Le député Lionel Tardy vient de déposer un amendement 308 au projet de loi Protection du Consommateur. Un amendement qui risque de provoquer des remous.
Le député UMP souhaite en effet que le législateur rajoute un article L. 122-1 au code de la consommation, rédigé en ces termes : « La vente d'un ordinateur, de son logiciel d'exploitation et des logiciels applicatifs doit être découplée. Un décret définit les modalités d’application du présent article. »
Cet amendement ne nous est pas étranger puisqu’il reprend - en le renforçant - celui de Frédérique Massat. La députée avait déposé avec d’autres parlementaires PS un texte en juin dernier soutenant que « la vente d’un ordinateur et de son logiciel d’exploitation doit être découplée ». On le voit, Tardy veut faire du découplage une norme commerciale en poussant sa logique jusqu’aux logiciels applicatifs et pas seulement aux blocs matériel et OS.
L'amendement Massat repoussé en Commission
L’amendement Massat avait cependant été rejeté en Commission des affaires économiques (MàJ : il vient d'être redéposé). On se souvient de l’échange épique qui avait opposé le PS avec le rapporteur Fasquelle ou la députée UMP Laure de la Raudière.
Quand le PS expliquait nécessaire qu’on « arrête de prendre en otage les acheteurs d’ordinateurs avec obligation d’utiliser un seul type de logiciel », Laure de la Raudière soutenait qu’« Il est (…) très pratique pour le consommateur d’acheter un ordinateur avec un logiciel installé. Si vous les séparez, comment permettre la préfabrication des ordinateurs et la livraison dans les vingt-quatre à quarante-huit heures des ordinateurs achetés à distance ou en magasin ? Votre disposition ne répond pas aux besoins des Français ». La députée en charge du numérique à l’UMP expliquait son opposition, car « la vente séparée intéresse les geeks, qui sont très informés : ils savent où et comment acheter des ordinateurs nus et le logiciel d’exploitation séparé qu’ils désirent »…
Une première réponse parlementaire d'Éric Besson
De telles dispositions pourraient poser des problèmes de compatibilité avec le droit européen, ajoutait le rapporteur, pour qui il était surtout urgent de ne pas se précipiter. Un argumentaire qui tire sa filiation d’une précédente réponse parlementaire d’Éric Besson pour qui une « abondante jurisprudence n'a pas permis aux pouvoirs publics d'obliger la mise en place des ventes d'ordinateurs sans OS ». Le ministre s’abritait derrière plusieurs arrêts, et spécialement une décision de la CJUE visant la Belgique (qui concernait toutefois les ventes conjointes, plus que les ventes subordonnées) ou un arrêt de la Cour de cassation qui imposait aux juges du fond de faire une analyse in concreto avant d'affirmer que telle vente liée est déloyale.
Avec son amendement persistant et plus musclé, Lionel Tardy ne se satisfait donc pas de ces explications : « la Cour d'appel de Versailles a rappelé le 5 mai 2011 que de telles pratiques s'apparentaient à des pratiques commerciales déloyales, tant par l'absence d'information du consommateur que par le fait que les constructeurs proposent des machines sans logiciels préinstallés aux clients professionnels tout en les refusant au grand public, ce qui est contraire aux exigences de la diligence professionnelle ».
Dénouer la vente liée par la technique du code d'activation
Mieux – et on devine une forme de réponse à la députée Laure de la Raudière, Tardy décrit la faisabilité technique permettant de délier ces ventes : c’est le système de codes d'activation. « Ces codes, à acquérir séparément, permettent aux professionnels de choisir leurs logiciels, choix qui est donc refusé sans raison valable aux particuliers. Un autre système a été mis en place pour les navigateurs Internet, suite à une demande de la Commission européenne. » C’est le ballot screen, comme présenté ci-dessous :
Selon Tardy, l’adoption de cet amendement permettrait ainsi « de rétablir le choix des consommateurs et d'améliorer la concurrence sur le marché des logiciels ».
Contactée, l’APRIL se félicite de l’initiative alors qu’elle vient de publier une nouvelle page dédiée à cette problématique. Pour Frédéric Couchet, délégué général, l’idée est simple : « avec cet amendement, le gouvernement a une occasion idéale pour agir en faveur de la concurrence et du libre choix des consommateurs et tenir ses engagements du plan France Numérique 2012. Il suffit de donner un avis favorable à l'amendement du député Tardy. »
Cet amendement tombe au mauvais moment pour Éric Besson. Le ministère de l’économie numérique doit justement présenter le bilan de son plan 2012 où il promettait l’expérimentation de la vente déliée et la ventilation des prix. Deux actions restées dans les cartons. Du coup, si le ministre s’oppose à l’amendement Tardy, il devra aussi renier ses propres promesses faites en 2008 depuis les salons de l’Élysée.
