Si Internet existe depuis une bonne trentaine d’années, tout dépend la base utilisée, pour la plupart des gens, Internet a principalement décollé à la fin des années 1990. Il faut dire que l’invention du Web a radicalement changé l’image, l’approche et l’usage d’Internet, auparavant exploité quasi exclusivement par des initiés. Et si en huit ans, le haut débit s’est généralisé et les sites de vidéos, les réseaux sociaux, le streaming vidéo et audio et bien d’autres services sont devenus une banalité, que dire du bond réalisé en 15 ans ? Voici un édito qui remontera des souvenirs à certains, et qui informera les plus jeunes. De quoi aussi relativiser la situation actuelle.
Aujourd’hui, la plupart des FAI cités dans le paragraphe ci-dessus ont mis la clé sous la porte au début des années 2000 ou ont été rachetés par Tiscali ou Neuf/SFR. Vous l’aurez compris, entre 1995 et 2000, la France a compté un nombre extraordinaire de fournisseurs d’accès à internet, très loin de la concentration du marché d’aujourd’hui. Leur rapidité à mourir a été tout aussi extraordinaire. La plupart n’ont vécu que deux ou trois ans, cinq ans pour les plus résistants. Et certains ont réalisé la performance de vivre tout juste une petite année. Mangoosta, spécialisé dans l’ADSL, a ainsi été créé en 2000 pour être racheté… l’année suivante.
Concernant les tarifs, les connexions étaient globalement payables à la minute et ils variaient selon la période de la journée. La nuit, bien moins onéreuse, était donc la période préférée des internautes. Le 1er octobre 1997, France Télécom supprima à la stupeur de tous, la période « bleu nuit » pour se contenter d’appliquer entre 19h et 8h la période bleu clair, moins chère que la période en journée, mais plus coûteuse que la bleu nuit. Ceci en plein débat sur le faible essor d’Internet en France, alors que les habitants des États-Unis pouvaient accéder à Internet en illimité (en RTC). Ce document publié le 12 novembre 1997 explique notamment que « l'augmentation de 80 % des tarifs depuis le 1er octobre 1997 porte le coût horaire à 17 francs en journée et 8,80 francs en soirée ».
Mais revenons en 1997. Le bas débit règne en maître et beaucoup surfent donc à 56 kbps. Certains sont même encore à 33 kbps et parfois moins pour les plus malchanceux. D’autres, grâce aux offres TNIS (Numéris), pouvaient se vanter de surfer à 64 kbps et même à 128 kbps. À cette époque, télécharger de la musique, des vidéos, des patchs et des ISO et jouer en ligne (avec Duke Nukem 3D et Diablo 1 notamment) était tout à fait possible. Il fallait cependant s’armer de patience, ne pas à avoir à téléphoner ou avoir deux lignes, et bien sûr prévoir le budget. Payer sa facture téléphonique mensuelle ou bimestrielle 1000, 2000 ou 3000 francs, soit 150, 300 ou 450 euros, était ainsi monnaie courante pour ceux exploitant un minimum Internet quotidiennement.
Continuons cette fois avec les sites importants de l’époque :
Age of Empires premier du nom permis aussi de jouer en ligne, avec huit joueurs au maximum. Star Wars: X-Wing vs TIE Fighter de LucasArts permettait aussi de jouer en ligne. Enfin, n’oublions surtout pas des MMORPG très connus comme Neverwinter Nights (1991), Ultima Online (1997) ou encore Meridian 59 (1996). Certaines heures, les accès à tous ces jeux étaient bien difficiles et les "lags" étaient fréquents, surtout pour ceux qui n'avaient pas la chance de disposer d'une ligne correcte pour l'époque.
Lancé en 1995, RealPlayer fut un pionnier dans l’accès aux différents médias via streaming. C’est sans conteste l’ancêtre de tous les services de streaming audio et vidéo actuels. Il a cependant perdu énormément d’influence au milieu des années 2000 avec l’importance grandissante de Windows Media Player, iTunes, YouTube, etc.
S’il y avait là encore un incontournable de l’époque, c’est bien le lecteur multimédia Winamp. Si les outils de RealNetworks étaient pratiques pour le streaming, Winamp était parfait pour écouter de la musique (MP3, WAV ou Midi) et même d’autres types de contenus. Lancé lui aussi en 1997, le succès véritable succès de Winamp arriva cependant quelques années plus tard, notamment avec l’explosion du téléchargement de MP3 avec Napster en 1999.
