Le fameux article 4 de la LOPPSI oblige les intermédiaires techniques à bloquer « sans délai » les sites relevant de l'article 227-23 du Code pénal, ceux contenant des images pornographiques de mineurs. Le dispositif donne spécialement au ministère de l’Intérieur un pouvoir exceptionnel : celui de notifier les intermédiaires techniques comme les FAI afin de les forcer à bloquer l’accès très rapidement à ces sites.
Exrait des cahiers du Conseil constitutionnel, annexés à la décision LOPPSI
En juin 2008, Michèle Alliot-Marie, ministre de l’Intérieur, expliquait que « l'accès aux sites à caractère pédopornographique sera bloqué en France. D'autres démocraties l'ont fait. La France ne devait plus attendre. » L'ancien gouvernement avait tenté par tout moyen d’imposer ce blocage sans juge, prétextant une urgence impérieuse compte tenu du sujet : l’enfance en danger. De leur côté, les industries culturelles étaient aux aguets, envisageant une extension de la mesure au profit de ses intérêts. Le Conseil constitutionnel avait finalement admis le court-circuitage de l’autorité judiciaire en prévenant cependant que la mesure était exceptionnelle et ne pouvait s’étendre à d’autres contenus.
#cpn @fleurpellerin explique que le décret art.4 Loppsi sur le blocage de sites passe à la trappe. Pas de blocage sans juge.
— Benoit Tabaka (@btabaka) Juillet 24, 2012
En début d’année, dans un courrier, le gouvernement Fillon précisait au Conseil national du numérique « que les instructions ont été données afin que le projet de décret en préparation par le Ministre de l’Intérieur (…), relatif à la mise en œuvre de la loi d’orientation et de programmation sur la performance de la sécurité intérieure dite LOPPSI 2, fasse l’objet d’une consultation du CNN. » Dans le même temps, des discussions avaient lieu entre les intermédiaires techniques et les services de l’intérieur pour ajuster les demandes des uns et les capacités des autres.
A quand l'abrogation de l'article 4 ?
Enfin, des FAI comme Orange anticipaient la mise en œuvre du blocage pour le 1er janvier 2013, avec plusieurs milliers de sites ciblés chaque jour. Bref, le texte était sur la rampe. Précisons que l’obligation de blocage devait être effective six mois après la publication du décret ou au plus tard un an à compter de la publication de la loi, soit le 15 mars 2012. Le décret n’ayant jamais été publié, nous étions dans cette seconde hypothèse. Cela signifie en conséquence qu’il faudra attendre l’abrogation ou l’amendement de ce bout de texte pour être débarrassé définitivement de ce dispositif. Précisons que l'absence d'un décret ARJEL, n'avait pas empêché la justice française d'ordonner le blocage d'un site de jeux en ligne.
Le juge, rempart absolu ?
On notera au final que même lorsque l'intervention du juge est requise, les ayants droit ne désespèrent pas. Dans l'affaire Allostreaming, ils réclament du TGI de Paris que celui-ci délègue à un système automatisé le soin de traquer, notifier et faire bloquer les miroirs d'un site préalablement bloqué. L'affaire devrait être jugée d'ici la fin de l'année.