La CJUE met sous pression le statut de l'intermédiaire technique

Une affaire susceptible d'avoir de nombreux effets en matière de responsabilité des intermédiaires techniques vient d'être rendue par la CJUE.

ebay homepage

En l'espèce, L'Oréal avait attaqué eBay dans cinq pays, dont l'Angleterre. Principal reproche : le géant du cosmétique estimait que cette place de marché viole son réseau de distribution fermé (revente de parfum, d'échantillon et testeurs dépackagés). L'Oréal fustigeait également la présence de produits contrefaits dans les rayons d'eBay malgré plusieurs notifications.

La High Court souleva une série de questions préjudicielles dans le cadre de cette affaire, dont la CJUE vient d'apporter ses réponses. C'est la partie liée à la responsabilité des intermédiaires (ici eBay) qui va générer le plus d'effets. Contacté, le juriste Benoit Tabaka reconnaît "une décision complexe".

L'Oréal avait notifié des vendeurs qui étaient réapparus en vendant toujours les mêmes produits. La question se posait du coup de savoir si eBay était toujours hébergeur à leur égard. "La Cour reprend ce qu'elle avait dit dans l'affaire Google, constate Benoit Tabaka, en opposant le rôle actif et le rôle passif".

Passif ou actif

En clair, si un intermédiaire a un rôle actif, il perd le statut d'hébergeur qui lui aurait évité d'être directement responsable des contrefaçons commises par des tiers. Si l'intermédiaire a un rôle passif, il peut être reconnu hébergeur. Voilà pour le cadre.

L'assistance dans la présentation et la promotion des offres

Que dit la CJUE ? D'un, une place de marché (ici eBay) n'est pas hébergeur lorsqu'elle a un rôle actif dans la promotion des offres. Lorsqu'un exploitant "prête une assistance consistant notamment à optimiser la présentation des offres à la vente en ligne ou à promouvoir ces offres", résume la CJUE, "il joue un rôle actif de nature à lui conférer une connaissance ou un contrôle des données relatives à ces offres". Sur eBay, rappelons que le site offre une multitude d'outils pour assurer la promotion des annonces (annonce en "gras" ou à la une, etc.). Autant d'arguments pour la High Court britannique de constater le rôle actif d'eBay.

Un intermédiaire passif, un opérateur diligent

Mais l'analyse s'affine quand l'hébergeur a un rôle passif. Même dans ce cas, dit la CJUE, notre intermédiaire ne peut s'exonérer de sa responsabilité "s’il a eu connaissance de faits ou de circonstances sur la base desquels un opérateur économique diligent aurait dû constater l’illicéité des offres à la vente en ligne". Il sera alors responsable des ventes illicites s'il n'a pas retiré promptement ou bloqué l'accès à ces offres.

Un opérateur diligent face aux offres similaires ou analogues

Pour engager la responsabilité d'un intermédiaire passif, "il suffira donc d'avoir simplement connaissance d'éléments qui permettent d'apprécier qu'il y a un contenu illicite" constate Benoit Tabaka. "J'ai l'impression qu'en parlant d'opérateurs diligents, on glisse de manière transversale vers les offres similaires ou analogues d'un autre vendeur" anticipe le juriste... L'idée : eBay est alerté d'une vente d'un produit illicite. Du coup s'il est opérateur diligent, eBay se retrouve en position de traquer les offres similaires ou analogues proposées par d'autres vendeurs… On devine les effets d'une telle approche.

"Cette décision est une sorte de consécration du fingerprinting, d'actions positives qu'on va attendre des intermédiaires dans la lutte contre la contrefaçon" estime Benoit Tabaka.

Le cas des injonctions : vers la consécrations du Notice & Stay Down ?

Ce glissement se confirme quand la CJUE traite des injonctions qui peuvent être adressées à un intermédiaire qui décide de ne rien faire contre des contenus problématiques. D'un, cet exploitant, souligne d'abord le communiqué de la CJUE, "peut être enjoint de prendre des mesures permettant de faciliter l’identification de ses clients vendeurs. À cet égard, s’il est certes nécessaire de respecter la protection des données à caractère personnel, il n’en demeure pas moins que, lorsque l’auteur de l’atteinte opère dans la vie des affaires, et non dans la vie privée, il doit être clairement identifiable."

De deux, dit l'arrêt, les législations européennes doivent prévoir un pouvoir d'injonction afin de mettre fin aux atteintes aux droits de la propriété intellectuelle, "mais aussi à prévenir de nouvelles atteintes de cette nature". Ces injonctions, encadre simplement la CJUE, "doivent être effectives, proportionnées, dissuasives et ne doivent pas créer d’obstacles au commerce légitime."

En clair, selon une première analyse, les législations européennes doivent prévoir une notification de Notice & Stay Down : on notifie un site, et celui-ci doit empêcher toute réapparition...

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