Depuis le 1er janvier, l’Assemblée nationale a mis en place sur son site Internet un espace dédié aux organisations (entreprises, associations, cabinets d'avocats,...) s’étant déclarées auprès du Palais Bourbon comme étant des « représentants d'intérêts » sur la base du volontariat. Explications.
C’était un engagement pris au cours de l’année dernière suite à la publication du rapport Sirurgue : l’Assemblée nationale vient de mettre en ligne un registre des « représentants d'intérêts », autrement dit des lobbyistes. Plus concrètement, il est aujourd’hui possible de consulter, depuis le site Internet du Palais Bourbon, un tableau dans lequel sont inscrits différentes entreprises, associations, cabinets d’avocats ou de consultants. Tous tentent plus ou moins régulièrement d’influencer les décisions des députés.
Pour chacun de ces représentants d'intérêts, le nom, la catégorie (entreprise, syndicat, cabinet de consultants,...) et le secteur d’activité sont mentionnés. Il est également possible d’accéder à fiche correspondante à chaque groupe de pression. À la clé, davantage d’informations sur leur statut légal (SA, association, etc.), les données financières les concernant ou bien encore les détails de leurs activités. Pour l’heure, l’on dénombre une quarantaine d’organisations très différentes : La Poste, le Syndicat national des moniteurs de ski français, la Banque de France, Transparency International, Radio France, etc.
L’objectif affiché : « mieux faire connaître les différents intervenants qui sont amenés, d’une manière ou d’une autre, à entrer en contact avec les parlementaires dans l’exercice de leur mandat ». L’Assemblée nationale affirme avoir voulu remplir trois impératifs. Un impératif de transparence, en invitant les représentants d’intérêts « à faire savoir qui ils représentent et pour le compte de qui ils agissent ». Un impératif de publicité, en permettant à un grand nombre de citoyens d’avoir un œil sur ces liens entre leurs élus et les groupes de pression. Un impératif déontologique, consistant à soumettre l’activité des représentants d’intérêts à un ensemble de droits et de devoirs.
Comment fonctionne ce registre ? Il est purement déclaratif. C’est-à-dire que n’y figurent que ceux qui le souhaitent. Mais sans carotte, difficile d’imaginer que les volontaires se bousculent au portillon...
De ce fait, l’assemblée offre en échange différentes « facilités » aux représentants d’intérêts déclarés. En l’occurrence, ces derniers se voient notamment attribuer une « carte de représentant d’intérêts de l’Assemblée nationale », qui leur permet de rentrer et sortir plus facilement du Palais Bourbon. Ils peuvent également mettre en ligne sur le site de l’Assemblée nationale des contributions en lien avec les travaux des députés, comme par exemple les rapports législatifs. Surtout, ils deviennent distingués par les élus comme ayant approuvé le « Code de bonne conduite » applicable aux représentants d’intérêts (voir extrait ci-dessus).
Si le Sénat met lui aussi en ligne depuis plusieurs années une liste des groupes d’intérêts enregistrés, un récent billet du blog Les cuisines de l’assemblée expliquait que « le fait qu’il y ait des règles différentes pour un même lobbyiste selon qu’il souhaite exercer son influence à l’Assemblée, au Sénat ou au gouvernement joue en défaveur de l’institution qui instaure les règles les plus contraignantes. Mais s’il donne pour l’instant des résultats mitigés, le volontarisme dont à fait preuve l’Assemblée nationale avec ce nouveau registre, pourrait être moteur dans le combat de longue haleine pour encadrer de manière sérieuse et respectueuse les représentants d’intérêts ».
Bientôt une réutilisation de ces données publiques en Open Data
« Nous ne pouvons que nous réjouir de la publication de ce registre, qui va permettre aux citoyens d'être informés des activités de lobbying qui se pratiquent auprès de l'assemblée » a réagi Nelson Herbin, membre de l’association Regards Citoyens. Avant de préciser : « Nous regrettons cependant qu'il n'ait pas été rendu obligatoire, comme nous le demandons de façon répétée depuis un peu plus d'un an ».
Le collectif s’est d’ailleurs inscrit à ce fameux registre, mais ne cache pas son agacement face aux méthodes utilisées par les équipes du Palais Bourbon. « L'utilisation imposée de technologies propriétaires pour les formulaires qui nous était impossible a quelque peu ralenti du côté de l'Assemblée la saisie des données de notre inscription » regrette ainsi Nelson Herbin. Quoi qu'il en soit, la page correspondant à Regards Citoyens peut dorénavant être consultée ici.
Enfin, l’intéressé nous a confié que la mise en ligne de ce registre allait bientôt faire l’objet d’une réutilisation de ses données sous forme d’Open Data. « Nous proposerons prochainement un accès sous la forme de données réutilisables OpenData aux informations contenues dans l'ancien et le nouveau registre, ce qui nous permettra de dresser une rapide première analyse ». Basculées dans un fichier au format ouvert et libre, ces informations devraient très vraisemblablement être référencées sur la plateforme « data.gouv.fr », qui accueille depuis peu les contributions extérieures à l'administration.