Au final, le réseau internet (fixe) aujourd’hui s’utilise à la fois comme hier et complètement différemment. D’un côté, certains services ont juste été développés et ont profité de la montée en débit et de l’accès illimité. De l’autre, outre certains services et protocoles nouveaux, les sites ont fortement évolué, que ce soit techniquement, visuellement et d’un point de vue ergonomique. La consommation de l’information se fait différemment, notre façon de gérer notre identité numérique a changé, tout comme notre approche de la confidentialité et de la sécurité. Sauf exception, n’importe quel navigateur peut accéder à n’importe quelle page, ce qui n’était pas le cas en 1997. Et les compteurs de visites ont disparu.
On notera aussi que si l’on a aussi abandonné les GIF animés, les sons pourris et les fonds de sites web aux couleurs parfois criardes, on peut aussi considérer qu’ils ont été remplacés par la publicité, qui s’incruste aussi bien visuellement, auditivement, que dans les fonds des sites…
Enfin, si 1997 est la préhistoire du web (à moins que ce ne soit l'antiquité), dans quelle période historique nous trouvons-nous actuellement ?
Souvenir souvenir.
Les lignes internet
En 1997, la France compte entre 1 et 2 millions de foyers abonnés à internet. Tous en bas débit. L’ADSL n’a en effet été développé qu’en 1999 par certains FAI, et le câble est surtout dédié à la télévision à cette époque. Hormis Wanadoo (Orange), les principaux fournisseurs sont World-NET, Club Internet, Havas Online, AOL, Infonie, CompuServe, FranceNet, etc. Même les FAI aujourd’hui disparus comme Freesurf, Liberty Surf, Freesbee, Oreka, World Online, etc. n’ont vu le jour qu’entre 1998 et 2000.Aujourd’hui, la plupart des FAI cités dans le paragraphe ci-dessus ont mis la clé sous la porte au début des années 2000 ou ont été rachetés par Tiscali ou Neuf/SFR. Vous l’aurez compris, entre 1995 et 2000, la France a compté un nombre extraordinaire de fournisseurs d’accès à internet, très loin de la concentration du marché d’aujourd’hui. Leur rapidité à mourir a été tout aussi extraordinaire. La plupart n’ont vécu que deux ou trois ans, cinq ans pour les plus résistants. Et certains ont réalisé la performance de vivre tout juste une petite année. Mangoosta, spécialisé dans l’ADSL, a ainsi été créé en 2000 pour être racheté… l’année suivante.
Concernant les tarifs, les connexions étaient globalement payables à la minute et ils variaient selon la période de la journée. La nuit, bien moins onéreuse, était donc la période préférée des internautes. Le 1er octobre 1997, France Télécom supprima à la stupeur de tous, la période « bleu nuit » pour se contenter d’appliquer entre 19h et 8h la période bleu clair, moins chère que la période en journée, mais plus coûteuse que la bleu nuit. Ceci en plein débat sur le faible essor d’Internet en France, alors que les habitants des États-Unis pouvaient accéder à Internet en illimité (en RTC). Ce document publié le 12 novembre 1997 explique notamment que « l'augmentation de 80 % des tarifs depuis le 1er octobre 1997 porte le coût horaire à 17 francs en journée et 8,80 francs en soirée ».
Mais revenons en 1997. Le bas débit règne en maître et beaucoup surfent donc à 56 kbps. Certains sont même encore à 33 kbps et parfois moins pour les plus malchanceux. D’autres, grâce aux offres TNIS (Numéris), pouvaient se vanter de surfer à 64 kbps et même à 128 kbps. À cette époque, télécharger de la musique, des vidéos, des patchs et des ISO et jouer en ligne (avec Duke Nukem 3D et Diablo 1 notamment) était tout à fait possible. Il fallait cependant s’armer de patience, ne pas à avoir à téléphoner ou avoir deux lignes, et bien sûr prévoir le budget. Payer sa facture téléphonique mensuelle ou bimestrielle 1000, 2000 ou 3000 francs, soit 150, 300 ou 450 euros, était ainsi monnaie courante pour ceux exploitant un minimum Internet quotidiennement.
Les services et sites internet
Avant d’aborder ce qui existait, commençons tout d’abord par les absents de manière générale :- Il n’y avait pas de P2P : Napster a vu le jour en 1999.
