de vérifier les informations publiées par la Hadopi, de même que d’obtenir les détails correspondant à chaque décision (sens de la décision, date du jugement, tribunal,...). Contacté à ce sujet dans le courant de l’année dernière, le ministère de la Justice avait également refusé de nous fournir de telles informations, préférant nous renvoyer vers... la Hadopi.
Ce manque de transparence est d’autant plus surprenant que l’institution précise dans ce même rapport que la Commission de protection des droits de la Hadopi « reçoit les décisions des procureurs, les avis d’audience et les jugements des tribunaux de police ». En clair, elle est sur cette base susceptible de connaître chacune de ces décisions.
Des informations partielles irriguant le rapport sénatorial de David Assouline
Autre problème : les informations partielles mises en avant par la Hadopi au travers de son dernier rapport d’activité ont récemment été reprises quasiment au mot près par un rapport sénatorial, celui concocté par David Assouline lors de l’examen du projet de loi sur l’indépendance de l’audiovisuel public (PDF). Également contactée en octobre dernier afin de connaître le détail de ces informations, l’équipe du sénateur PS nous expliquait à l’époque qu’elle ne pouvait pas nous donner le moindre élément supplémentaire. « Les données ont été fournies par le rapport d'activité 2012 et des informations issues de l'Hadopi pour 2013. Nous n'avons rien de plus détaillé sur la nature des condamnations » nous expliquait-on. Autrement dit, il s’agissait là d’un vague copier-coller dont la source n’avait pas été remise en cause ou vérifiée outre mesure...
À gauche, le rapport sénatorial de David Assouline; à droite, celui de la Hadopi.
Pour rappel, les données à notre connaissance font état de :
- Une relaxe,
- Une condamnation prononçant une dispense de peine,
- Une condamnation à une peine d'amende de 150 euros,
- Une condamnation à une peine d’amende de 600 euros et de 15 jours de suspension d’accès à Internet (non appliquée).
Selon les termes du rapport Assouline, il y avait en septembre dernier dix jugements supplémentaires aux quatre évoqués ci-dessus, dont on ne déduit uniquement qu’un seul a consisté en une peine de 50 euros d’amende. Depuis, de nouvelles décisions ont pu être rendues, sans qu'on n'en ait eu connaissance.