« SurvivorMode » « Metamorphose » voilà quelques-uns des premiers commentaires laissés sur Twitter pour accompagner la publication par la Hadopi d’un grand questionnaire sur les exceptions au droit d’auteur et aux droits voisins.
À huit semaines de l’élection présidentielle, la vivifiante, mais menacée Hadopi lance donc une consultation pour savoir « si le développement des nouveaux usages numériques doit conduire à modifier la définition, la nature et la portée de certaines exceptions, en appréciant leur légitimité ».
Ce chantier, précise la Rue de Texel, « bénéficie de l’expertise de Christophe Alleaume, agrégé de droit privé et professeur à la Faculté de Droit et des Sciences Politiques de Caen et de Cécile Méadel, professeur de sociologie et chercheur à l’école des Mines de Paris, tous deux experts des Labs de l’Hadopi. »
Christophe Alleaume ? C’est lui qui, en janvier dernier, soutenait au Sénat que DADVSI et Hadopi « parvenaient à un équilibre entre la liberté d’un côté et les droits d’auteur de l’autre » : « Depuis 2006, précisait encore cet universitaire, les lois françaises ont réussi d’une part à étendre la liberté d’internet (…) maintenir une protection du droit d’auteur, tout ceci passant par une responsabilisation de l’internaute. Ce sont ces trois objectifs qui sont poursuivis par le législateur depuis 2006. »
Il ajoutait aussi durant son allocution que bon nombre d’exceptions avaient été décidées depuis la loi DADVSI dont l’exception pédagogique, la copie technique, celle pour les handicapés, celle en faveur des musées, bibliothèques et autres archives, ou encore celles touchant à la presse. « Une seule est compensée par une rémunération négociée ».
Aujourd'hui, la Hadopi le claironne haut et fort : « ce nouvel équilibre ne se limiterait pas à amender et compléter les exceptions aux droits d’auteurs et aux droits voisins ; il pourrait viser à instituer un « droit à l’exception » voire un « droit de l’exception » passant notamment par l’élaboration d’un régime juridique autonome, invocable devant le juge à égalité avec le droit de la propriété intellectuelle ».
Des exemples ? Est-ce que l’exception pour représentation dans le cadre du cercle de famille (L. 122-5 1°) doit couvrir le streaming ? La source de la représentation doit-elle être licite ?
Sur la copie privée ? « Soulève-t-elle des difficultés de mise en oeuvre ? Si oui, quelles seraient les adaptations législatives ou réglementaires nécessaires ? En particulier, la définition actuelle du « copiste » et de ce qu’est la « copie » à l’ère du numérique vous paraît-elle satisfaisante ? La fixation d’un nombre maximal de copies autorisées vous semblerait-elle avoir un sens ? Ce seuil est-il le même pour tous les supports ? »
Dans ses fourneaux, la Hadopi relance aussi la problématique de la source licite de la copie privée, qui s’est invitée trop rapidement dans les débats parlementaires de la récente loi adoptée fin 2011. « Quels inconvénients, difficultés, ou au contraire quels avantages voyez-vous à une telle évolution ? »
On continue ? Une myriade d’autres questions portent aussi les courtes citations, l’exception de revue de presse, celle de la reproduction à des fins pédagogiques, de parodie, de pastiche et de caricature, des bases de données, des copies techniques transitoires et même des logiciels ou des bases de données…
La Hadopi ne manque pas non plus d’aborder la problématique du test en trois étapes, si bien appliquée en France par la future présidente de la Hadopi, Marie Françoise Marais à la Cour de cassation dans l’arrêt Mullholand Drive :
Autre exemple « faut-il créer, sur le modèle de l’exception de copie privée, une exception permettant le partage d’oeuvres à des fins non commerciales entre personnes physiques, assortie d’un mécanisme de compensation équitable ? Faudrait-il limiter l’exception à un nombre « x » de personnes ? Voire aux seules personnes proches (familles, amis) ? Quels autres critères permettant de définir le périmètre du groupe concerné sont envisageables ? »
La Hadopi est même très ambitieuse : « serait-il souhaitable de créer une nouvelle exception couvrant tous les actes de reproduction et d’utilisation sans valeur économique qui sont nécessaires à l’utilisation d’une technologie ? »
N’en jetez plus !
Depuis ses discours à Nantes et au Bourget, le candidat PS a promis dans le même temps, le futur acte 2 de l’exception culturelle française qui viendra fleurir la tombe de cette institution jugée inutile.