- Il n’y avait pas de blogs : mais il y avait des « pages perso ».
- Il n’y avait pas de réseaux sociaux (hormis Classmates en Amérique du Nord).
- Il n’y avait pas de jeux flash
- Il n’y avait aucun service administratif en ligne
- Il n’y avait pas d’extension dans les navigateurs
- Il n’y avait pas PCINpact : même son ancêtre, INpact-Hardware, date de l’an 2000.
Continuons cette fois avec les sites importants de l’époque :
- Les sites informatiques et de jeux vidéo : pilier des sites informatiques français, Hardware.fr a vu le jour justement en 1997. Le site, créé par Marc Prieur, vient ainsi de fêter ses 15 années d’existence, ce qui est assez exceptionnel. Jeuxvideo.com et sa fameuse ETAJV (Encyclopédie des Trucs et Astuces de Jeux Vidéo) a lui aussi été lancé en 1997.
- Les moteurs de recherche : point de Google (créé en 1998) à cette époque, mais plutôt Yahoo!, Excite, Infoseek, Echo (ex-Voila) et surtout AltaVista. Créé en 1995, ce dernier était durant un temps incontournable, avant d’être écrasé par Yahoo! et Google quelques années plus tard. En 1997, outre AltaVista et Yahoo!, HotBot et surtout Lycos se sont fait un certain nom. Notons aussi l’existence du moteur de recherche Astalavista, qui s’appuyait à la fois sur la fameuse phrase hispanique « Hasta La Vista » et évidemment l’autre moteur Altavista. Astalavista avait pour particularité d’aider les internautes à trouver des cracks et diverses clés. En somme, il s’agit de l’un des premiers grands sites web de « pirates », même si l’expression était loin d’être généralisée à l’époque.
- Les plateformes de pages perso : véritables ancêtres des blogs, les pages persos ont eu leurs heures de gloire et de massacres visuels grâce à des plateformes comme les Américains GeoCities et Tripod, ou encore les Français Chez.com, iFrance et surtout Mygale.fr, racheté plus tard par Multimania.
- Les services de courrier électronique : si Gmail (2004) apparut très tardivement, de nombreux services existant encore aujourd’hui ont été fondés en 1996 et 1997. C’est notamment le cas de Hotmail (1996) et de Yahoo! Mail (1997). Notez qu’à l’origine, Hotmail était une société indépendante, rachetée très rapidement fin 1997 par Microsoft.
- Les sites de discussion (chat) : si IRC existait depuis près d’une dizaine d’années, pour le grand public, LE site de discussion en ligne fut de très loin celui de CaraMail. Lancé en 1997, CaraMail était utilisé par des dizaines de milliers d’utilisateurs simultanément, ce qui à l’époque était monstrueux. Le site fut racheté par Lycos en 2000 (comme bien d’autres) et subit logiquement le contrecoup des lancements de Yahoo! Messenger (1998), MSN (1999) et de tous les autres sites communautaires. Discuter et surtout draguer sur CaraMail a néanmoins perduré durant quelques années. Rajoutons enfin qu'en 1997, ICQ existait depuis un an.
- Les encyclopédies : sans en avoir les caractéristiques, l’ancêtre de Wikipédia (2001) se nommait pour les internautes de l’époque Encarta. Détenu par Microsoft, cette encyclopédie était surtout exploitée sous format CD (puis DVD plus tard), mais une version en ligne existait bien. Elle a disparu depuis quelques années.
- Les sites de cinéma : aujourd’hui, il y a AlloCiné et IMDB. Il y a 15 ans, il y avait Allociné et IMDB. Allocine.fr a en effet ouvert ses portes en 1997, tandis qu’IMDB, aujourd’hui propriété d’Amazon, a vu le jour six ans auparavant.
- Les sites d’achat en ligne : si la filiale française d’Amazon n’a ouvert qu’en 2000, sa version US, lancée en 1995, était déjà utilisée en France. Toutefois, l’achat en ligne étant un geste encore loin d’être accepté par tous, les sites français avaient la part belle. Alapage, lancé en 1996 et croqué par France Télécom en 1999, connut ainsi rapidement un beau succès. LDLC, créé en 1997, est lui aussi un survivant, et pas n’importe lequel.
