Cette semaine, Google a mis une petite claque à bien du monde en rachetant Nest pour 3,2 milliards de dollars. Nest, une petite société encore peu connue du grand public, fondée en 2010 par des anciens d'Apple et spécialisée dans les thermostats et les détecteurs de fumée intelligents et connectés. 3200 millions de dollars pour ça ? Pourrait-on penser au premier abord. Mais en réalité, cette acquisition est tout sauf insensée.
Tout, ils sauront tout sur vos...
Créée il y a moins de quatre ans par Tony Fadell et Matt Rogers, deux anciens ingénieurs d'Apple, Nest, une société californienne, a rapidement senti le bon fumet de la domotique simple, avec des produits de base comme des thermostats et des détecteurs de fumée. Misant sur le design de ses appareils, leur donnant ainsi un côté novateur voire futuriste, Nest a réalisé des levées de fonds non négligeables, notamment une de 50 millions de dollars à ses débuts, ou encore une de 80 millions l'an passé. Livrant quelques milliers d'appareils chaque mois, la société de plus de 300 employés est prometteuse, mais est bien loin d'être monstrueuse encore.
Alors pourquoi miser 3,2 milliards de dollars sur une telle société ? 3,2 milliards, c'est tout simplement le rachat le plus important de l'histoire de Google, derrière évidemment Motorola, un cas à part du fait de ses nombreux brevets de forte valeur et au très grand nombre d'employés. C'est surtout le double de YouTube (1,65 milliard), bien plus que Waze (1,3 milliard), quatre fois plus que AdMob (750 millions) et même plus que DoubleClick (3,1 milliards), ces dernières étant des régies publicitaires sur mobile et sur internet respectivement, soit le cœur de métier de Google.
Suite à la nouvelle de ce rachat, nombreux sont ceux qui ont cherché à comprendre pourquoi la firme de Larry Page et Sergueï Brin s'est alignée sur une telle société, et surtout pourquoi une telle somme a été mise sur la table. Bien entendu, on peut toujours s'arrêter sur le fait que l'Américain s'intéresse depuis un moment déjà à la domotique ou encore qu'acquérir une société maitrisant le matériel, le design, et le logiciel, est un atout considérable, et c'est vrai. On peut aussi penser que les objets dits intelligents de ce type sont l'avenir et qu'il vaut mieux dépenser 3,2 milliards aujourd'hui que trois fois plus dans le futur, ce qui est tout à fait recevable comme argument. Rajoutons qu'avec Google à ses côtés, Nest a toutes les chances de s'imposer dans un marché aux concurrents déjà très nombreux et compétitifs.
Mais revenons à la base même de la firme de Mountain View. Son activité principale n'est ni la recherche sur internet, ni la cartographie, ni être éditeur de système mobile : c'est la publicité, dont il tire la majorité de ses revenus. Et plus précisément, il s'agit de la publicité ciblée. Et pour cibler, connaitre son « client » jusqu'à son ADN et ses pensées est le but ultime. Sans aller jusque-là, Google dispose déjà d'une base considérable de données, que ce soit grâce aux recherches, à Gmail, aux différents usages sur Android, à Maps, à Google+, etc.
Le rachat de Nest s'inscrit totalement dans cette direction. Avec ces produits, Google pourra mieux comprendre vos actions à la maison, et ainsi, vous cibler plus et mieux que jamais. Auparavant réellement privé, le foyer s'ouvre un peu plus chaque jour à internet, et sans surprise, cela attise les appétits et les convoitises. Quoi de plus normal, donc, que le roi du Net se penche sérieusement sur la question. Si les débats sur la vie privée continueront de faire couler beaucoup d'encre (et autant de salive), ceci alors que les utilisateurs fourniront eux-mêmes les informations, comme ils le font déjà avec les smartphones, les réseaux sociaux, etc.
Si c'est connecté, Google veut en être
Depuis un certain temps déjà, Google a quitté le simple monde du service sur internet en proposant des logiciels et du matériel, que ce soit via les smartphones, les ordinateurs et bientôt les lunettes connectées. Le point commun reste que la connexion est très souvent indispensable à tous ces produits, et que des données sur l'utilisateur sont collectées, même si cela reste souvent invisible à ses yeux (sans faire de jeux de mot avec les Google Glass). Les appareils de Nest sont ainsi dans la parfaite continuité de la logique de l'Américain : internet + données personnelles = meilleur ciblage = des publicités plus rémunératrices = plus de dollars.
Dès lors que tous les objets ou presque sont voués et condamnés à être connectés dans un futur plus ou moins proche, jusqu'à nos vêtements et même nos lentilles, il est certain que la société qui s'engouffrera dans ce créneau sera Google, et personne d'autres. Bien entendu, des entreprises comme Facebook, Microsoft ou encore Apple pourraient être tentés par ce type d'opération. Mais contrairement à Microsoft ou Apple, les publicités et les données personnelles sont vitales pour le moteur de recherche. Facebook, pour sa part, n'est encore qu'un réseau social et n'a pas toute l'envergure d'un Google aujourd'hui.
Selon certaines études, en 2020, soit demain, le monde comptera 26 milliards d'objets connectés, ceci hors PC, smartphones et tablettes. Un marché qui représentera des centaines de milliards de dollars. Le dernier CES ou encore les précédentes éditions de LeWeb ont d'ailleurs montré la voie, les objets connectés disposant d'une visibilité non négligeable. Le marché sera gigantesque et assurément, Google voudra sa part.