L’idée sera de trouver notamment de nouvelles sources de financement reposant justement sur l’extension des exceptions. « Dans les nouvelles sources de financement, il faudra également inclure la rémunération pour copie privée. Il serait plutôt normal qu’elle soit étendue au flux et plus seulement aux supports physiques, comme c’était le cas à l’ère des cassettes audio ou vidéo » précisait Aurélie Filippetti dans les colonnes de Libération.
Une pierre, deux coups, et même trois : pendant ce temps, en coulisse, la machine à avertissements poursuit, elle, sa montée en puissance contre les abonnées toujours incapables de saisir les subtilités de la négligence caractérisée.
À huit semaines de l’élection présidentielle, la vivifiante, mais menacée Hadopi lance donc une consultation pour savoir « si le développement des nouveaux usages numériques doit conduire à modifier la définition, la nature et la portée de certaines exceptions, en appréciant leur légitimité ».
Ce chantier, précise la Rue de Texel, « bénéficie de l’expertise de Christophe Alleaume, agrégé de droit privé et professeur à la Faculté de Droit et des Sciences Politiques de Caen et de Cécile Méadel, professeur de sociologie et chercheur à l’école des Mines de Paris, tous deux experts des Labs de l’Hadopi. »
Christophe Alleaume ? C’est lui qui, en janvier dernier, soutenait au Sénat que DADVSI et Hadopi « parvenaient à un équilibre entre la liberté d’un côté et les droits d’auteur de l’autre » : « Depuis 2006, précisait encore cet universitaire, les lois françaises ont réussi d’une part à étendre la liberté d’internet (…) maintenir une protection du droit d’auteur, tout ceci passant par une responsabilisation de l’internaute. Ce sont ces trois objectifs qui sont poursuivis par le législateur depuis 2006. »
Il ajoutait aussi durant son allocution que bon nombre d’exceptions avaient été décidées depuis la loi DADVSI dont l’exception pédagogique, la copie technique, celle pour les handicapés, celle en faveur des musées, bibliothèques et autres archives, ou encore celles touchant à la presse. « Une seule est compensée par une rémunération négociée ».
Un chantier, un état des lieux des exceptions
Dans la consultation annoncée aujourd’hui, et dont les réponses doivent être envoyée à Jacques Toubon d’ici le 15 mai (neuf jours après le second tour), la Hadopi se propose justement de lancer « un chantier » et « de dresser un état des lieux» pour « formuler des recommandations pour remédier aux imperfections du système actuel et tenter de définir un équilibre plus satisfaisant, porteur d’un nouveau consensus ». Des imperfections qui n'avaient pas été soulignées au Sénat.Aujourd'hui, la Hadopi le claironne haut et fort : « ce nouvel équilibre ne se limiterait pas à amender et compléter les exceptions aux droits d’auteurs et aux droits voisins ; il pourrait viser à instituer un « droit à l’exception » voire un « droit de l’exception » passant notamment par l’élaboration d’un régime juridique autonome, invocable devant le juge à égalité avec le droit de la propriété intellectuelle ».
Cercle de famille, copie privée, sources licites...
Pour trouver ces pistes, la Hadopi met en ligne un grand questionnaire qui servira à rédiger un rapport. Les questions mitraillées dans ce PDF visent toutes les exceptions, aussi larges ou précises soient-elles.Des exemples ? Est-ce que l’exception pour représentation dans le cadre du cercle de famille (L. 122-5 1°) doit couvrir le streaming ? La source de la représentation doit-elle être licite ?
