La lettre de l'UFC aux eurodéputés appelant au rejet d'ACTA

Exclusif PC INpact. L’accord anti contrefaçon ACTA sera voté en commissions au Parlement européen la semaine prochaine. Une semaine décisive puisque ces dernières étapes vont orienter l'adoption ou le rejet d'ACTA par tout le Parlement et donc l'Union européenne. Après la CNIL européenne, après le projet de rapport de Dimitrios Droutsas, un nouveau coup est porté à cet accord décrié : l’UFC-Que Choisir vient d’adresser un courrier à l’ensemble des eurodéputés membres des commissions parlementaires concernées (ITRE, LIBE, JURI, INTA et DEVE) pour dénoncer les points noirs d’ACTA.

UFC Que Choisir rejet lettre ACTA

En février 2012, en pleine campagne de François Hollande, Aurélie Filippetti et Fleur Pellerin, aujourd'hui respectivement ministre de la Culture et de l'Economie numérique, avaient déjà demandé au Parlement Européen de rejeter ACTA. Une autre voix française réclame désormais ce rejet, celle de l'association UFC Que Choisir.

Dans un courrier que nous nous sommes procuré, le président de l’UFC-Que Choisir, Alain Bazot, exprime sa « vive opposition à l’Accord commercial anti contrefaçon », qu’il accuse de renforcer les droits de propriété intellectuelle « au détriment des droits des consommateurs et des libertés fondamentales ».

L’affirmation est suivie d’un listing des articles problématiques.

Ainsi, l’article 27.4 de l’ACTA :
« Une Partie peut prévoir que ses autorités compétentes seront habilitées, en conformité avec ses lois et réglementations, à ordonner à un fournisseur de services en ligne de divulguer rapidement au détenteur du droit des renseignements suffisants pour lui permettre d’identifier un abonné dont il est allégué que le compte aurait été utilisé en vue de porter atteinte à des droits, lorsque le détenteur du droit a présenté des allégations suffisantes sur le plan juridique, relativement à une atteinte à une marque de fabrique ou de commerce ou au droit d’auteur ou à des droits connexes, et lorsque ces renseignements sont demandés aux fins de la protection ou du respect de ces droits. Ces procédures sont mises en oeuvre d’une manière qui évite la création d’obstacles aux activités légitimes, y compris au commerce électronique, et qui, en conformité avec la législation de cette Partie, préserve les principes fondamentaux comme la liberté d’expression, les procédures équitables et le respect de la vie privée. »
Cet article permettra d’obliger un FAI à divulguer l’identité d’un consommateur abonné en cas de violation d’un droit d’auteur ou d’un droit voisins. Problème, « ACTA ne fait pas référence aux autorités judiciaires » remarque l’UFC, qui criant que les FAI aient à  « surveiller le comportement en ligne des utilisateurs et à communiquer des données à caractère personnel en dehors du contexte d'une procédure judiciaire et sur simple allégation (il n’est nulle part fait mention de preuves suffisantes nécessaires). »

Violation alléguée, preuve allégée

Ce bout de texte focalise encore l’attention puisqu’il se satisfait d’une « violation alléguée » pour obliger les FAI à collaborer avec l’ayant sur le présumé coupable. « Cependant, il n'existe pas de définition claire de ce qu'est une violation « alléguée », ouvrant ainsi clairement la porte à des abus par les titulaires de droits qui peuvent demander la suppression de contenu sans avoir à fournir des preuves solides d'une infraction réelle. »

L’accord utilise également l’expression de « procédure équitable » (art.27.2), plutôt que celle de l'habituel droit à un recours effectif, dont les juges ont encadré aujourd’hui la définition. Dans la même veine à l’article 12, « l’accord ne prévoit pas les garanties procédurales pour les défendeurs, à savoir le droit d'être entendu et le droit de demander une révision de la décision ». Fâcheux.

Un traité bien mal acquis

Ce n’est pas tout, l’UFC Que Choisir estime en outre que l'accord n'est pas compatible avec l'acquis communautaire, contrairement aux affirmations des pro-ACTA. Quelques exemples : l’article 23 expose que les parties à l’accord doivent prévoir « des procédures pénales et des peines applicables au moins pour les actes délibérés de contrefaçon de marque de fabrique ou de commerce ou de piratage portant atteinte à un droit d’auteur ou à des droits connexes, commis à une échelle commerciale ». L’article précise que « les actes commis à une échelle commerciale comprennent au moins ceux qui sont commis à titre d’activités commerciales en vue d’un avantage économique ou commercial direct ou indirect ».

Le hic est que cette notion d’échelle commerciale « n'apparaît pas dans l'acquis actuel de l'UE. Cette définition très large comprend au moins les actes commis à titre d'activités commerciales en vue d'un avantage économique ou commercial direct ou indirect, mais également tout acte de « complicité ». Il n'existe aucune définition de ce que «avantage économique indirect» et «complicité» signifient ».

Dommages et intérêts punitifs

Autre bug, l’accord indique que lorsque le juge détermine des dommages et intérêts dans une affaire donnée, il doit tenir compte de divers paramètres comme « la valeur de la marchandise ou du service contrefait, mesurée au prix du marché, ou le prix de détail suggéré ». Or, ces notions, fustige l’UFC, n’existent nulle part dans le droit communautaire et « ne reflète pas la perte économique réelle subie par le titulaire des droits ». On le comprend, cependant, en prévoyant des critères très larges, les ayants droit pourront réclamer des dommages et intérêts toujours plus fort, voire punitifs.

Une baffe contre ACTA, une autre contre Hadopi

En conclusion, Alain Bazot adhère aux critiques déjà adressées à ce traité par plusieurs eurodéputées : « une solution « tout-en-un » qui traite à la fois des médicaments dangereux contrefaits et des téléchargements numériques de musique n'est ni rationnelle, ni proportionnée. » Plutôt que de pousser toujours plus loin le droit de la sanction, « il me paraît évident que le développement de l’offre légale est la solution à privilégier en priorité. » Pour illustrer ses propos et appeler les eurodéputés à rejeter ACTA, l’UFC prend pour exemple le cas français : « A la lumière de la mise en oeuvre d’Hadopi en France, on voit bien que la seule répression ne mène nulle part, et n’est satisfaisante ni pour les titulaires de droits qui n’ont pas vu leurs revenus augmenter ; ni pour les consommateurs qui n’ont pas changé leur comportement vis-à-vis du téléchargement et ne bénéficient toujours pas d’une offre légale de qualité ».

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