Comme nous l’expliquions fin avril, UsedSoft est une société spécialisée dans la vente de logiciels d’occasion. Fin 2005, elle propose des licences d’Oracle « déjà utilisées ». Elle indique qu’elles sont « à jour », et donc que le contrat de maintenance souscrit par l’acheteur initial fonctionne à plein régime. UsedSoft assure par ailleurs que cette licence est licite. Après avoir acquis la licence « d’occasion », ses clients téléchargent donc le logiciel directement depuis le site d’Oracle. Quant à ceux qui disposent déjà du logiciel, ils peuvent aussi acheter des compléments des licences pour des utilisateurs supplémentaires.
Un joli petit business qu’Oracle n’a pas apprécié, elle qui distribue ses logiciels en majorité par téléchargement. On le comprend en effet, les ventes d’UsedSoft sont autant de pertes de marges pour Oracle qui a réclamé l’interdiction de ces opérations. L’affaire est remontée jusqu’à la CJUE, via une question préjudicielle de l’Allemagne portant sur l’interprétation d’une directive de 2009, relative à la protection juridique des programmes d’ordinateur.
Épuisement du droit de distribution
Dans son arrêt rendu aujourd’hui, la CJUE indique que « le principe d’épuisement du droit de distribution s’applique non seulement lorsque le titulaire du droit d’auteur commercialise les copies de ses logiciels sur un support matériel (CD-ROM ou DVD), mais également lorsqu’il les distribue par téléchargement à partir de son site Internet ». Ainsi, la vente d'une copie originale revient pour son vendeur à un abandon de certains droits, dont celui de s’opposer à la revente ultérieure de licences permettant son utilisation.
Autrement dit, la législation européenne autorise les sociétés comme UsedSoft à revendre des licences « d’occasion », quand bien même le logiciel aurait été téléchargé sur Internet. Dans son communiqué, la CJUE conclut : « le nouvel acquéreur de la licence d’utilisation, tel qu’un client de UsedSoft, peut en tant qu’acquéreur légitime de la copie corrigée et mise à jour du programme d’ordinateur concerné, télécharger cette copie à partir du site Internet du titulaire du droit d’auteur ».
La Cour note très naturellement que l’acquéreur initial d’une copie d’un programme d’ordinateur «doit rendre inutilisable la copie téléchargée sur son propre ordinateur au moment de la revente » de cette licence.
Même si cette décision ne constitue pas en soi une condamnation - étant donné qu'il ne s'agissait que d'une question préjudicielle, cette interprétation devrait à terme jouer en défaveur d'Oracle.