Sur la copie privée ? « Soulève-t-elle des difficultés de mise en oeuvre ? Si oui, quelles seraient les adaptations législatives ou réglementaires nécessaires ? En particulier, la définition actuelle du « copiste » et de ce qu’est la « copie » à l’ère du numérique vous paraît-elle satisfaisante ? La fixation d’un nombre maximal de copies autorisées vous semblerait-elle avoir un sens ? Ce seuil est-il le même pour tous les supports ? »
Dans ses fourneaux, la Hadopi relance aussi la problématique de la source licite de la copie privée, qui s’est invitée trop rapidement dans les débats parlementaires de la récente loi adoptée fin 2011. « Quels inconvénients, difficultés, ou au contraire quels avantages voyez-vous à une telle évolution ? »
On continue ? Une myriade d’autres questions portent aussi les courtes citations, l’exception de revue de presse, celle de la reproduction à des fins pédagogiques, de parodie, de pastiche et de caricature, des bases de données, des copies techniques transitoires et même des logiciels ou des bases de données…
La Hadopi ne manque pas non plus d’aborder la problématique du test en trois étapes, si bien appliquée en France par la future présidente de la Hadopi, Marie Françoise Marais à la Cour de cassation dans l’arrêt Mullholand Drive :
Le critère de l’exploitation « normale » de l’oeuvre vous semble-t-il satisfaisant ? Comment définir une exploitation normale de l’oeuvre à l’heure du numérique, notamment en cas de divergences d’intérêts entre les différents titulaires de droits (droit d’auteur et droits voisins) ? Qu’est selon vous un préjudice « injustifié » ? Et que sont les intérêts « légitimes » des titulaires de droits ? Les critères actuels d’interprétation de ces notions vous semblent-ils satisfaisants ? Comment apprécie-t-on le préjudice causé aux intérêts légitimes des titulaires de droits, et son caractère éventuellement justifié, notamment en cas de divergences d’intérêts entre ces derniers ? Est-il utile et justifié de maintenir un filtre tel que le test en trois étapes au stade de l’application des exceptions ?
Le fair use, le partage des oeuvres à des fins non commerciales...
Ne nous n'arrêtons pas là : la Hadopi veut aussi savoir si le moment ne serait pas venu de mettre le cap sur une « approche ouverte des exceptions (fair use), sur le modèle des États-Unis ». « Faut-il introduire de nouvelles exceptions en droit français ? Ou élargir le champ d’application des exceptions existantes ? »Autre exemple « faut-il créer, sur le modèle de l’exception de copie privée, une exception permettant le partage d’oeuvres à des fins non commerciales entre personnes physiques, assortie d’un mécanisme de compensation équitable ? Faudrait-il limiter l’exception à un nombre « x » de personnes ? Voire aux seules personnes proches (familles, amis) ? Quels autres critères permettant de définir le périmètre du groupe concerné sont envisageables ? »
Get up, Mash-up
Les musiciens apprécieront aussi le geste : « faut-il créer une exception pour les oeuvres « d’assemblage » (mash up, mixage, sampling, collage, etc.), c'est-à-dire des oeuvres créées à partir de la réutilisation d’oeuvres originales existantes ? »La Hadopi est même très ambitieuse : « serait-il souhaitable de créer une nouvelle exception couvrant tous les actes de reproduction et d’utilisation sans valeur économique qui sont nécessaires à l’utilisation d’une technologie ? »
N’en jetez plus !
L'acte 2 de l'exception culturelle, version Hadopi
L'émotion passée, ce grand chantier tombe sur le calendrier de manière miraculeuse. François Hollande a précisé à plusieurs reprises qu’il organiserait l’enterrement de la Hadopi, cette autorité jugée « inefficace, coûteuse, et surtout qui ne rapporte rien à la création » selon les récents propos Fleur Pellerin.Depuis ses discours à Nantes et au Bourget, le candidat PS a promis dans le même temps, le futur acte 2 de l’exception culturelle française qui viendra fleurir la tombe de cette institution jugée inutile.
L’idée sera de trouver notamment de nouvelles sources de financement reposant justement sur l’extension des exceptions. « Dans les nouvelles sources de financement, il faudra également inclure la rémunération pour copie privée. Il serait plutôt normal qu’elle soit étendue au flux et plus seulement aux supports physiques, comme c’était le cas à l’ère des cassettes audio ou vidéo » précisait Aurélie Filippetti dans les colonnes de Libération.
Une pierre, trois coups
Avec ce questionnaire qui n'engage personne, et surtout pas la France prisonnière de ses traités internationaux, la stratégie de la Hadopi est ici limpide : damer le pion à son bourreau avec une grande concertation sur l’avenir des exceptions. Mieux : en optant pour la formule du questionnaire ouvert, la Hadopi peut espérer une nouvelle fois faire oublier le béton de ses murs. Voilà donc une Hadopi conviviale, prête à discuter, échanger, écouter et faire ainsi « son » acte 2 de l’exception culturelle avant celui d'Hollande.Une pierre, deux coups, et même trois : pendant ce temps, en coulisse, la machine à avertissements poursuit, elle, sa montée en puissance contre les abonnées toujours incapables de saisir les subtilités de la négligence caractérisée.