À un mois de l'élection présidentielle, la Hadopi s'estime utile

17 mois après l’envoi du premier mail, révélé dans nos colonnes, la Hadopi publie son précieux rapport d’étape expliquant des effets sur le téléchargement illégal. Rien ne l’obligeait à publier un tel document puisque seuls des indicateurs annuels sont prévus par la loi. Cependant, à quatre semaines du premier tour de l’élection présidentielle et alors que son remplacement est acté dans le camp Hollande, la Hadopi se devait d’expliquer au monde entier combien elle est utile.

D’entrée, Hadopi laisse entendre qu’Hadopi aurait participé à favoriser l’offre légale, remis les abonnés dans le droit chemin et fait reculer plusieurs plateformes P2P. La Rue de Texel, qui ne se concentre que sur ce protocole, s’époumone aussi à nous dire que rien ne permet de constater un report vers le streaming ou le direct download.

Des effets de la menace graduée

Sur la foi des chiffres de la Commission de protection des droits, Hadopi soutient que « la réception d’une recommandation Hadopi entraîne un changement de comportement chez la très grande majorité des destinataires ». 95%, 92% et même 98% des abonnés ayant reçu une première, seconde ou troisième recommandation « ne se voient pas reprocher un nouveau comportement de consommation illicite sur les réseaux pair-à-pair » dans les délais d’examen.

71% des abonnés en 3e phase ont même contacté la Hadopi « pour s’engager à prendre des dispositions visant à sécuriser leur accès à internet ou à faire cesser toute consommation illicite via les réseaux pair-à-pair ». Ce qui laisse tout de même 29% d’abonnés qui se fichent de ces engagements.

La Hadopi se garde bien de définir ce que sont les moyens de sécurisation mis en place par ces armées d'abonnées. Et pour cause, elle ne parvient toujours pas elle-même à en définir les caractéristiques principales.

Quand l'un avance, l'autre recule

Cela dit, la Hadopi met sur la table une série d’étude pour expliquer que dans le même temps, le P2P a baissé et l’offre légale se stabilise voire, gagne des points. Le tout en laissant déduire dans l'esprit du lecteur, un lien de cause à effet mécanique.

Quatre études de mesures des réseaux P2P ont toutes constaté une baisse du P2P « et de ses usages illicites en France ». Nielsen par exemple constate une baisse de 17% du P2P en 2011. Ou plus exactement « de l’audience des sites proposant des liens vers des fichiers et applications P2P ».

Chez Mediametrie//netRatings, la baisse d’audience « des écosystèmes liés à certains clients P2P en 2011 » est de 29% depuis octobre 2011 (uTorrent, Bittorrent, eMule et LimeWire) Hadopi s’épaule aussi des chiffres fournis par Peer Media Technologies. Cette entreprise est était connue sous son ancien nom, MediaDefender. Celle-ci s’était fait une spécialité dans la diffusion de fake sur les réseaux P2P, en oeuvrant pour la MPAA ou la RIAA. La société avait également été aux manettes de Miivi.com un site de streaming diffusant des films sous copyright. En fait, un véritable pot de miel qui fut rapidement mis hors ligne après la découverte du pot aux roses...

mediadefender

Pour son étude, Peer Media Technologies – Mediadefenders assure cette fois que les mises à disposition depuis la France ont chuté de 43% entre décembre 2009 et décembre 2011, « sur un échantillon de 200 à 300 films récents (en rotation) ». On, imagine évidemment la satisfaction côté MPAA et RIAA qui soutiennent la Hadopi, depuis la préhistoire de ce dispositif. 

Même son de cloche harmonieux du côté de l’ALPA, qui est ici juge et partie puisqu’impliquée jusqu’au cou dans le process Hadopi : en 2011, la mise à disposition illicite de films sur les réseaux aurait chuté de 66%. En fait, cette baisse ne concerne que le top 10 des films les plus détectés, non la totalité des 100 œuvres surveillées par l’Association pour la Lutte contre la Piraterie Audiovisuelle. Fait intéressant, la Hadopi indique qu’elle poursuivra ses études à l’aide de « la mise en production du nouveau système d’information de la réponse graduée, intervenue dans le 1er trimestre 2012 ». Ce système permet en effet à la Hadopi de traiter en masse l’intégralité des IP que lui transmettent les ayants droit chaque jour.

Reports ou pas reports ?

Face à ces baisses constatées sur les écrans, la Hadopi se refuse dans le même temps de conclure à un « report important des usages sur les services de streaming et de téléchargement direct ». Il serait en effet fâcheux qu'Hadopi soit accusée de pousser des trains d'abonnés sur d'autres formes d'échanges en ligne.

Entre décembre 2010 et décembre 2011, ce report « n’est pas démontré » tambourine-t-elle, certains services gagnant en audience (Megaupload, Streamiz, DPStream, Film 2 Streaming) d’autres reculant (Radpishare, Hotfile, Megavideo). En tout, cependant, 6 services sur 14 gagnent des points.

hadopi 

Dans le même temps, Hadopi indique cette fois que l’audience des « offres culturelles en ligne gagne en quantité et qualité ». En fait, seules cinq plateformes gagnent des points d’audience (Beezik, Spotify et Qobuz étant les progressions les plus fortes). Toutes les autres étant en recul. « La mesure d’audience Médiametrie // NetRatings en décembre 2010 et décembre 2011 traduit une stabilisation globale de l’offre, marquée de quelques belles progressions » commente cette fois la Hadopi, nettement plus positive dans son approche et son interprétation.

hadopi

Une PUR merveille

Autre chose, la Hadopi a concentré son attention sur les 16 plateformes labellisées : leur audience a, au total, augmenté de 20%. La Hadopi ne va pas jusqu’à en déduire un effet d’entrainement qui inciterait les consommateurs à se jeter carte bleue en main sur ces offres estampillées « PUR »…

IFPI, carte musique jeune, 8 euros

À l’instar de l’étude dévoilée par l’IFPI, les données n’ont pas été rapprochées des ventes de mobiles qui ont pu porter les opérations sur les plateformes comme iTunes. La Hadopi n’a davantage évoqué les effets de la Carte Musique Jeune alors que le dispositif n’est réservé qu’aux sites labellisés par elle.

Dans son document, la Hadopi affirme aussi qu’« il est encore trop tôt pour évaluer les conséquences de la fermeture de Megaupload », intervenue en janvier. Trop tôt ? Le 7 mars dernier, la même Hadopi soutenait déjà l’existence d’« un report d’audience significatif vers les plateformes légales » après la fermeture de la plateforme de Kim DotCom...

On attend maintenant avec impatience la prochaine étude de la Hadopi mesurant l’effet de la future hausse de la VOD souhaité par les producteurs de musique. Leur appétit (une marge de 4 euros) devrait conduire en effet le prix des films à 8 euros. Le budget des Français travaillant-et-gagnant-donc-plus étant extensible à l’infini, on ne se fait aucun doute sur le sens des courbes.

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