Le député UMP souhaite en effet que le législateur rajoute un article L. 122-1 au code de la consommation, rédigé en ces termes : « La vente d'un ordinateur, de son logiciel d'exploitation et des logiciels applicatifs doit être découplée. Un décret définit les modalités d’application du présent article. »
Cet amendement ne nous est pas étranger puisqu’il reprend - en le renforçant - celui de Frédérique Massat. La députée avait déposé avec d’autres parlementaires PS un texte en juin dernier soutenant que « la vente d’un ordinateur et de son logiciel d’exploitation doit être découplée ». On le voit, Tardy veut faire du découplage une norme commerciale en poussant sa logique jusqu’aux logiciels applicatifs et pas seulement aux blocs matériel et OS.
L'amendement Massat repoussé en Commission
L’amendement Massat avait cependant été rejeté en Commission des affaires économiques (MàJ : il vient d'être redéposé). On se souvient de l’échange épique qui avait opposé le PS avec le rapporteur Fasquelle ou la députée UMP Laure de la Raudière.
Quand le PS expliquait nécessaire qu’on « arrête de prendre en otage les acheteurs d’ordinateurs avec obligation d’utiliser un seul type de logiciel », Laure de la Raudière soutenait qu’« Il est (…) très pratique pour le consommateur d’acheter un ordinateur avec un logiciel installé. Si vous les séparez, comment permettre la préfabrication des ordinateurs et la livraison dans les vingt-quatre à quarante-huit heures des ordinateurs achetés à distance ou en magasin ? Votre disposition ne répond pas aux besoins des Français ». La députée en charge du numérique à l’UMP expliquait son opposition, car « la vente séparée intéresse les geeks, qui sont très informés : ils savent où et comment acheter des ordinateurs nus et le logiciel d’exploitation séparé qu’ils désirent »…
Une première réponse parlementaire d'Éric Besson
De telles dispositions pourraient poser des problèmes de compatibilité avec le droit européen, ajoutait le rapporteur, pour qui il était surtout urgent de ne pas se précipiter. Un argumentaire qui tire sa filiation d’une précédente réponse parlementaire d’Éric Besson pour qui une « abondante jurisprudence n'a pas permis aux pouvoirs publics d'obliger la mise en place des ventes d'ordinateurs sans OS ». Le ministre s’abritait derrière plusieurs arrêts, et spécialement une décision de la CJUE visant la Belgique (qui concernait toutefois les ventes conjointes, plus que les ventes subordonnées) ou un arrêt de la Cour de cassation qui imposait aux juges du fond de faire une analyse in concreto avant d'affirmer que telle vente liée est déloyale.
Avec son amendement persistant et plus musclé, Lionel Tardy ne se satisfait donc pas de ces explications : « la Cour d'appel de Versailles a rappelé le 5 mai 2011 que de telles pratiques s'apparentaient à des pratiques commerciales déloyales, tant par l'absence d'information du consommateur que par le fait que les constructeurs proposent des machines sans logiciels préinstallés aux clients professionnels tout en les refusant au grand public, ce qui est contraire aux exigences de la diligence professionnelle ».
Dénouer la vente liée par la technique du code d'activation
Mieux – et on devine une forme de réponse à la députée Laure de la Raudière, Tardy décrit la faisabilité technique permettant de délier ces ventes : c’est le système de codes d'activation. « Ces codes, à acquérir séparément, permettent aux professionnels de choisir leurs logiciels, choix qui est donc refusé sans raison valable aux particuliers. Un autre système a été mis en place pour les navigateurs Internet, suite à une demande de la Commission européenne. » C’est le ballot screen, comme présenté ci-dessous :
Selon Tardy, l’adoption de cet amendement permettrait ainsi « de rétablir le choix des consommateurs et d'améliorer la concurrence sur le marché des logiciels ».
Contactée, l’APRIL se félicite de l’initiative alors qu’elle vient de publier une nouvelle page dédiée à cette problématique. Pour Frédéric Couchet, délégué général, l’idée est simple : « avec cet amendement, le gouvernement a une occasion idéale pour agir en faveur de la concurrence et du libre choix des consommateurs et tenir ses engagements du plan France Numérique 2012. Il suffit de donner un avis favorable à l'amendement du député Tardy. »
Cet amendement tombe au mauvais moment pour Éric Besson. Le ministère de l’économie numérique doit justement présenter le bilan de son plan 2012 où il promettait l’expérimentation de la vente déliée et la ventilation des prix. Deux actions restées dans les cartons. Du coup, si le ministre s’oppose à l’amendement Tardy, il devra aussi renier ses propres promesses faites en 2008 depuis les salons de l’Élysée.