- Les sites d’informations : d’après nos recherches, certains organes de presse ont été particulièrement en avance sur d’autres. Libération était déjà présent sur la toile en 1996 comme le prouve archive.org. Une belle performance, même si le nombre d’articles accessibles était très limité les premières années. LeMonde était d’ailleurs dans le même cas de figure.
- Rotten.com : le fameux site fait partie des piliers du web mondial encore en vie. Créé en 1996, le site est dédié à tout ce qui est dégueulasse (mutilations, maladies, autopsie, et j’en passe).
Les jeux en ligne
Outre les sites web, il était bien sûr déjà possible à l’époque de jouer en ligne en multijoueur. Duke Nukem 3D fut l’un des premiers à dépasser le cadre du jeu multijoueur en local et à proposer une option Internet. Diablo 1, exploitant le fameux Battle.net lancé en 1997, a lui aussi marqué les esprits. Command & Conquer, grâce à sa Gold Edition, a lui aussi accédé au multijoueur en ligne, tout comme Alerte Rouge en 1996 (8 maximum).Age of Empires premier du nom permis aussi de jouer en ligne, avec huit joueurs au maximum. Star Wars: X-Wing vs TIE Fighter de LucasArts permettait aussi de jouer en ligne. Enfin, n’oublions surtout pas des MMORPG très connus comme Neverwinter Nights (1991), Ultima Online (1997) ou encore Meridian 59 (1996). Certaines heures, les accès à tous ces jeux étaient bien difficiles et les "lags" étaient fréquents, surtout pour ceux qui n'avaient pas la chance de disposer d'une ligne correcte pour l'époque.
Les services de RealNetworks
RealPlayer. RealAudio. RealVideo. RealMedia. La société RealNetworks était quasi incontournable à cette époque si l’on voulait accéder en ligne à du contenu audio ou vidéo. Comme le montre la page d’accueil du site en 1997, l’entreprise se vante de pouvoir proposer une bonne qualité audio et vidéo en 28.8 kbps.Lancé en 1995, RealPlayer fut un pionnier dans l’accès aux différents médias via streaming. C’est sans conteste l’ancêtre de tous les services de streaming audio et vidéo actuels. Il a cependant perdu énormément d’influence au milieu des années 2000 avec l’importance grandissante de Windows Media Player, iTunes, YouTube, etc.
Winamp

S’il y avait là encore un incontournable de l’époque, c’est bien le lecteur multimédia Winamp. Si les outils de RealNetworks étaient pratiques pour le streaming, Winamp était parfait pour écouter de la musique (MP3, WAV ou Midi) et même d’autres types de contenus. Lancé lui aussi en 1997, le succès véritable succès de Winamp arriva cependant quelques années plus tard, notamment avec l’explosion du téléchargement de MP3 avec Napster en 1999.
Les navigateurs
Point de Google Chrome, Apple Safari et Mozilla Firefox en 1997. À cette époque, l'un des deux leaders étaient sans contestation Netscape Navigator, même s'il n'est devenu gratuit qu'à partir de 1998. Dominant totalement les débats entre 1995 et 1998, l’utilisation du navigateur commença à régresser fortement après l’intégration de Microsoft Internet Explorer 4 dans Windows 98. Indirectement, Netscape permit néanmoins à Mozilla de concurrencer Microsoft quelques années plus tard avec Firefox.Au final, le réseau internet (fixe) aujourd’hui s’utilise à la fois comme hier et complètement différemment. D’un côté, certains services ont juste été développés et ont profité de la montée en débit et de l’accès illimité. De l’autre, outre certains services et protocoles nouveaux, les sites ont fortement évolué, que ce soit techniquement, visuellement et d’un point de vue ergonomique. La consommation de l’information se fait différemment, notre façon de gérer notre identité numérique a changé, tout comme notre approche de la confidentialité et de la sécurité. Sauf exception, n’importe quel navigateur peut accéder à n’importe quelle page, ce qui n’était pas le cas en 1997. Et les compteurs de visites ont disparu.
On notera aussi que si l’on a aussi abandonné les GIF animés, les sons pourris et les fonds de sites web aux couleurs parfois criardes, on peut aussi considérer qu’ils ont été remplacés par la publicité, qui s’incruste aussi bien visuellement, auditivement, que dans les fonds des sites…
Enfin, si 1997 est la préhistoire du web (à moins que ce ne soit l'antiquité), dans quelle période historique nous trouvons-nous actuellement ?